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Au Népal, une nouvelle génération transforme la société village par village

RÉCIT. Par Anne-Sophie Roux, porteuse du projet Wānanga Trek.

Le 12/07/2017 par WeDemain
Vulnérabilités du Népal face au changement climatique, « Cartographie des Hotspots Démographiques et du Changement Climatique: Népal » (Crédit : Population Action International)
Vulnérabilités du Népal face au changement climatique, « Cartographie des Hotspots Démographiques et du Changement Climatique: Népal » (Crédit : Population Action International)

De Nouvelle-Zélande au Bhoutan, du Pacifique à l’Himalaya, le Wānanga Trek est un reportage solidaire mené par Anne Sophie, étudiante en sciences politiques de 21 ans. Chaque mois, elle racontera ses aventures à We Demain.

L’Himalaya compte parmi les régions les plus gravement touchées par le changement climatique. La fonte accélérée des glaciers affecte les plus hauts sommets du monde ; et par conséquent les populations qui vivent en aval, du Népal jusqu’au Bangladesh.

Selon un rapport publié par le National Adaptation Program of Action en 2010, sur les 75 provinces du Népal, 29 sont extrêmement vulnérables aux catastrophes naturelles, 22 à la sécheresse, 12 aux inondations provoquées par les lacs glaciaires et 9 aux inondations en général.

Pour régler ces problèmes en amont, une jeune génération du changement voit le jour, comme dans beaucoup d’autres pays situés en première ligne des changements climatiques. Au cours de notre Trek des Alternatives, nous sommes partis à sa rencontre avec Himalayan Climate Initiative, une ONG qui encadre les jeunes en leur donnant des moyens d’action pour construire leur futur de façon plus durable et inclusive.

L’Himalaya : l’une des régions les plus vulnérables au monde

L’une des conséquences les plus visibles du réchauffement climatique au Népal est l’apparition de lacs glaciaires, due à la fonte des glaces. Plus ces lacs grandissent, plus ils risquent de se briser et d’inonder les vallées situées en dessous — ce que les scientifiques appellent le Glacial Lake Outburst Floods (GLOF) —, et ces cas ne sont malheureusement pas rares.

Le réchauffement global produit également des changements dans les saisons : la mousson, donc les pluies et évènements climatiques violents, inondations, glissements de terrain et coulées de boue, se font plus fréquents et plus intenses durant la saison humide. Pendant la saison sèche c’est surtout le manque d’eau, qui pose de plus en plus de problèmes. Il affecte l’agriculture, les ménages, les économies locales et entraîne la diffusion de maladies.

Or le Népal, ainsi que l’ensemble Himalayen, est une région majoritairement agricole. Les effets de ces variations de climats, de températures et de pluies, touchent donc très durement les communautés qui dépendent de leurs récoltes ; allant parfois jusqu’à des états de famines dans certains endroits.

Une nouvelle génération du changement construit un Népal durable et inclusif

Face à ces phénomènes, l’adaptation aux changements climatiques est une priorité au Népal. Bien que le développement des énergies renouvelables, par exemple, soit assez impressionnant, la transition prend beaucoup de temps.

Pour cette raison, un grand nombre de jeunes, venant de Katmandou ou d’autres régions du pays, développent un projet inspirant et porteur de changement. Ils ont entre quinze et vingt-cinq ans, et font la différence de diverses manières :

L’Himalayan Climate Initiative (HCI) accompagne des jeunes Népalais à créer leur association, leur mouvement ou leur entreprise sociale, répondant à un ou plusieurs enjeux sociétaux et environnementaux. L’association chapeaute ainsi plus d’une vingtaine d’entreprises sociales et mouvements crées par les plus jeunes membres de la société civile népalaise.

Avec Resilient Homes, ils construisent des habitations résistantes aux inondations et aux tremblements de terre avec des matériaux recyclés dans plusieurs endroits vulnérables du pays.

Grâce à leur mouvement « No Thanks I Carry My Own Bag », ils ont réussi à faire interdire les sacs plastiques à usage unique dans la capitale du pays, et travaillent pour étendre cette interdiction à l’ensemble du pays.

Avec Climate Alliance of Himalayan Communities, ils créent des systèmes de gouvernance nouveaux pour rendre leur voix aux peuples himalayens, souvent oubliés lors des discussions sur le changement climatique alors qu’ils sont les premiers à en pâtir.

Kagati, un village transformé en modèle de transition

À environ une heure dans les montagnes du Nord de Katmandou, Kagati est un petit village faisant selon nous figure de modèle des initiatives portées par les jeunes de HCI.

Niché au cœur des rizières et d’une région pauvre du pays, le village de Kagati est bien connu ici pour une raison : il présente historiquement des taux records de mariages d’enfants, de polygamie et d’inégalités.

Pourtant, il dispose naturellement de beaucoup de ressources naturelles comme une source d’eau potable stable, ce qui est précieux dans un pays comme le Népal.

Les jeunes équipes des Green Angels (Hamri Bahini en népalais) ont commencé il y a deux ans à s’y rendre bénévolement et régulièrement pour en faire un village éco-responsable.  

Après avoir équipé les maisons et l’école de panneaux solaires, les jeunes volontaires organisent des workshops toutes les semaines pour sensibiliser les habitants, et notamment les femmes, au gaspillage d’énergie, à l’hygiène, à l’usage de l’eau et des ressources naturelles, au recyclage des déchets, mais aussi à l’usage de produits respectueux de l’environnement pour l’entretien des maisons.

Parallèlement, ils créent des emplois durables et donnent également des cours toutes les semaines à l’école primaire, où ils sensibilisent les enfants aux enjeux environnementaux et sociétaux.

L’objectif est de faire du village de Kagati une communauté éco-responsable, zéro déchets et modèle dans la transition des sociétés ; notamment par le biais de l’empowerment des femmes, qui, bien que marginalisées, sont ici les actrices du changement.

Kagati est l’un des nombreux villages où ces jeunes créent des rouages de transition durable. C’est un exemple parmi d’autres de l’efficacité de leurs actions à l’échelle locale où, village par village, ils créent une dynamique inspirante de changement.
 
Ces jeunes, pour la plupart encore au lycée, sont les premiers témoins des changements climatiques. Ils sont conscients d’être la dernière génération à pouvoir changer les choses, et consacrent tout leur temps à construire leur futur, de façon durable et inclusive.

Si vous souhaitez en savoir plus sur les projets, les initiatives et les personnes qui font vivre les communautés rencontrées par Anne Sophie Roux, rendez-vous sur le blog de Wanangatrek.com

À (RE)LIRE : Le premier récit d’Anne-Sophie Roux : « Nos démocraties en panne d’idéaux devraient s’inspirer de la solidarité des Philippins « 

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