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Il roule de Paris à Bakou à vélo pour parler décarbonation des transports à la COP29

Guillaume Otrage est parti à vélo du Trocadéro à Paris le 15 juin dernier pour son “COP 29 Bike Ride”. Dans quelques heures, en ce mois de novembre, il arrivera enfin à destination. Son objectif : Bakou, en Azerbaïdjan, à quelque 6 500 kilomètres de là. À raison de 60 à 80 kilomètres par jour, l’homme a réussi à rejoindre la COP29 juste à temps pour le début de l’événement, qui se tient du 11 au 22 novembre dans la capitale de ce pays situé au bord de la mer Caspienne et qui partage ses frontière avec la Russie, la Géorgie, l’Arménie et l’Iran.

Pourquoi un tel raid de cinq mois entre la France et l’Azerbaïdjan ? Pour sensibiliser à l’importance de la place du vélo dans la décarbonation du secteur des transports lors de la conférence sur les changements climatiques. Guillaume Otrage y présentera dix propositions allant dans ce sens. Cette aventure a également été l’occasion d’embarquer avec lui des militants de différents horizons et pays qui l’ont accompagné sur des portions de son parcours. En visioconférence alors qu’il faisait escale dans la ville de Bərdə à 300 kilomètres environ de la capitale, Guillaume Otrage a expliqué plus en détail à WE DEMAIN cette expédition unique en son genre.

Des vélos et des sacoches bien remplies, à la frontière avec la Géorgie. Crédit : COP29 Bike Ride.

Pourquoi cette aventure, et surtout, pourquoi à vélo ?

Guillaume Otrage : L’idée est née d’une conviction personnelle et d’années de pratique. Cela fait huit ans que j’ai renoncé à la voiture, et depuis trois ans, je multiplie les voyages à vélo sur de longues distances. Après des périples en Bretagne et jusqu’en Italie, j’ai voulu pousser l’expérience plus loin. La COP29, c’est une occasion parfaite pour porter un message fort : le vélo est une solution de décarbonation du transport accessible à tous, partout. En partant à vélo, on démontre qu’il est possible de se déplacer de manière responsable et sobre.

Moi, j’ai acheté un vélo Decathlon Riverside d’occasion. J’y ai accroché cinq sacoches remplies de l’essentiel. Cela a ajouté 25-30 kilos d’équipement au poids du vélo et c’était tout à fait suffisant pour ce périple. C’est dans ces conditions que l’on s’aperçoit qu’on n’a pas besoin de grand chose pour bien vivre au quotidien.

Pouvez-vous nous donner un aperçu des défis rencontrés en route ?

On a traversé des régions où le vélo n’est pas toujours le bienvenu. Istanbul, par exemple, manque cruellement d’infrastructures pour les cyclistes ; c’est une ville où la voiture est reine. On ne compte que 50 kilomètres de pistes cyclables en tout, c’est ridiculement peu par rapport aux 16 millions d’habitants.

À l’inverse, des villes comme Strasbourg ou encore Novi Sad en Serbie, que nous avons traversées, font un bel effort d’aménagement pour encourager la mobilité douce. À Novi Sad, la part modale du vélo y est de 12 % ! Mais ce raid est globalement une vraie mosaïque d’expériences. Il y a des endroits où la sécurité cycliste est quasi inexistante, et d’autres où l’on se sent bien accueilli. Chaque étape a apporté son lot de défis, qu’ils soient physiques, logistiques ou même liés aux infrastructures.

Justement, en parlant d’infrastructures, quel message portez-vous à la COP29 ?

Nous voulons encourager la prise en compte du vélo dans les stratégies de décarbonation. Avec un groupe d’experts venus de divers pays, nous avons élaboré dix propositions concrètes. Cela va de l’amélioration des infrastructures cyclables jusqu’à la planification des financements pour des villes plus cyclables. Ces recommandations visent à être applicables partout, que ce soit dans de petites villes africaines ou de grandes métropoles européennes.

Il est temps que nos villes fassent le choix courageux de se libérer de la dépendance à la voiture. Nous sommes face à une impasse écologique, et le vélo représente une alternative viable. J’espère que notre message à Bakou trouvera un écho et inspirera des actions concrètes.

À Ankara en Turquie, comme dans bien d’autres villes traversées, Guillaume Otrage (au mégaphone) en a profité pour souligner l’importance de l’usage du vélo dans la décarbonation des transports. Crédit : COP29 Bike Ride.

Concrètement, combien de temps faut-il en moyenne à une ville pour faire de la place au vélo ?

On estime qu’il faut entre 8 et 10 ans pour qu’une ville se transforme et qu’on voit émerger un cercle vertueux autour du vélo : il existe des pistes cyclables sécurisées alors il y a de plus en plus de cyclistes, donc on crée davantage d’infrastructures dédiées…

C’est ce que l’on commence à voir aujourd’hui à Paris où la part modale du vélo est aujourd’hui de 11 % [contre 4 % pour la voiture, NDLR]. Il y a bien sûr eu des moments de frustration mais aujourd’hui prendre son vélo à Paris est l’assurance de gagner du temps dans ses déplacements tout en bénéficant d’infrastructures sécurisées. Mais tout cela n’est pas possible sans un vrai leadership politique.

À combien de kilomètres êtes-vous de Bakou aujourd’hui ?

Nous sommes très proches de Bakou, il reste environ 300 kilomètres avant d’y arriver. On en est à un peu plus de 6000 kilomètres parcourus, et chaque coup de pédale nous rapproche de notre objectif. Au début, nous ne voulions pas imaginer le trajet qu’il y avait à parcourir tant cela paraissait immense. Aujourd’hui, nous sommes heureus de pouvoir regarder derrière nous pour apprécier tout ce qui a déjà été accompli.

Nous devrions sans doute arriver à Bakou lundi, donc dans les temps. Nous allons pouvoir prendre des rendez-vous pour rencontrer des gens de tous pays et échanger avec eux sur la solution du vélo dans la décarbonation des transports. Mais il va falloir auparavant que je m’achète des vêtements propres et en bon état car mes trois T-shirts utilisés depuis cinq mois commencent à être très usés !

Guillaume Otrage, deuxième à partir de la droite, était généralement accompagné de quelques personnes lors de son périple. Ici, sur un plateau en Géorgie. Crédit : COP29 Bike Ride.

Combien de personnes vous accompagnent dans cette aventure ?

Ce projet est à la fois personnel et collectif. Je suis le seul à faire le trajet complet, mais au total, une centaine de participants de nationalités diverses m’ont rejoints par étapes, en fonction de leur disponibilité. En moyenne, les personnes, des hommes comme des femmes, me rejoignaient pour une semaine. Et nous nous adaptions en fonction des budgets de chacun : dormir sous la tente, partager des chambres d’hôtel…

Nous avons aussi rencontré des associations locales pour sensibiliser et mobiliser les populations rencontrées. C’était l’occasion de les interroger sur leurs attentes quant à la COP29 et leur demander s’ils avaient des idées pour enrichir nos propositions.

Le retour de la COP29 se fera aussi en mobilité douce ?

Absolument ! Pour rester cohérent, je ne prendrai pas l’avion. On envisage de rentrer si possible en train, voire en bus si nécessaire. La difficulté est que nous n’avons pas toujours d’information sur la possibilité de mettre notre vélo dans le train alors on s’adaptera. Mais le but est de démontrer qu’une participation à un événement international peut se faire sans empreinte carbone liée à l’aérien.

6500 kilomètres (et même un peu plus) pour porter la bonne parole à la COP29. Crédit : COP29 Bike Ride.

Vous envisagez de recommencer pour la COP30 qui se tiendra à Belém en 2025 ?

Nous avons commencé à y réfléchir, bien sûr. Le défi sera différent car il y a un océan à traverser. Cela se fera sans doute à la voile. Mais nous voudrions surtout embarquer différentes associations dédiées au vélo, un peu partout dans le monde. Ce serait chouette de voir converger à Belém des cyclistes venus à vélo de différents pays du continent sud-américain. On pourrait aussi imaginer un relais, un peu à la façon du passage de la flamme olympique. Le but est de donner un maximum de visibilité au transport à vélo à cette occasion.

Pour en découvrir davantage sur le COP 29 Bike Ride, un site dédié a été créé.

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