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Climat : Thomas Piketty interpelle les dirigeants européens

Alors que les chefs d’État s’apprêtent à décider des objectifs climatiques de l’Union, l’économiste français plaide dans une tribune du Financial Times traduite par Reporterre pour une croissance à bas carbone, « seul avenir qui ait du sens ».

Le 23/10/2014 par WeDemain
Thomas Piketty © Universitat Pompeu Fabra
Thomas Piketty © Universitat Pompeu Fabra

Jeudi et vendredi, les dirigeants européens doivent se mettre d’accord sur les objectifs énergétiques de l’Europe à l’horizon 2030. À cette occasion, Thomas Piketty, Claudia Kemfert de l’Institut allemand pour la recherche économique (DIW) et Cameron Hepburn de l’université d’Oxford publient une lettre ouverte coordonnée par Avaaz et à paraître dans le Financial Times. Reporterre l’a traduite, et We Demain la relaie.

Les économistes sont habituellement réticents à parler ensemble publiquement d’une seule voix. Aujourd’hui, nous avons choisi de nous unir, et d’appeler les leaders de l’Europe à placer le continent sur un nouveau chemin de croissance.

Jusqu’à présent, nos leaders politiques sont paralysés par un faux choix. Quelques pays refusent de quitter la route à haut degré de carbone, ce qui laisse ouvert le risque d’un changement climatique qui nuirait sévèrement à notre prospérité à long terme. Les dégâts économiques qu ont suivi les inondations à travers l’Europe dans les douze derniers mois sont un présage de ce qui est à venir. Le coût de l’inaction n’est simplement dans l’intérêt stratégique de personne.

D’un autre côté, on trouve ceux qui voit un nouveau chemin d’investissement en bas carbone capable de générer une croissance forte et propre – pas seulement dans le futur, mais maintenant. Dans les quinze prochaines années, des investissements de 90 000 milliards de dollars moderniseront les cités du monde, et les systèmes énergétique et agricole. L’Europe doit se mettre en situation d’engager ces alternatives aux structures basées sur les fossiles et non durables.

C’est une opportunité jamais vue de diriger l’investissement vers une croissance à bas carbone, apportant des bénéfices aux emplois, à la santé, à la productivité des affaires et à la qualité de la vie. Les plus grandes entreprises, les petits investisseurs et une nouvelle génération d’entrepreneurs démontrent déjà comment les marchés peuvent orienter cette croissance à bas carbone. C’est déjà en train d’arriver, mais l’Europe n’est plus en tête.

Nos leaders ont un choix difficile à faire cette semaine. Soit ils cèdent aux intérêts acquis et continuent comme avant. Soit ils se mettent d’accord pour réduire les émissions d’au moins 40 % d’ici à 2030, plaçant l’Europe et le monde sur un chemin permettant de décarboner l’économie et de contenir le réchauffement global à moins de deux degrés.

L’Allemagne, la France et le Royaume-Uni doit conclure un accord qui convienne à tous les membres de l’Union européenne, en soutenant la Pologne et les autres pays du centre et de l’est de l’Europe dans leur sortie du charbon. Nous devons établir un terrain sur lequel l’ambition peut grandir, pas un plafond qui tuerait l’inspiration.

L’accord que conclueront cette semaine les leaders donnera le ton sur la façon dont le monde engagera les négociations pour réduire les émissions de gaz carbonique. Les vingt-huit leaders doivent faire du conseil de cette semaine le tremplin d’où l’Europe conduira le monde vers une situation plus propre. C’est le seul avenir qui ait du sens.

Tribune parue dans Reporterre et traduite par :
Camille Martin
Journaliste Reporterre

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