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Impact Journalism Day : des “solutions concrètes” pour 120 millions de lecteurs

INTERVIEW. Le 20 juin, l’entreprise sociale Sparknews s’associe à 45 journaux du monde entier pour diffuser des articles porteurs de solutions au plus grand nombre. À l’origine de cette initiative, Christian de Boisredon explique à We Demain comment il entend ainsi “changer le monde”.

Le 10/06/2015 par WeDemain
INTERVIEW. Le 20 juin, l'entreprise sociale Sparknews s'associe à 45 journaux du monde entier pour diffuser des articles porteurs de solutions au plus grand nombre. À l'origine de cette initiative, Christian de Boisredon explique à We Demain comment il entend ainsi "changer le monde".
INTERVIEW. Le 20 juin, l'entreprise sociale Sparknews s'associe à 45 journaux du monde entier pour diffuser des articles porteurs de solutions au plus grand nombre. À l'origine de cette initiative, Christian de Boisredon explique à We Demain comment il entend ainsi "changer le monde".

“Dans les médias, on annonce les trains qui arrivent en retard, rarement ceux qui sont en avance. L’idée peut sembler éculée, pourtant c’est pour nous une belle façon d’exprimer le ras-le-bol des lecteurs face à la sinistrose ambiante véhiculée par les journaux traditionnels”.

Le fondateur de l’entreprise sociale Sparknews, Christian de Boisredon, en est persuadé : c’est en partageant davantage les innovations sociales que, petit à petit, “nous parviendrons à changer le monde”.
 
C’est à ce titre qu’il a créé l’Impact Journalism Day, dont la troisième édition a lieu le 20 juin 2015. Ce jour-là, plus de 45 rédactions du monde entier s’engagent à publier des sujets plus “positifs”. Des initiatives qui, partout dans le monde, tentent d’améliorer le quotidien. Entretien.

We Demain : Comment l’Impact Journalism Day parvient-il à toucher 120 millions de lecteurs ?
 
Christian de Boisredon : Nous avons invité plus de 45 rédactions à travers le monde à participer à cette journée, lors de laquelle elles s’engagent à publier huit pages, en moyenne, dédiées aux projets positifs, c’est-à-dire des innovations sociales ou entreprises environnementales peu relayées dans les médias habituellement. Chaque journal s’engage à rédiger deux articles, de 800 et 200 mots à chaque fois, après avoir rencontré les protagonistes sur le terrain. En plus, la vingtaine de pigistes contactés par Sparknews fait de même. Au total, nous disposons donc d’une centaine d’articles, traduits en anglais, français et espagnol et mis à disposition des rédactions partenaires.
 
Qui participe ?
 
En France, après Le Monde l’an dernier, c’est Le Figaro qui prend le relai cette année. À l’international, nous comptons par exemple parmi nous USA Today aux États-Unis, Times of India en Inde, le China Daily en Chine, Le Soir en Belgique, La Tribune de Genève et le Tages Anzeiger en Suisse, le Sunday Times en Angleterre ou La Nación en Argentine. Mais d’autres titres moins connus participent également : El Heraldo au Honduras, L’Orient-Le Jour au Liban, Fraternité Matin en Côte d’Ivoire, la Nation au Nigéria, Le Journal d’Angola en Angola… La liste est longue ! Les seuls qui, cette année, manquent à l’appel, sont les journaux d’Allemagne, d’Italie et d’Espagne, pour qui les délais étaient trop courts. Nous espérons les retrouver l’an prochain.

Quel type de sujets pourra-t-on découvrir dans ces journaux le 20 juin ?
 
Vous pourrez par exemple découvrir comment au Paraguay, dans la ville de Cateura, les enfants ont créé un orchestre philarmonique pour se sortir de la misère. La particularité, c’est que leurs instruments sont fabriqués à partir de matériaux recyclés, dont le son est d’une qualité étonnante. Vous pourrez aussi lire l’histoire de l’entreprise sociale Apopo, en Tanzanie, dont la spécialité est de dresser des rats pour détecter les mines. Grâce à eux, plus de 49 000 d’entre elles ont été neutralisées ! On partira aussi à la découverte d’inventions low tech dans le monde entier, grâce à Nomades des mers , un catamaran-laboratoire.
 
Concrètement, qui souhaitez-vous atteindre ?
 
120 millions lecteurs pour commencer ! Il s’agit là de la somme du lectorat de tous les journaux participants. L’idée est de rallier, en plus, des lecteurs supplémentaires. L’an dernier, la rédaction du Tages Anzeiger suisse nous indiquait qu’elle avait très rarement eu autant de retours positifs et un chiffre aussi élevé de ventes que lors de sa participation à l’Impact Journalism Day. C’est d’ailleurs grâce à un succès similaire qu’est née cette journée : alors que le 26 décembre 2008, nous expérimentions l’idée pour la première fois avec Libération, cela a provoqué la meilleure vente de l’année pour le journal. Contre toute attente !

Comment expliquer un tel succès ?
 

Les gens en ont assez de lire des nouvelles négatives. Il en faut, c’est là la première mission du journalisme – relayer les injustices, alerter sur les dérives. Mais souvent, il manque un second impact, provoqué par les médias lorsqu’ils montrent les solutions existantes face à ces problèmes. Les citoyens ont besoin d’être inspirés, de connaître des moyens d’agir dans un nouveau monde pourtant bel et bien en marche. Il s’agit là d’une réelle attente de la part des lecteurs de la presse quotidienne, que les ventes et les retours positifs ne font que confirmer.
 
Comme We Demain, certains magazines tentent pourtant déjà de montrer ces solutions.
 
Bien sûr ! Et heureusement. Mais, à part le quotidien The Guardian, qui s’est récemment officiellement engagé contre les énergies fossiles, ou encore le Huffington Post américain qui a créé ses rubriques “good news” et “impact”, il s’agit de magazines spécialisés, qui, la plupart du temps, s’adressent à un public averti. Notre idée à nous, c’est de toucher un lectorat peu sensible à ces problématiques à la base, un lectorat qui ne va pas être proactif et chercher des solutions si on ne l’y sensibilise pas. Avec l’Impact Journalism Day, nous aidons les médias traditionnels à “switcher” vers ces sujets. Ces derniers sont conscients des attentes des lecteurs, mais ne savent pas forcément comment y répondre : notre but est de pallier ce manque. Et de montrer aux rédactions des grands journaux en crise qu’elles passent souvent à côté d’histoires intéressantes.
 

Quel est l’impact pour les entrepreneurs sociaux dont il est question dans ces articles ?
 
Nous avons mené une étude au sein de Sparknews, qui a pris fin il y a deux mois. Les résultats parlent d’eux mêmes : sur les 80 porteurs de projet interrogés, 90 % d’entre eux ont ressenti un impact direct ou indirect suite à la parution des articles de l’Impact Journalism Day. Indirectement, quand ils ont été contactés par des habitants ou entrepreneurs d’autres pays, qui ont pris connaissance de leur projet dans leur journal local. Directement, lorsqu’ils ont obtenu des financements et des demandes de partenariat ou d’emploi, ou que d’autres ont répliqué leurs projets. L’idée, à terme, est que ces projets essaiment autant que possible, et que, partout sur le globe, des particuliers se mettent à imaginer et mettre en place des solutions à leur tour.
 
C’est la troisième édition de l’Impact Journalism Day, qui s’est associé à dix rédactions de plus qu’en 2014. Qu’attendez-vous de ce cru ?

Nous voulons tout simplement changer le monde. Lorsque j’ai écrit mon roman best-seller, L’espérance autour du monde, je me suis rendu compte que ces thématiques intéressaient les gens. Avec les médias, notre force de frappe est beaucoup plus puissante. Eux profitent d’une visibilité et de la fierté de participer à une opération mondiale inédite. Et nous, nous savons que même si un journaliste n’a pas forcément conscience de l’impact de son article, il suffit que dix personnes s’en inspirent pour que dans dix ans, des systèmes révolutionnaires émergent. L’exemple le plus fort est celui de Muhammed Yunus, l’entrepreneur bangladais qui a réussi à créer 100 000 emplois avec sa banque de micro-crédit. Avec l’Impact Journalism Day, nous espérons que les lecteurs deviennent des Yunus en puissance.

Propos recueillis par Lara Charmeil
Journaliste à We Demain
@LaraCharmeil
 

  
 
 
 

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