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Route du Rhum 2018 : une course en solidaire

Pour son 40ème anniversaire et sa 11ème édition, la Route du Rhum compte un nombre record de skippers solidaires ! Lutte contre le sida, le réchauffement climatique… les sponsors s’effacent au profit des projets portés par les coureurs.

Le 09/11/2018 par Paola De Rohan-Csermak
Cette année, la Route du Rhum est une course engagée (Crédits FaceOcéan)
Cette année, la Route du Rhum est une course engagée (Crédits FaceOcéan)

123 skippers ont pris le départ de la Route du Rhum dimanche 4 novembre à Saint-Malo, pour rejoindre Pointe-À-Pitre (Guadeloupe). Un nombre record pour cette course en solitaire. Une multitude de coques fendant l’écume, se frôlant puis se distançant dans des échappées parfois prodigieuses. Sur les voiles gigantesques de certains IMOCA, ces engins de 18 mètres montés sur foils qui s’arrachent de l’eau pour voler, on retrouve le panda de WWF, le logo rouge de AIDES, ou encore les slogans Time for Oceans, 4MyPlanet

« Jamais vu autant de causes partir avec des bateaux de courses », a commenté le régatier Jean-Guillem Destremau, venu assister au départ de son frère Sébastien, sur Alcatrazit-FaceOcean. « Il y a un changement de mentalité qui se voit « , déclarait Eric Jail, coureur amateur depuis 30 ans, au micro de Fréquence Terre, avant d’appareiller.

« Quitte à porter des couleurs, autant que ça serve à quelque chose »

En 2018, un tiers des bâteaux sont engagés (Crédits DR)

En cette 11ème édition de la Route du Rhum, un tiers des skippers mène une course dans la course, leurs voiles aux couleurs de leur engagement personnel. Lors de la compétition précédente, en 2014, moins d’un quart des 91 concurrents « naviguait utile », « par solidarité avec ceux qui luttent au quotidien » lit-on sur différents sites, à l’exemple d’Erik Nigon, qui barre Vers un Monde sans Sida depuis 14 ans.

« Quitte à porter des couleurs, autant que ça serve à quelque chose », explique Loïck Peyron, vainqueur de la dernière Route du Rhum et détenteur du record sur Banque Populaire VII. Dimanche, il arborait une voile Action Enfance. Vincent Riou, vainqueur d’un Vendée Globe et d’une Transat Jacques Vabre, s’engage également pour la première fois, comme ambassadeur de WWF. Les plus grands ne sont pas seuls à se mouiller. Eric Jail soutient désormais l’association Longitude 181, pour la préservation de l’écosystème marin, avec son monocoque La Voix de l’Océan. Il y a quatre ans, il avait dû abandonner la course à 27 km de l’arrivée, son bateau bloqué par des algues brunes, les sargasses : « une conséquence du réchauffement climatique. Il est urgent de préserver l’océan des intérêts privés au profit du bien commun », alerte-t-il.

Une aide concrète La course, c’est « une façon symbolique de s’élancer vers ce monde espéré, mais aussi de le concrétiser », explique Erik Nigon : « à chaque mille parcouru, la fondation AXA Atout cœur versera un euro à AIDES ». Pour chaque kilomètre avalé par 1 Rhum 4 You, skippé par Nicolas Magnan, 1000 m2 de forêt amazonienne seront préservés, promet la start-up Zei. Le sponsoring indirect devrait bénéficier de la médiatisation du 40ème anniversaire de la course, toujours plus suivie (2,2 millions de spectateurs à Saint Malo pour le départ, en 2014).

« Naviguer responsable » devient le credo des coureurs. Ils se sont tous engagés à une gestion rigoureuse des déchets en mer, comme à terre. De plus en plus de bateaux sont équipés de panneaux solaires et de turbines hydro-génératrices. Le bateau de l’Italien Andrea Fantini, Enel Green Power, carbure à 100% aux énergies propres ; plus encore, c’est un véritable laboratoire expérimental flottant, qui, en temps réel, envoie aux techniciens à terre ses données de production et de consommation énergétiques, pour évaluer et optimiser les solutions.

Le FaceOcéan, bateau du skipper Sébastien Destremau (Crédits FaceOcéan)

Quant à Romain Pilliard, il vise le podium dans la catégorie reine – les Ultimes – sur Remade-Use It Again, un maxi-trimaran issu de l’économie circulaire. Des artisans spécialisés ont entièrement démonté, puis remonté son bateau qui n’avait pas couru depuis 7 ans, remplaçant les pièces défectueuses par des matériaux recyclés, en tenant compte des contraintes techniques et de sécurité.

Une solidarité à double sens

Le mental des skippers tire sa force aussi de cet engagement. « C’est une motivation supplémentaire d’être solidaire d’une cause », explique Fabrice Payen, équipé d’une prothèse de jambe. Lui, porte les couleurs de l’association Premiers de Cordées, pour soutenir les enfants hospitalisés et en situation de handicap. Et de la motivation il en faut, pour traverser le Golfe de Gascogne en automne, comme en témoignent les concurrents dans les vidéos, postées jeudi 8 novembre sur le site de la Route du Rhum.

Le skipper Fabrice Payen soutient l’association Premiers de cordée (Crédits Mille et une Vagues)

« Pas simple, l’histoire, c’est le moins qu’on puisse dire ! » résume Kito de Pavant qui, a passé la nuit à affronter des creux de 8 mètres et des rafales allant jusqu’à 55 nœuds : la force d’un ouragan ou presque. « Encore une nuit et une troisième dépression à venir…  » s’inquiète Miranda Merron sur Campagne de France, obligée de porter un casque pour protéger sa tête des chocs. Ce vendredi matin, la majorité des concurrents n’avait pas dépassé Lisbonne et les Açores, pour enfin bénéficier d’une météo plus clémente.

Malgré ces conditions extrêmes, 4 skippers seulement avaient officiellement abandonné la course jeudi soir. À cette date, sur les podiums de chaque catégorie, sont pressentis des skippers solidaires.

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