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La viande favorise le cancer ? Selon un nutrithérapeute, le problème est bien plus grave

Par Jean-Paul Curtay, nutrithérapeute.

Le 27/10/2015 par WeDemain
Par Jean-Paul Curtay, nutrithérapeute.
Par Jean-Paul Curtay, nutrithérapeute.

Face au scandale suscité par les déclarations de l’OMS sur le lien entre consommation de viande et risque de cancer, le nutrithérapeute Jean-Paul Curtay fait le point sur l’état des connaissances scientifiques à ce sujet. Sa réponse ? Oui, la viande est source de cancer, mais aussi de nombreux autres maux.

Hier (NDLR : le 26 octobre), l’OMS déclarait la viande rouge cancérogène probable. Ce soir, dans l’émission Les Pouvoirs Extraordinaires du Corps Humain , avec Michel Cymes et Adriana Karembeu (ce mardi 27 octobre à 20h55 sur France 2), j’interviens sur ce sujet. Plutôt que de suivre des croyances, je préfère me référer aux études.

Les hominidés étaient chasseurs-cueilleurs, donc omnivores. On peut retracer les débuts de la domestication et de l’élevage des animaux à environ 10 000 ans. Mais pendant ces milliers d’années, l’homme consommait surtout des végétaux et un peu de poisson, de fruits de mer et de viande. Les associations couscous-pois chiches en Afrique du Nord, riz-soja en Asie, galettes de maïs-haricots rouges en Amérique, ont constitué la base alimentaire de la plupart des civilisations.

L’époque moderne, en industrialisant l’agriculture et l’élevage, a changé brutalement la donne à partir de la fin de la Deuxième Guerre mondiale en quelques dizaines d’années. Un occidental ne conçoit plus de ne pas manger de protéines animales à chaque repas. Et par ailleurs la qualité de ces viandes a changé.

Quelles conséquences sur la santé pour cette consommation accrue de viande ?

Au-delà des effets directs sur notre forme, notre longévité et nos risques de maladies, les quantités de viandes que nous consommons ont des impacts indirects sur l’environnement et la santé.

Les élevages industriels s’avèrent être des réservoirs d’agents infectieux à l’origine d’épidémies dangereuses comme les grippes aviaire ou porcine et produisent via l’abus d’antibiotiques, des bactéries antibio-résistantes responsables de plusieurs dizaines de milliers de décès chaque année en Europe.

Les rejets de lisier, de méthane, se répercutent sur la qualité de l’air et de l’eau, sur le réchauffement climatique (17 % des gaz à effet de serre ont pour source les élevages d’animaux). Les quantités phénoménales de végétaux, surtout du soja et du maïs OGM, utilisées pour ces élevages sont causes de déforestation et de contamination par les pesticides, en particulier le glyphosate (Round Up), récemment classé dans les carcinogènes, dont sont abondamment arrosés tous ces végétaux. Or, il n’est même pas obligatoire en Europe de signaler sur l’étiquetage que les viandes proviennent d’animaux nourris par des OGM. […]
 

Que disent les études ?

  •    La consommation de viande est un facteur de surpoids. À calories égales, elle augmente le risque de surpoids. La consommation de viande augmente aussi l’accumulation de graisse abdominale et le tour de taille, facteurs encore plus puissants de risque de diabète et de pathologies cardiovasculaires que le surpoids. […]
    •    La consommation de viandes est un facteur de risque de diabète. […]
    •    La consommation de viandes augmente aussi les complications du surpoids : dyslipidémie, diabète, hypertension. […] Un régime sans viande et réduit en graisses peut être considéré comme une base du traitement du diabète. […]
    •    La consommation de viandes est un facteur de risque de maladies cardiovasculaires. […]
    •    La consommation de viandes est un facteur de risque d’accident vasculaire cérébral. […]
    •    Les élevages intensifs sont un facteur majeur de risques infectieux incontrôlables. […]
Historiquement le rhume provient des chevaux, les grippes des canards, la rougeole du mouton, la typhoïde du poulet, la variole provient du chameau, la lèpre du buffle. […]

Aujourd’hui les préoccupations principales sont :
– les grippes aviaires et porcines
– les antiobiorésistances induites par l’usage abusif d’antibiotiques dans les élevages
– la présence d’un nombre considérable d’agents pathogènes dans les viandes consommées. […]
    •    Autres raisons de se calmer sur les protéines animales :
Les viandes contiennent beaucoup plus de polluants, en particulier liposolubles- dont les perturbateurs endocriniens – que les végétaux, y compris les retardateurs de flamme.

Au total, la plupart des agences de santé recommandent de réduire la consommation de viandes et de graisses saturées et d’augmenter  la consommation de végétaux variés. Et les députés français ont voté l’interdiction des phtalates et bisphénols A dans les emballages alimentaires. Malheureusement, toute une kyrielle d’autres perturbateurs restent présents dans les plastiques et la seule solution valide est l’interdiction totale du plastique pour tout aliment contenant des graisses. […]

À qui une consommation de viande peut être bénéfique ?

Le bilan est au total sans appel. Quelle est la quantité de viande à partir de laquelle des effets négatifs sur la santé se manifestent au long terme ? Entre une et deux fois par mois.

Mais il reste que – au-delà du spécisme et de l’anti-spécisme et du fait de s’autoriser pour des raisons affectives ou philosophiques ou pas de consommer des animaux -, des raisons hédonistes et nutritionnelles peuvent justifier une consommation de viandes.

Hédoniste, c’est se faire plaisir pour une occasion festive, donc exceptionnelle. Il s’agirait alors de classer la viande dans les aliments-plaisirs, les aliments-santé étant là pour être consommés chaque jour en quantités, les aliments-plaisirs, pour être dégustés en petite quantité, une fois par mois par exemple, la rareté participant d’ailleurs du plaisir. Ces viandes pour le plaisir seraient d’autant plus appréciées qu’elles sont de bonne qualité (quand on en mange beaucoup moins on peut se payer la meilleure qualité) et donc d’animaux non pas élevés stressés et immunodéprimés dans des camps de concentration, mais dans un milieu naturel le plus ouvert et libre possible, avec la meilleure alimentation possible. 

Les raisons nutritionnelles c’est non pas que – comme on nous l’a asséné pendant des décennies -, la viande, le poisson, l’œuf soient nécessaires comme protéine complète, car il y a des protéines végétales complètes comme le soja, le quinoa, l’amarante… et sinon il suffit d’associer un légume sec (cela va être l’Année Mondiale des Légumes Secs, lancée par l’ONU en 2016) avec une céréale – mieux semi-complète, encore mieux sans gluten, pour obtenir une protéine complète. […]

Donc, pour ces seules catégories : femmes enceintes, petits enfants, ados en poussée de croissance et femmes carencées, la consommation de viande est conseillable. Ceci dit, on n’est enceinte que 9 mois, les phases de croissance les plus intenses du petit enfant ne durent pas plus que les 2 premières années, celle de l’adolescent une année.

Et il est évidemment préférable de choisir les viandes :
– organiques (élevées avec des aliments sans pesticides,
– ayant évité les antibiotiques sauf cas de force majeure) ; 
-maigres
– pas retravaillées (charcuteries, industrie qui ajoute des additifs, du sel comme dans le jambon industriel)
– cuites a minima pour éviter les distorsions de Maillard qui produisent des carcinogènes – même le barbecue peut être fait
de manière intelligente : à distance des braises, rotatif, vertical ou avec une récupération des graisses fondues par de l’eau pour éviter la diésélisation de la viande par du benzopyrène.

A ce propos pourquoi nos gouvernants continuent-ils à autoriser la vente de barbecues hyper-toxiques, la viande d’un barbecue mal fait pouvant contenir l’équivalent toxique sur nos gènes (l’ADN) de 800 à 1 000 cigarettes, selon les travaux de Peter Moller de Stockholm ? Quelqu’un qui a, bien convivialement consommé au fond du jardin, 20 barbecues dans l’année aura fumé l’équivalent de 3 paquets de cigarettes par jour toute l’année ! A ce que je sache on n’autorise pas la vente de chauffe eaux qui larguent de l’oxyde de carbone…

Par contre certaines catégories, comme les hommes, qui n’ont pas de règles, les femmes après la ménopause, ont des besoins en fer très faibles et le rapport bénéfice/risque de la consommation de viande devient vite mauvais au dessus de une fois par mois. Le comble est que l’homme, qui a gardé dans son inconscient l’empreinte archaïque du chasseur, croit – dur comme fer –  que la viande rend fort.

En réalité, c’est l’homme qui paie le plus lourd tribu car la femme est protégée de l’excès de fer par les règles, tout en consommant moins de viandes. L’écart de longévité d’environ sept années entre l’homme et la femme, la précocité des décès cardiovasculaire, le fait qu’un homme sur trois meure d’un cancer alors que ce n’est qu’une femme sur quatre, tout cela est en grande partie dû aux surcharges en fer subies par le mangeur de viandes mâle. […]

Comment ajuster sa consommation en fonction de ses besoins ?

Les besoins en viandes devraient donc être surtout calibrés à partir de la situation des personnes (situations citées) et mieux d’un bilan du fer.

La consommation de viande pour une femme enceinte ou un enfant/ado en forte croissance : une fois par jour (l’autre du poisson ou une viande blanche), pour une femme qui a des règles abondantes trois fois par semaines, pour une femme ayant des règles (de la puberté à la ménopause) de une à deux fois par semaine, pour un homme ou une femme après la ménopause : une à deux fois par mois…  

Jean-Paul Curtay

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