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Primaire à droite : Sarkophiles, Sarkophobes, Sarkophages

CHRONIQUE. Par Gérard Mermet, sociologue, auteur, fondateur et directeur du cabinet d’études Francoscopie.

Le 29/08/2016 par WeDemain
CHRONIQUE. Par Gérard Mermet, sociologue, auteur, fondateur et directeur du cabinet d'études Francoscopie.
CHRONIQUE. Par Gérard Mermet, sociologue, auteur, fondateur et directeur du cabinet d'études Francoscopie.

L’entrée officielle de Nicolas Sarkozy en campagne, le 22 août, a été sans conteste une réussite médiatique. Le treizième candidat à la primaire de droite avait savamment orchestré la sortie de son livre en forme de déclaration d’amour à la France et aux Français (Tout pour la France, Plon).

Avec la complicité (consciente ou non) de tous les supports d’information, toujours prompts à relayer les propos et agissements du “bon client” (c’est-à-dire générateur d’audience, donc de revenus) qu’il représente à leurs yeux.

Plus d’amour inconditionnel

Mais les Français ne lui rendent manifestement pas (ou plus) cet amour inconditionnel. Un sondage BFMTV-Le Parisien/Odoxa-Dentsu réalisé les 25 et 26 août 2016, soit plusieurs jours après la nouvelle, indique que, sur les personnes qui pensent aller voter au premier tour de la primaire de la droite, 38 % devraient voter pour Alain Juppé, contre 24 % pour Nicolas Sarkozy.

Ils seraient suivis de Bruno Lemaire (15 %) et François Fillon (10 %). Dans l’hypothèse d’un second tour opposant Nicolas Sarkozy à Alain Juppé, l’ancien Premier ministre distancerait toujours l’ex-chef de l’État, avec 63 % d’intentions de vote contre 37 %.

Un rejet de personnalité

On note aussi dans ce sondage que c’est bien davantage la personne de Nicolas Sarkozy que les Français rejettent en majorité que ses idées et son programme. Ainsi, 72 % se disent favorables à sa proposition (inspirée ou reprise par d’autres candidats de droite) de placer en centre de rétention fermé ou sous surveillance électronique toutes les personnes fichées “S”, 62 % à la suspension du regroupement familial des travailleurs étrangers. 

Il faut cependant relativiser ces chiffres, en mentionnant un autre sondage (LCI-RTL-Le Figaro/TNS Sofres, réalisé du 22 au 25 août 2016.). Celui-ci indique qu’au premier tour de la primaire, Sarkozy et Juppé feraient jeu égal avec 34 % des intentions de vote, devant Bruno Le Maire (17 %,) et François Fillon (9 %). En cas de duel Juppé-Sarkozy au second tour, Juppé l’emporterait avec 55 % des voix contre 45 %.

Les sirènes de l’extrême-droite

L’écart important entre ces deux enquêtes effectuées pratiquement aux mêmes dates s’explique essentiellement par le critère adopté pour quantifier les “électeurs de la primaire de droite”. Le premier sondage retient tous ceux qui “pensent” aller voter lors de cette primaire, soit 29 % de la population adulte, ce qui est considérable.

Le second ne prend en considération que ceux qui se disent “certains” de se rendre dans les bureaux de vote les 20 et 27 novembre prochains (7 % seulement des électeurs, par principe plus proches du parti des Républicains).

Il reste trois mois aux candidats avant la tenue des primaires et des retournements peuvent bien sûr se produire, qui permettront aux médias d’entretenir le feuilleton et de garder leurs publics en haleine. Sarkozy fera tout pour reconquérir ceux qui ne croient plus en lui, ou qui sont attirés par les sirènes de l’extrême-droite, laquelle va aussi tenter de peser sur la primaire.

Les Sarkophobes de droite

De son côté, Alain Juppé pourra s’adresser aux “Sarkophobes” de droite, qui constitueront une bonne part de sa “clientèle” (avec les déçus de la gauche modérée). Il pourra aussi s’appuyer sur les plus radicaux de ces Sarkophobes, que l’on pourrait baptiser “Sarkophages”. Un néologisme qui renvoie à deux sens possibles. Étymologique, d’abord : ceux qui voudront voter pour le candidat de droite le plus capable à leurs yeux de “cannibaliser” l’ancien président (de le “dévorer”, symboliquement).

Mais aussi, phonétiquement, ceux qui souhaitent en être les “fossoyeurs”, tout en lui offrant une sépulture digne de sa grandeur passée (le sarcophage apparu avec les Pharaons). On voit mal en effet comment Nicolas Sarkozy pourrait se remettre politiquement d’une nouvelle défaite, surtout infligée par son propre camp.

Ne pas enterrer Sarkozy trop vite ?

Mais il disposerait alors de tout son temps pour se consacrer à sa famille et à sa passion du jogging, tout en donnant des conférences excellemment rémunérées qui viendraient grossir son patrimoine. Et en assurant sa défense dans les dossiers dans lesquels son nom est mentionné.

Mais il ne faudrait pas “enterrer” Sarkozy trop vite. Outre son énergie et sa confiance en lui, il disposera pour la primaire des forces et des moyens logistiques du parti qu’il dirigeait depuis deux ans et d’un réseau de soutiens qui tenteront d’éliminer le trublion centriste que représente à leurs yeux Alain Juppé. Tout se jouera en tout cas sur le nombre de Français qui iront voter à cette primaire.

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