
L'éleveuse de vaches Emilie Jeannin milite pour donner une mort plus digne aux animaux. (Crédit : le Boef éthique)
Retrouvez notre enquête sur le financement des mouvements d'action végans dans le n°25 de la revue We Demain en kiosque le 21 février.
Emilie Jeannin élève 200 vaches charolaises à la ferme familiale de Lignières, en Côte-d'Or. Comme beaucoup de Français, elle se dit choquée par les méthodes d'abattage industriel, mises en lumière par les vidéos de l'association L214 notamment.
Faut-il pour autant arrêter d'élever des animaux ou devenir végétarien? Une autre voie est possible, affirme l'éleveuse : celle d'un élevage et d'un abattage plus respectueux du bien-être animal.
Divers initiatives se développent en France pour promouvoir ce bien-être. C'est le cas de l'association "Quand l'abattoir vient à la ferme", créé en 2015 par la directrice de recherches de l'Inra Jocelyne Porcher et l'éleveur Stéphane Dinard, auquel adhère 2000 citoyens, dont Emilie Jeannin. Objectif : pouvoir donner la mort aux animaux à domicile, pour leur éviter le stress lié aux transports et à l'attente dans l'ambiance morbide des abattoirs.
Autorisée en Suède ou en Allemagne, cette méthode était jusqu'ici interdite en France, mais les Etats généraux de l'alimentation en juillet 2018 ont ouvert la voie à une expérimentation de quatre ans. Le décret d'application est attendu en mai.
Emilie Jeannin est déjà prête. Elle a créé le Bœuf éthique, la première entreprise française d'abattage à domicile, dans un camion homologué qui ira de ferme en ferme dans sa région. À la veille du Salon de l'agriculture, explications.
- We Demain : Comment est née cette idée ?
- En plus des questions éthiques que cet abattage soulève, le stress a-t-il un réel effet sur la viande consommée ?
- Concrètement, comment se déroule l’abattage à domicile ?
Nous créons une filière parallèle clé en main. Nous proposons aux éleveurs de leur acheter leurs animaux vivants, et nous programmons ensemble une date. Le jour J, nous allons à la ferme avec notre camion, qui comprend cinq remorques pour être aux normes sanitaires. L’animal est toujours étourdi, au matador, puis saigné. Nous nous chargeons ensuite de la découpe, de la maturation et de commercialiser la viande sous un label de viande éthique.
- On reproche à ce modèle de ne pas être très rentable…
Ces arguments sont surtout ceux des grands industriels qui tiennent le marché européen, des lobbys très puissants qui ont pratiquement un bureau au ministère de l’Agriculture et qui font tout pour que cette concurrence ne voie pas le jour, avec même des intimidations et des menaces aux agriculteurs intéressés…
- La viande sera-t-elle vendue plus chère ?
- Le décret d’application devrait être signé en mai. Le secteur est-il prêt à sauter le pas ?
- Vous apportez une réponse locale, mais le problème n'est-il pas le modèle industriel global d’abattage intensif, qu'il faudrait réformer ?
Le combat d'Emilie Jeannin pour donner une mort plus digne aux animaux fait aussi l'objet d'un film La ferme d'Emilie dont la sortie est prévue mi-avril.
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