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Vente à emporter : quand la consigne emballe

De plus en plus de restaurants, food-truck ou cantines d’entreprise proposent des boîtes consignées à la place des emballages jetables pour les plats à emporter. Objectif : réduire l’impact écologique du « take away ».

Le 15/11/2019 par Alice Pouyat
Ce foodtruc a adhéré aux services de consigne de BoxEaty, à  Bordeaux. (Crédit: BoxEaty)
Ce foodtruc a adhéré aux services de consigne de BoxEaty, à  Bordeaux. (Crédit: BoxEaty)

« Vous souhaitez une boîte en verre consignée ou un emballage jetable ?”  Voilà le choix proposé, ce midi de novembre au Bichat, un restaurant bio du Xe arrondissement de Paris, lorsque l’on commande un plat à emporter. Abandonnée dans les années 1980, la consigne revient au goût du jour pour épargner les emballages finissant à la poubelle 15 minutes plus tard. Chaque année en France, 180 000 tonnes de déchets d’emballages sont en effet générés par la restauration rapide.

Le prix est raisonnable : 3 euros la caution, pour un contenant facile à rapporter quand on vit ou travaille à côté du restaurant. « 80 à 90 % gens reviennent avec leur bol, souvent déjà lavé pour reprendre à manger », confirme Armelle, manager du Bichat. Qui souligne : « On avait déjà testé cela il y a deux ans, mais ça fonctionne mieux aujourd’hui : on sent une prise de conscience écologique croissante des clients. »

Et ce restaurant n’est pas un cas à part. Ces derniers mois, associations et start-up se montent les unes après les autres pour développer la consigne à plus grande échelle dans la restauration.

À Paris, Toulouse, Bordeaux…

Depuis avril, la coopérative toulousaine En boîte le plat a convaincu treize restaurateurs d’utiliser, là aussi, des boîtes en verre Duralex, garanties à vie. Consignée à 5 euros, elles peuvent être rapportées par les clients dans n’importe quelle enseigne du réseau. L’entreprise se charge même de la collecte – en vélo-cargo – des boîtes sales dans les restaurants, et de leur nettoyage dans des « éco-laveuses ». « On utilise 20 cl d’eau par contenant, contre 3 litres environ pour produire un emballage jetable », précise Jonathan Conan, 29 ans, l’un des cofondateurs. Toutes les enseignes qui ont testé le service durant ses trois premiers mois ont reconduit l’expérience.

À Bordeaux, l’entreprise BoxEaty fédère quant à elle une dizaine d’enseignes (4 euros le contenant en verre Luminarc) autour du même principe. « En trois mois de test, 4 000 emballages ont été évités, on veut vraiment changer les façons de consommer », se réjouit sa cofondatrice Estelle Fillette, 31 ans, par ailleurs responsable locale de l’association Surfrider.

À Paris, plusieurs réseaux se tissent également depuis quelques mois, comme Reconcil, qui loue aux restaurants des boites en plastique. Moins durables (recyclées au bout d’une trentaine d’utilisation), mais moins chères et légères.

Ou encore MyGreenGo, qui propose des bocaux aux grandes entreprises du quartier de la Défense. « Les salariés désertent les cantines d’entreprise, ils préfèrent y acheter des plats à emporter », explique la cofondatrice de ce réseau, Yasmine Dahmane. La Société Générale, SAP, Engie se sont déjà laissés tenter par ses bocaux.

De son côté, MyGreenGo a convaincu des enseignes comme Jour, Cojean ou Biocoop. Avec cette fois une consigne dématérialisée, gérée via une application. « Le but est de créer un réseau pour rendre facile l’usage de la consigne. »

Faire baisser le coût de la consigne

« Mutualiser est aussi une façon de faire baisser les coûts, ajoute Estelle Fillette, à Bordeaux. Nous visons une trentaine de restaurants pour être rentables, ce qui semble accessible. »

Car l’usage de contenants consignés reste souvent plus cher pour les restaurateurs que celui d’emballages basiques : entre 30 et 80 centimes l’unité… contre 10 centimes pour un papier-plastique à kebab par exemple. « Mais, si un restaurant propose déjà, à l’origine, des boîtes en cellulose un peu plus élaborés : alors la consigne peut revenir moins cher », précise Estelle Fillette.

Reste que le système de consigne va devenir de plus en plus compétitif. « La législation qui va bientôt interdire le PET (plastique d’origine pétrochimique) au profit d’un plastique biosourcé deux à trois fois plus couteux va aussi dans notre sens », note Yasmine Dahmane de MyGreenGO. Surtout, les restaurants qui font ce choix gagnent en image de marque, souligne-t-elle. « C’est une façon de fidéliser ou de conquérir de nouveaux clients. »

La consigne, un défi local et national

À l’avenir, le défi pour ces entreprises de consigne est donc densifier leur réseau, chacune sur son territoire : impossible d’être rentable et écologique si l’on est trop dispersé, souligne Alice Abbat, coordinatrice du Réseau Consigne qui vient de se créer pour fédérer les acteurs de la filière. « Demain, l’objectif est aussi d’harmoniser les contenants proposés pour mettre en place des réseaux de lavage et de collecte communs. » 

Le réseau soutient aussi cette proposition de Zéro Waste France : interdire au moins le jetable pour les repas pris sur place dans la restauration, qui permettrait déjà de supprimer 15 000 tonnes de couverts en plastique et autres déchets, comme ceux distribués chez MacDonald’s et les chaines de fast-food.

À lire aussi : Une pétition pour demander à MacDonald’s de passer au zéro déchet

Pour consolider le modèle, des aides publiques sont aussi attendues, ne serait-ce qu’au titre des déchets évités. « Si on veut un modèle juste sur toute la ligne, tout le monde doit être impliqué, plaide Jonathan Conan, à Toulouse. Sinon, on ne pourra pas  continuer à proposer un service économique et payer dignement nos livreurs à vélo. »
 
En attendant, des alternatives voient le jour. Des restaurants proposent par exemple d’apporter son propre contenant, notamment rue du Paradis à Paris qui mène une expérience zéro déchet à l’échelle de la voie. Avec parfois même, pour leurs clients, un petite réduction à la clé.

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