En Gironde, des haies au milieu des champs apportent un havre de biodiversité. Crédit : Muriel Joly / stock.adobe.com
La haie est la porte d’entrée d’un monde sauvage qui vit à nos côtés et s’adapte autant que faire se peut à notre présence. On ne reviendra pas ici sur le rôle agronomique et économique du bocage (protection de la ressource en eau, de l’érosion, du vent, du soleil, production de fourrage, de bois, de fruits, puits de carbone, fertilité).
Ces services rendus aux êtres humains ne doivent pas masquer le rôle premier des haies, des chemins creux, des ripisylves (forêts boisées, buissonnantes ou herbacées situées sur le bord d’un cours d’eau) : ce sont des habitats, des buffets permanents à ciel ouvert, des lieux de reproduction, des hôtels pour migrateurs. Chaque strate a ses hôtes et ses invités. Ça grouille de vie à tous les étages, dessous, sur et au-dessus du sol.
Laissons vivre dans la discrétion de l’humus la cohorte des collamboles, vers, acariens, champignons et bactéries, à peine troublée par les terriers et galeries des petits mammifères (mulots, musaraignes, campagnols, taupes, lapins…) et des insectes (abeilles sauvages). À même le sol, on trouve des mollusques (escargots, limaces), des insectes (carabes, araignées, sauterelles), des batraciens (crapauds, grenouilles), des reptiles (lézards, orvets, couleuvres, vipères), des mammifères (renards, hérissons, fouines, lièvres, chevreuils).
Quand on lève les yeux, on peut voir dans les branchages écureuils, loirs et muscardins, une troupe de butineurs (papillons, bourdons, guêpes, abeilles) et une variété d’oiseaux (mésanges, accenteurs, bruants, fauvettes, grives, rossignols, merles, pies, faucons crécerelles, sitelles…). Les anfractuosités des arbres laissent deviner le refuge des chouettes, des chauves-souris. Cette diversité de la faune fait écho aux centaines d’espèces végétales dont la combinaison décident des caractéristiques du peuplement animal.
Tout ce beau monde bouge, rampe, grimpe, sautille, volette, court pour satisfaire son appétit et sa soif, pour trouver l’amour, protéger ses petits, fuir un danger, aller voir ailleurs si la haie y est plus accueillante. La haie immobile est une voie rapide de déplacement, comme le chemin qui la borde où l’on se meut à l’abri des regards prédateurs. Chaque espèce voyage à sa vitesse propre.
Le bond du chevreuil ne se compare pas à celui de la sauterelle, ni le vol d’une punaise à celui d’une buse. Même les végétaux enracinés circulent via leurs graines priées par le vent d’aller germer plus loin. Les animaux leur donnent un coup de main, de l’insecte pollinisateur qui va féconder une fleur éloignée à l’herbivore qui emporte les graines sous ses sabots, dans ses poils, dans ses fèces, qu’ils déposent au fil de leurs pérégrinations. La haie est une autoroute forestière. Une forêt linéaire.
La haie, les forêts, les milieux humides, les cours d’eau, sont autant de réservoirs de biodiversité promis au dépérissement si leurs populations sont isolées par le morcellement des haies, par la trop grande distance séparant deux forêts, deux mares, deux biotopes ; par les barrages bloquant les mouvements de la vie aquatique. La haie n’est pas réductible à son emprise au sol comme trop d’agriculteurs la considèrent. Avec sa part de sol et d’air, elle est une veine où bat la vie de l’écosystème. Une veine verte. Bien pensée, elle relie les milieux et assure le brassage génétique indispensable à l’évolution des espèces et à leur adaptation à l’environnement.
L’aménagement du territoire – routes, voies ferrées, canaux, barrages –, le bâti (villes et villages, infrastructures sportives…), n’a longtemps pas tenu compte de ce devoir de continuité à l’égard du sauvage. Ces nombreux obstacles sont aujourd’hui à compenser par des passages à faune et à flore au-dessus et en dessous (pour les amphibiens) des voies de communication, en ville par des alignements d’arbres connectés aux parcs, en campagne par la restauration des haies, par le ménagement d’ouvertures dans les clôtures de jardin, par des passes à poissons et le rétablissement du cours naturel des rivières. Et la stricte préservation des réservoirs de biodiversité où s’écrit en permanence le précieux livre de la vie.
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