Toutes les initiatives dans les territoires

Imprimer

Urbanescence, un réseau d’éco-lieux pour promouvoir la transition écologique en ville

🌿 C’est un petit îlot de verdure de 1 400 m2, coincé entre le gris des immeubles, s’étirant le long des rails de la petite ceinture parisienne. Ce mercredi 6 août, des habitants de l’éco-quartier de la Gare de Rungis viennent sur l’éco-lieu « 13 Infuz » pour acheter de la tisane. Des mélanges made in 13e arrondissement, composés de plantes aromatiques et de fleurs cultivées sur des buttes, arrondies et fertiles, selon les principes de la permaculture.

💊 « Elles sont plus efficaces pour dormir que les comprimés de mon médecin », affirme Rayepa, gardien d’un immeuble à côté sur le boulevard Kellermann. Ces préparations sont l’œuvre de l’association Urbanescence. Créée en 2017, elle gère actuellement quatre sites, entre Paris sud et Montrouge (Hauts-de-Seine).

13 Infuz
Situé dans le 13e arrondissement, sur l’éco-lieu « 13 Infuz », pousse une cinquantaine de plantes. Crédit : Ronan Bardet.

En 2023, WE DEMAIN a noué un partenariat avec le Centre de Formation et de Perfectionnement des Journalistes (CFPJ). Quinze jeunes journalistes en contrat de professionnalisation ont travaillé à la production d’une série d’articles autour des initiatives dans les territoires. Retrouvez ici l’ensemble des sujets publiés sur la question.

Un travail de déconstruction

📐 À l’origine, Julien Garnot co-fonde la structure sur le site des « Grands Voisins », où plusieurs associations avaient investi et co-géraient les trois hectares de l’ancien hôpital de Saint-Vincent de Paul (14e). « On a monté Urbanescence pour l’intérêt général, avec une SCOP pour la partie bureau d’études ». Urbaniste de formation, aujourd’hui écologue et permaculteur, il explique avoir réalisé un travail de déconstruction de son métier et de sa formation initiale : « Depuis les années 80, la façon de faire la ville va dans le sens du capitalisme, avec des méthodes industrialisées. Alors qu’elle doit être faite sur-mesure, en tenant compte des spécificités du territoire, de ses usagers, en harmonie avec son environnement et sa biodiversité. »

🌱 Associant ses compétences à celles de la paysagiste Flore Chantraine, co-fondatrice de l’association, ils proposent « des projets paysagers pro-biodiversité ». Leur objectif n’est pas de nourrir les habitants, mais « de mettre en place des lieux démonstrateurs de la transition écologique et solidaire », explique Julien Garnot.

Julien Garnot et Flore Chantraine ont créé l’association Urbanescence en 2017. Crédit : Ronan Bardet.

Depuis 2019, la contruction d’un véritable petit réseaux d’éco-lieux

🟢 En 2019, l’association remporte deux appels à projets dans le cadre du programme Parisculteurs (lancé par la mairie de Paris en 2016, celui-ci a déjà permis l’installation de 70 projets d’agriculture urbaine sur 15 hectares intra-muros). Grâce à ce soutien, l’écologue et la paysagiste créent « 13 Infuz » et le projet « Monte en graine » dans le 12e arrondissement, un jardin participatif aménagé par les habitants d’une résidence du quartier Bel-Air.

🍒 La même année, ils commencent à piloter le projet de jardin coopératif de la Gare de Reuilly (12e), et gagnent aussi un appel d’offre municipal pour mettre en place une mini-forêt comestible « Les fruits rouges de Montrouge ». Sur ces 300 m2, poussent, entre autres, des mûres, des framboises, des pommes ou des coings, etc. De quoi constituer un véritable petit réseau, leur permettant de réaliser des économies sur des achats groupés et sur les temps de déplacement d’un lieu à l’autre, toujours à vélo !

Aux “Fruits rouges de Montrouge” poussent entre 40 et 50 d’espèces différentes de plantes, d’arbres et d’arbustes. Crédit : Ronan Bardet.

Avec et pour les habitants

🪴 La vision de ces projets semble comprise. Sur l’éco-lieu « 13 Infuz », des habitants du quartier viennent entretenir les plantes bénévolement. Comme Roseline, assistante sociale à la retraite, qui aide l’association « depuis le 1er jour ». Ou Amandine, 39 ans, graphiste indépendante : « Comme je suis toute la journée sur mon ordinateur, j’avais envie de faire une activité manuelle en extérieur. »

🌻 Des agents du service espaces de la ville viennent également déposer la tonte des gazons des parcs à proximité. Un échange de bon procédé : « Cela nous évite de devoir l’évacuer ailleurs et eux, ils en font du mulch* pour leurs plantations », témoigne un agent lui aussi conquit par l’initiative et sa propension à réunir les riverains. « Les projets d’Urbanescence fonctionnent très bien », estime de son côté Audrey Pulvar, adjointe à la mairie de Paris en charge de l’alimentation durable, de l’agriculture et des circuits courts. « Pour ‘Monte en Graine’, on a beaucoup insisté pour qu’il s’intègre dans le lieu où il est installé, que la population puisse y avoir accès avec des formations et des rencontres. »

Sur le site de l’éco-lieu “Les Fruits rouges de Montrouge” la cueillette est participative. Les habitants viennent cueillir ce qu’ils souhaitent et payent à la sortie. Crédit : Ronan Bardet.

Différentes sources de financement pour soutenir les projets d’Urbanescence

💐 Depuis 2021, Urbanescence a profité du soutien financier de la Ville de Paris à hauteur de 46 000 euros. Sur « 13 Infuz », les 30 kg de plantes récoltés par an rapportent entre 4 000 et 5 000 euros par an. En parallèle, l’association dispense « une quarantaine d’animations par an », précise Lisa Bertrand, chef de projet du site. Des ateliers et des formations que la structure fait payer aux entreprises, et à un tarif préférentiel aux scolaires et aux Ehpad.

🦋 Pour l’avenir, « on veut multiplier les expérimentations : fabriquer une toiture papillon pour récupérer l’eau de pluie et augmenter la capacité du composteur pour l’ouvrir au quartier », projette Julien Garnot. Il espère également doubler les recettes annuelles issues des ventes de tisanes pour « stabiliser le modèle économique ». Enfin, ils veulent faire venir plus de monde sur leurs sites en organisant des événements, comme leur prochaine rencontre-débat le 23 septembre sur le thème : « Biodiversité et activités humaines : est-ce compatible ? »

* Mulch : une couverture du sol constitué de produits végétaux pour préserver l’humidité du sol et l’enrichir.

Auteur : Ronan Bardet

SOUTENEZ WE DEMAIN, SOUTENEZ UNE RÉDACTION INDÉPENDANTE
Inscrivez-vous à notre newsletter hebdomadaire
et abonnez-vous à notre magazine.