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« 1 euro la maison ! » Ces villes qui bradent l’immobilier pour ne pas mourir

Pour repeupler ses quartiers déshérités, la ville de Roubaix envisage de racheter des logements vides, puis de les mettre en vente pour un euro symbolique. Cette formule, qui engage les acquéreurs à des rénovations, a déjà été menée en Angleterre et en Italie. Avec des résultats mitigés.

Le 17/07/2015 par WeDemain
Pour repeupler ses quartiers déshérités, la ville de Roubaix envisage de racheter des logements vides, puis de les mettre en vente pour un euro symbolique. Cette formule, qui engage les acquéreurs à des rénovations, a déjà été menée en Angleterre et en Italie. Avec des résultats mitigés.
Pour repeupler ses quartiers déshérités, la ville de Roubaix envisage de racheter des logements vides, puis de les mettre en vente pour un euro symbolique. Cette formule, qui engage les acquéreurs à des rénovations, a déjà été menée en Angleterre et en Italie. Avec des résultats mitigés.

À Roubaix, 95 000 habitants, certains quartiers ont des airs fantomatiques. Et pour cause : selon La Voix du Nord, dans cette ville du Nord-Pas-de-Calais fortement touchée par le chômage, 4 094 logements sont vacants, dont 2 500 sont murés. Parmi ces derniers, des ensembles entiers de corons, maisons caractéristiques de l’époque minière.

Pour pallier cette désertification et redonner vie aux quartiers délaissés, le maire de Roubaix Guillaume Delbar (Les Républicains) a annoncé mi-juillet le lancement d’un projet inédit en France : racheter les habitations inoccupées, dans le but de les revendre à des particuliers pour la somme modique… d’un euro. En contrepartie, les acquéreurs devront financer leur rénovation.

Si ce projet est une première en France, il a déjà été conduit dans d’autres villes d’Europe. Notamment à Liverpool, dont s’est inspirée Roubaix. En septembre, l’adjointe roubaisienne chargée du logement se rendra dans la ville britannique pour étudier le dispositif.

À Liverpool, un 4-pièces pour une livre sterling

Fin 2013, Jayalal Madde, un chauffeur de taxi de cette agglomération au passé industriel, découvre une annonce dans un journal local : des habitations seraient en vente pour une livre sterling (l’équivalent de 1,30 euro). Croyant à un canular, il appelle derechef la mairie, qui lui confirme l’information. Aujourd’hui, il est propriétaire d’un quatre-pièces, qu’il a rénové lui même, grâce à un emprunt de 50 000 euros et à son épargne.

Les consignes de la ville de Liverpool sont claires : pour assurer la pérennité de ce projet de repeuplement, les habitants doivent être en mesure de financer les travaux des logements acquis à coût dérisoire. Et les habiter au minimum cinq ans.

Pour l’heure, une vingtaine de maisons « à une livre » ont été vendues. La municipalité liverpuldienne se targue de « permettre aux habitants à revenus modestes de devenir propriétaires », tout en « favorisant la requalification de certains quartiers ». Même si, pour certains riverains, il aurait été plus utile d’investir dans d’autres projets, comme la construction de logements sociaux.
 

Gangi, la gratuité comme argument

Plus récemment, en 2014, une petite commune sicilienne a elle aussi tenté l’expérience. Perché à 1 010 mètres d’altitude, le village médiéval de Gangi met alors en vente des habitations vétustes, pour un euro symbolique. En juin dernier, face à l’absence de candidats, la municipalité a décidé de reformuler son offre, afin de relancer l’intérêt d’éventuels acquéreurs. Les maisons seront cédées gratuitement : « Nous informons les Italiens et les citoyens de l’Union Européenne que dans la ville Gangi, de vieilles maisons seront concédées sans aucune charge pour ceux qui les demandent. »

Comme à Liverpool, c’est la désertification qui a poussé la mairie à opter pour cette solution. Peuplée de 15 000 habitants en 1950, Gangi n’en compte aujourd’hui plus que 7 000. Outre cet exode rural, le maire du village, Giuseppe Ferrarello, invoque la situation géographique du village, « trop éloigné de la mer pour attirer les touristes ».

Les acquéreurs des maisons cédées par la mairie, qu’ils soient des groupes hôteliers ou des particuliers, devront s’engager à rénover intégralement les demeures en quatre ans maximum. Des chantiers qui pourraient s’avérer coûteux à mener dans ces délais : certaines propriétés sont à l’abandon depuis plusieurs générations.

Salemi, le village précurseur

Toujours en Sicile, à 60 km de Palerme, la petite ville de Salemi, 10 000 habitants, a été la première à lancer une telle opération. En 1968, suite à un tremblement de terre, la commune voit débuter son dépeuplement.

En 2008, Victor Sgarbi, le maire de Salemi, décrit comme un utopiste libéral, veut donner un second souffle à cette « cité délabrée ». Son plan : restructurer le centre-ville, fonder un « musée du crime » pour lutter contre la mafia locale, et surtout, racheter des habitations inoccupées pour les brader à un euro, avant que leurs nouveaux propriétaires ne les rénovent dans un délai maximum de deux ans.

Mais, à ce jour, si de nombreux particuliers se sont montrés intéressés, aucune des maisons n’a été vendue. Une impasse qui s’expliquerait, selon le site italien Lettera 43, par des pressions mafieuses.

Carrega Ligure assouplit le système

Sur le site Internet de la ville de Carrega Ligure, dans le Piémont, on trouve depuis 2010 une rubrique intitulée « Casa ad 1 euro ». Mais l’opération s’est soldée par un échec, que la municipalité justifie par deux « difficultés insurmontables » : des problèmes de cadastre et surtout l’impossibilité de retrouver les descendants des propriétaires des maisons abandonnées.

Le projet, depuis, est réapparu dans une version plus souple. Sur son site, la mairie indique désormais vouloir jouer le rôle « d’intermédiaire entre des futurs acquéreurs et des propriétaires voulant se débarrasser de leur bien ». Mais « pas nécessairement pour un euro », précise la municipalité, qui a créé une case1euro@comunecarregaligure.eucase1euro à destination des intéressés. 

Clara Potier
Journaliste à We Demain
@ClaraPotier

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