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Voici comment les villes peuvent stopper le gaspillage alimentaire

En 2015, l’Assemblée générale de l’ONU fixait dix Objectifs de Développement Durable, qui prévoyaient entre autres de réduire de moitié la quantité d’aliments gaspillés d’ici 2030, à la fois par les acteurs de la distribution et les consommateurs.

Pourtant, alors que le cinquième anniversaire de ce plan stratégique approche, les gouvernements ne se sont toujours pas appropriés ces objectifs.

S’ils passaient à l’action, les pays ayant signé ces objectifs pourraient pourtant impacter près de la moitié de la population mondiale. Malheureusement, peu d’entre eux ont mis en place des mesures concrètes : seulement 15 % de la population mondiale vit dans un pays qui mesure ses déchets et ses pertes alimentaires, et seulement 12 % dans un pays ayant adopté des mesures pérennes. La France reste donc une exception, ayant été la première à adopter une loi contre le gaspillage alimentaire, la Loi Garot en 2016. Mais ces initiatives nationales ne suffiront pas à atteindre ces objectifs.
 

À lire aussi : Gaspillage alimentaire : un combat à l’aveugle ?

Alors, que faire ?

Réduire le gaspillage alimentaire n’est pas simple : tous les acteurs de la chaîne alimentaire en sont responsables à leur niveau, et ils ont chacun des défis spécifiques. Par exemple, une solution miracle qui réduirait le gaspillage alimentaire dans les cantines ne serait sûrement pas pertinente pour favoriser le compostage dans les foyers. Et le manque de solutions locales rend le problème encore plus complexe.

Les villes et les communes ont donc un rôle majeur à jouer. Elles sont les seules à avoir les infrastructures, les compétences locales et les relations pour réduire efficacement le gaspillage alimentaire. Il s’agit avant tout d’identifier où et comment sont produits les déchets alimentaires, et donc de mettre en place des mesures beaucoup plus ciblées,  pour accélérer les avancées en matière de lutte contre le gaspillage alimentaire.

Elles doivent également prendre en compte une pression supplémentaire : l’accord de Paris de 2015 leur impose de réduire leurs émissions de gaz à effet de serre de 40 %, voire 55 % en fonction de la décision que prendra l’UE, d’ici la fin de l’année. La réduction des déchets et du gaspillage alimentaires est le meilleur moyen d’y parvenir.

Nous ne pouvons pas laisser passer cette opportunité. Les villes, en plus d’être les mieux placées pour lutter contre le gaspillage alimentaire, en sont aussi en grande partie responsables. Elles produisent plus de 60 % des émissions de gaz à effet de serre, alors qu’elles représentent moins de 2 % de la surface de la Terre.

Et ça ne fera qu’empirer ! D’ici 2050, deux-tiers d’entre nous vivront en ville. Alors, pour avoir une chance d’atteindre ces objectifs de 2030, il est essentiel que les villes commencent à jouer un rôle beaucoup plus important dans la lutte contre le gaspillage alimentaire.
 

C’est un véritable défi, que nous pouvons relever ! Certaines villes ont déjà commencé à le faire.

Paris par exemple, souhaite réduire de moitié ses déchets alimentaires d’ici 2025. Cette dernière, comme plus de 40 autres villes françaises, est par ailleurs signataire de la Charte #MaVilleAntiGaspi, une initiative de Too Good To Go visant à mettre la lutte contre le gaspillage alimentaire au cœur des problématiques des communes.

À Milan, les efforts de réduction du gaspillage de nourriture concernent tout le monde, et les écoles de la ville distribuent des doggy bags aux élèves pour éviter que les repas à moitié terminés ne soient jetés à la poubelle. À ce jour, plus de 31 000 doggy bags ont été distribués par 85 écoles, et un quart des écoles de Milan sont désormais partenaires de programmes de dons de nourriture.

Comment mettre en place une action nationale

Mais les initiatives isolées tout comme les efforts individuels ont atteint leur limite. Pour nous aider à gagner la bataille contre le gaspillage alimentaire, nous devons tirer les leçons de Paris, de Milan et de toutes les initiatives locales, afin de les transformer en une stratégie réplicable partout.

Pour fonctionner, elle devra s’articuler autour de quatre principes fondamentaux :
1)   La séparation des déchets alimentaires et non alimentaires dans les poubelles
2)   La mesure et le suivi de qui gaspille et quoi
3)   La redistribution des surplus de nourriture, à travers l’une des solutions existantes et fonctionnelles
4)   La transformation des aliments non consommés en énergie, en carburant ou en nourriture pour les animaux

Le temps presse si nous voulons atteindre ces objectifs de 2030. La pandémie mondiale a fait du système alimentaire un sujet central de notre société, et nous a contraint à nous interroger sur notre rapport à l’alimentation. Il est temps que les maires et les municipalités s’emparent du sujet. Ils doivent, dès aujourd’hui, fixer des objectifs concrets, en travaillant main dans la main avec l’ensemble des acteurs concernés, pour que les « villes zéro gaspillage alimentaire » deviennent enfin une réalité.

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