Pollution : 5 chiffres effrayants sur le transport maritime

La compagnie maritime La Méridionale a signé le jeudi 8 septembre une charte d’éco-responsabilité avec l’Agence française pour la biodiversité. L’objectif ? « Réduire les impacts du transport maritime et préserver l’environnement et la biodiversité. » Cette démarche – une première en France – engage à respecter quelques bonnes pratiques, plus qu’à atteindre des objectifs chiffrés.

La fédération France nature environnement (FNE), qui réunit des associations de protection de la nature et de l’environnement, soutient cet engagement volontaire : selon elle, il montre le bon exemple. « Nous saluons également leur volonté de protéger la santé des citoyens et de leur travailleurs », explique la FNE. Elle regrette toutefois « un manque de nouvelles actions et de nouveaux engagements dans la charte, par rapport à ce qui est acquis ou en cours. »

L’enjeu de transformer ce type de transport en un système plus respectueux de l’environnement est de taille : l’Organisation des nations unies (ONU) indique dans un rapport daté de l’an dernier que la marine marchande représente plus de 80 % du commerce mondial en termes de volume. Le transport maritime est loin d’être un modèle écologique, avec ses émissions de gaz à effet de serre et de particules fines qui posent des risques sanitaires. Petit aperçu en 5 chiffres.

Côté soufre, 1 bateau de croisière = un million de voitures

Un paquebot de croisière émet une quantité impressionnante d’oxyde de soufre : elle est équivalente à un parc automobile d’un million de voitures ! L’association NABU, à l’origine de ce chiffre avec la FNE, l’explique par la composition du carburant qui remplit le réservoir des navires : la teneur en soufre dans le fioul maritime ne doit pas excéder 3,5 %… contre 0,001 % dans le diesel automobile. Sur certains territoires, qualifiés de « zones de contrôle des émissions », les bateaux ne peuvent naviguer qu’avec un carburant composé au maximum de 0,1 % de soufre. C’est le cas de la mer Baltique, de la mer du Nord, d’une zone d’Amérique du Nord et enfin de la mer des Caraïbes.

Les émissions d’oxyde de soufre devraient toutefois diminuer à partir de 2020 : l’Organisation maritime internationale, une institution des Nations Unies, a instauré à cette date une limite de soufre à 0,5 % dans le carburant maritime.

93 161 navires de commerce dans le monde

Ce sont un peu plus de 93 100 navires qui composaient la flotte commerciale mondiale au 1er janvier 2017, selon la Conférence des Nations unies sur le commerce et le développement. Elle précise dans un rapport que la croissance de la flotte mondiale a ralenti pour la cinquième année consécutive. Mais cette tendance fait suite à une hausse impressionnante de plusieurs décennies :  l’Institut supérieur d’économie maritime Nantes – Saint Nazaire a relevé une envolée de 40 % du nombre de navires de plus de 300 tonnes entre 1995 et 2015.

932 millions de tonnes de CO2 émises en 2015

L’ensemble du parc maritime a émis en 2015 près de 932 millions de tonnes de CO2, alerte le Conseil international pour les transports propres (ICCT). Dans un rapport publié en 2017, cette ONG indépendante a relevé une progression de 20 millions de tonnes de CO2 entre 2013 et 2015. Le dioxyde carbone provient de l’utilisation des carburants fossiles et des processus industriels. En 2015, le transport maritime représentait 2,6 % des émissions mondiales de CO2. Les porte-conteneurs sont les navires les plus pollueurs, pointe Air PACA, une association de surveillance de la qualité de l’air. Selon elle, les porte-conteneurs contribuent à plus de 60 % de la production totale de CO2 du transport maritime.
 

Marseille : 10% de la pollution de l’air due aux bateaux

Les grandes villes portuaires n’amassent pas que les touristes, mais aussi les particules fines. L’association Air PACA a estimé qu’à Marseille, le transport maritime contribue à hauteur de 5 à 10 % à la pollution de l’air mesurée en centre-ville. Selon elle, le trafic portuaire est responsable des trois-quarts d’émissions de dioxyde de soufre et pour un tiers de celles d’oxyde d’azote. Le port marseillais se positionne comme le premier port de croisière de France et le cinquième d’Europe.
 

250 000 décès estimés par an

Une étude publiée en février 2018 a évalué les conséquences sanitaires de la pollution du transport maritime. Selon elle, même avec une teneur en soufre limitée à 0,5 % (qui sera mise en place en 2020), les combustibles marins seront responsables chaque année de 250 000 décès prématurés en moyenne. Une prévision bien supérieure à celle d’une étude précédente, coordonnée par le même chercheur, qui chiffrait en 2007 ce nombre à 60 000.

Il reste beaucoup à faire pour réduire les conséquences environnementales et sanitaires du transport maritime. Aller plus loin dans la réglementation de la composition du carburant est une idée. Certains souhaitent même s’écarter d’une motorisation à fioul et misent sur une alimentation électrique. C’est le cas d’une compagnie hollandaise qui a développé le premier porte-conteneurs électrique. Reste à voir si d’autres entreprises se jetteront à l’eau.

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