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Grand Débat : les alternatives à la voiture selon nos lecteurs

Le 12/02/2019 par Louise Bugier

Si les revendications des Gilets jaunes se sont élargies depuis le début du mouvement, c’est la hausse des prix du carburant qui a été le déclencheur de cette crise sociale. Alors que le Grand débat initié par le gouvernement d’Edouard Philippe a débuté le 15 janvier, la question de la mobilité reste donc au coeur de l’actualité.

Dans cet article publié le 23 janvier dernier, nous vous avions proposé de partager vos idées : Comment se déplacer demain ? Face à l’épuisement d’un modèle de société basé sur la voiture thermique individuelle, quelles alternatives ? Comment la moderniser ou même la remplacer ? 
 

Autoroutes cyclables, multimodal, parkings relais, vélomobile familiale… Vous avez été inventifs dans vos réponses ! Nous les compilons ici : découvrez votre vision de la mobilité de demain.

Le vélo

Comme on pouvait s’y attendre, le vélo est la solution qui revient le plus dans vos réponses !  La première urgence semble le développement des pistes cyclables. En effet, la France compte actuellement 52 000 kilomètres de pistes cyclables sur son territoire contre proportionnellement 6 fois plus aux Pays Bas.
 

Les autoroutes cyclables sont également un manque dans l’Héxagone. Ces pistes cyclables rapides, larges et dissociées du réseau routier permettent de plus longs trajets (autour d’une dizaine de kilomètres ou plus). Déjà très présentes en Europe du Nord, ces autoroutes arrivent en France : Paris a lancé en 2015 le plan Réseau Express Vélo qui doit voir aboutir en 2020 un réseau de voies cyclables express de 45 kilomètres, permettant de rallier le Nord au Sud et l’Est à l’Ouest de la capitale.
 

Si le développement des voies réservées semble évident, vos réponses reflètent également la progression du vélo électrique, projeté depuis quelques années sur le devant de la scène. En 10 ans, les ventes de vélo à assistance ont été multipliées par 25 et les aides à l’achat se multiplient. Après le fiasco des Vélib’ parisiens l’an dernier, vos réponses traduisent le besoin d’une plus grande disponibilité, voire d’une gratuité des vélos électriques en libre service.

Bref, après 150 ans d’existence, le vélo a encore de beaux jours devant lui !

Les transports en commun

Si les transports en commun reviennent dans nombre de vos réponses, le prix semble être le principal obstacle à leur usage quotidien. En France, le prix du ticket à l’unité varie entre 1,20 et 1,90 euros (à Lyon et Paris) mais avec les abonnements annuels, l’écart se creuse : 327 euros à Nice contre 827 euros pour le pass Navigo parisien.

Et pourquoi les transports publics ne seraient pas gratuits ? Une quinzaine de villes françaises de petite taille se sont déjà lancées. À Paris, la maire Anne Hidalgo avait un temps évoqué la gratuité des transports de la capitale, avant de la rejeter en janvier dernier. « La gratuité est un outil pour permettre de se déplacer mieux, de se libérer d’une voiture qui coûte très cher, a exposé la maire de Paris, Mais il ne faut pas oublier les autres leviers : l’amélioration de l’offre, de la qualité et du confort des transports publics. » 

Le développement du réseau dans les zones peu desservies est également une préoccupation importante. Selon un groupe de réflexion du BCG Henderson Institute, « en Île-de-France, en une heure de transports, les habitants des 10 % des zones les plus riches ont accès à trois fois plus d’emplois qualifiés que ceux des 50 % des zones les plus pauvres« . Une illustration des inégalités provoquées par les transports qui ne laisse pas indifférent. Du côté de la région Île-de-France, le développement de 133 projets de prolongement ou de création de lignes est en cours pour 2022, dont 1 nouvelle ligne de métro et 4 nouvelles lignes de tramway.

Concernant les améliorations des transports existants, vos réponses font mention des difficultés de mise en place du « multimodal » : l’utilisation de plusieurs modes de transport au cours d’un même trajet. La mise en place de systèmes capables d’accueillir les vélos dans les bus et métros permettrait de convaincre certaines personnes qui habitent à plus de 10 km de leur lieu de travail d’abandonner leur voiture. Dans la même veine, les parkings relais permettent aux automobilistes de stationner leur véhicules à l’entrée d’une ville ou d’un centre ville, et de continuer leur trajet en transports en commun ou à vélo.

Le train

Si la colère du mouvement des Gilets jaunes est partie de l’augmentation des prix du carburant, elle révèle la dépendance des Français à leur voiture, et ainsi l’absence d’alternative. Deux Français sur cinq vivent dans des zones non desservies par les transports publics. La réponse politique est faible : la ministre des transports souhaite un développement du covoiturage, moyen de transport peu adapté aux zones à faible densité démographique.
 
Vos réponses quant à elles, traduisent ce besoin d’alternatives crédibles : vous demandez une meilleure desserte ferroviaire des zones rurales isolées, notamment grâce à la rénovation des voies de chemin de fer désaffectées. De nombreux pays européens sont en avance sur la France dans ce secteur : l’Allemagne a rouvert 600 km de petites lignes et 300 gares en 20 ans. En Italie et en Autriche aussi des lignes de trains et de bus sont créées ou remises en service dans les zones rurales.

Dans les colonnes de Reporterre, Jean Sivardière, vice-président de la Fédération nationale des associations d’utilisateurs de transports, explique que « ces territoires peuvent être desservis à des coûts raisonnables par des trains ou des cars, avec une amplitude horaire et des fréquences élevées, des horaires adaptés aux déplacements domicile-travail et des tarifs attractifs. »
 

La voiture électrique

On vous avait récemment parlé du « rétrofit », cette pratique (encore illégale en France) qui consiste à convertir des voitures thermiques en véhicules électriques. Si ce dispositif n’apparaît pas dans vos réponses, la voiture électrique reste encore la solution la plus envisagée par les habitants des territoires ruraux. Faute d’alternative, à la campagne, 93 % des déplacements se font en voiture, contre 64 % en région parisienne. Et la voiture reste également un symbole de sécurité, d’autonomie, comme une seconde maison où l’on peut se détendre, écouter la radio et avoir son intimité.

Ainsi, vous êtes nombreux à souhaiter garder votre voiture tout en réduisant son impact écologique. Des aides existent pour l’acquisition d’un véhicule « propre » : bonus à l’achat, prime à la conversion, dispositifs régionaux ou même municipaux… Si les voitures électriques restent chères, les ventes ont augmenté de 43 % entre 2017 et 2018. Ce sont forcément les départements les plus riches de l’Héxagone qui comptent le plus de véhicules électriques : la Haute Savoie et les Yvelines sont en haut du classement tandis que la Seine Saint Denis et la Creuse plafonnent respectivement à 4 et 7 voitures électriques pour 10 000 habitants.

Mais les véhicules électriques sont souvent critiqués pour l’impact de leur production et de leur recharge (utilisation de l’énergie nucléaire, métaux rares contenus dans les batteries…). Quand on sait que le parc français compte 39 millions de véhicules qu’il faudrait remplacer, l’enjeu écologique est de taille. Alors la solution pourrait être dans l’auto-partage.

Si le service parisien Autolib’ a fermé en 2018 après 7 années déficitaires, de nouvelles autos en libre service envahissent désormais la capitale : Moov’inCar2Go, Free2Move, sans oublier les Totem à Montpellier ou les Bluely  lyonnaises. Les voitures en libre service dans les villes semblent ainsi être une solution crédible à un usage quotidien (et multimodal) de la voiture. Par ailleurs, les parkings relais reviennent dans vos réponses. Ces dispositifs multimodaux pourraient limiter l’usage de la voiture à certains tronçons qui manquent d’alternative.

La voiture à hydrogène

Avec des prix avoisinant les 70 000 euros, la voiture a hydrogène (comme la Hyundai Nexo) a de quoi rebuter les acheteurs. Mais si le secteur reste encore peu exploré, le carburant à hydrogène pourrait ouvrir de nombreuses perspectives pour des véhicules propres.

L’hydrogène est l’un des deux composants de l’eau (H2O) mais il n’existe presque pas à l’état pur sur Terre : il faut donc briser les mollécules d’eau pour l’extraire. Ainsi, c’est son extraction qui demande le plus de travail et d’énergie. Pour produire de l’hydrogène, nous avons donc pour le moment besoin d’énergies fossiles, ce qui rend son extraction très polluante.
 

Des solutions existent : pour qu’un véhicule à hydrogène ait du sens au niveau environnemental, il faut que l’énergie utilisée pour son extraction et sa compression soit décarbonnée (solaire, éolienne…) ! Pour le moment, 95 % de l’énergie utilisée pour produire de l’hydrogène est fossile. Malgré quelques expérimentations et opérations de communication de constructeurs automobiles, nous sommes donc encore très loin de la voiture à hydrogène pour tous.

Le vélomobile

Encore très peu connu du grand public, le vélomobile pourrait, selon vos réponses, être la solution écologique et pratique pour les courts déplacements. Ce vélo couché à trois roues est protégé par une carosserie légère qui le rend aérodynamique. Si pour l’instant son prix est plutôt élevé (compter entre 2 500 et 10 000 euros pour un véhicule une place), le développement du secteur pourrait permettre de baisser le coût grâce à l’utilisation de matériaux moins chers.

Ses avantages par rapport au vélo sont nombreux : protection du cycliste contre les intempéries et les accidents grâce à la carosserie, stabilité renforcée avec les trois roues, efforts minimisés grâce à la position couchée, compartiment pour les bagages… Si le vélomobile se développait, des véhicules à plusieurs places pourraient être imaginés, pour remplacer la voiture lors des trajets quotidiens en famille. Quant à la vitesse, les vélomobiles à assistance électrique arrivent sur le marché et permettraient de rouler entre 35 et 50 km/h. Certains modèles très performants pourraient même aller jusqu’à 140 km/h.
 

Selon Low Tech Magazine, environ un quart des éoliennes existantes suffiraient à alimenter autant de vélomobiles électriques qu’il y a d’humains. La preuve que l’on peut se passer de voiture !

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