Partager la publication "Huile d’olive en péril ? Comment le climat change la donne… et fait chuter la production"
Consommera-t-on toujours autant d’huile d’olive dans les années à venir ? Pas si sûr… Depuis quelques années, l’industrie de l’huile d’olive fait face à une crise sans précédent, exacerbée par les effets du changement climatique. Les principaux pays producteurs – notamment l’Espagne, l’Italie et la Grèce – subissent des vagues de chaleur intenses et des sécheresses prolongées qui mettent en péril la production d’olives.
Ces phénomènes météorologiques extrêmes, amplifiés par le réchauffement climatique, ont contribué à une chute drastique de la production mondiale d’huile d’olive. Entre 2021 et 2024, la production globale a chuté d’un tiers, selon les estimations de l’International Olive Council, impactant directement les marchés internationaux, et suscitant des inquiétudes quant à l’avenir de l’industrie si aucune solution durable n’est trouvée.
L’Espagne, qui représente plus de 40 % de la production mondiale, a été particulièrement touchée. En 2022, des températures record ont été enregistrées dans presque la moitié du pays, créant des conditions de sécheresse intense, malgré des précipitations normales. Cela a conduit à une récolte historiquement basse, aggravant la crise, explique Carbon Brief. Et, bien que la production espagnole ait montré des signes d’amélioration en 2023-2024 avec plus de 850 000 tonnes récoltées, ce chiffre reste bien en deçà de la moyenne des cinq dernières années.
Cette baisse de production a des répercussions économiques considérables. Entre janvier 2023 et janvier 2024, les prix de l’huile d’olive ont grimpé de 70 % au Portugal par exemple, et de 50 % en moyenne dans l’Union européenne. En Espagne aussi, l’inflation est de mise (prix en hausse de +59 %), renforcée, qui plus est, par les pratiques des supermarchés. Résultat : de l’autre côté des Pyrénées, l’huile d’olive est devenue le produit le plus volé dans les supermarchés. Si en France, on consomme 1,7 litre d’huile d’olive en moyenne par an, les Espagnols sont loin devant en la matière. Chez nos voisins, la moyenne s’élève à 16 litres par habitant et par an !
Au-delà des impacts économiques, le changement climatique remet en question la durabilité des méthodes de production traditionnelles. Les producteurs tentent d’adapter leurs pratiques en investissant dans des technologies plus efficaces et en explorant de nouvelles variétés d’oliviers plus résistantes à la sécheresse. Cependant, ces efforts ne suffisent pas à compenser la baisse de rendement liée aux conditions climatiques difficiles.
« Depuis la nuit des temps, pour obtenir une huile de qualité, il faut veiller à ce que les olives ne soient pas trop mûres au moment de la récolte et du pressage, explique Steffen Hruschka, ingénieur spécialiste dans le domaine. Aujourd’hui, les olives mûrissent bien plus rapidement et doivent être récoltées plus tôt, à des températures de près de 30 degrés Celsius contre 10 à 17 °C de par le passé. Dans ces conditions, maintenir la qualité devient très difficile. » Il importe donc de manipuler avec une grande délicatesse les olives afin de minimiser l’oxydation lors de la récolte et au moment de leur transformation.
Autre évolution : les producteurs d’huile d’olive cherchent aussi de nouvelles sources de revenu et à mettre en place une économie circulaire pour une meilleure résilience de la filière. Cela passe notamment par une valorisation des déchets et des sous-produits de production de l’huile d’olive.
« Dans 15 ou 20 ans, un producteur d’huile d’olive européen ne sera plus en mesure de vivre de son huile, assure Conrad Bölicke, fondateur d’arteFakt, une coopérative basée en Allemagne qui compte près de 1000 membres à travers l’UE. Nous devons maintenant changer la donne pour atteindre une augmentation de la valeur ajoutée qui mène à une plus grande rentabilité. Pour cela, nous devons mettre au point de nouvelles technologies qui soient plus efficaces et tirent davantage parti de nos ressources existantes. » arteFakt explore notamment les méthodes agroforestières en réponse au réchauffement climatique.
Néanmoins, pas de panique, la pénurie n’est pas encore à l’ordre du jour. Certes, les stocks des grands fournisseurs européens sont en baisse en raison du recul général de la production mais la situation n’est pas critique à l’heure actuelle. Ce ne sera sans doute pas le cas d’ici une ou deux décennies.
Si les émissions de gaz à effet de serre ne sont pas réduites de manière significative, les sécheresses et les vagues de chaleur continueront d’affecter les cultures, menaçant à long terme la production d’une ressource clé pour des millions de personnes. L’avenir de l’huile d’olive, symbole de la Méditerranée (85 % de la production mondiale d’huile d’olive), sera alors incertain.
Nous avons toutes et tous un rôle crucial à jouer pour soutenir une production d’huile d’olive plus respectueuse de l’environnement. Voici quatre actions à considérer pour faire une différence dans la transition vers une agriculture plus durable, tout en soutenant les petits producteurs qui subissent déjà les effets du changement climatique.
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