Partager la publication "VIDÉO. À Bangkok, comment les entrepreneurs sociaux viennent en aide aux déshérités"
Trois semaines passées dans la capitale thaïlandaise ont été l’occasion de faire évoluer mon opinion sur une ville qui n’emballe pas tous ses visiteurs.
La première semaine est difficile. Heures perdues à se déplacer dans l’immense ville, réseaux de transports très inégaux en fonction des quartiers, inquiétudes sur l’hygiène (alimentation, eau, glaçons etc.)… Tous ces éléments me font me ranger du côté des sceptiques. Nous refusons, par exemple, de boire le thé proposé partout et servi dans de la glace pilée. Des réticences que nous relativisons ensuite : Finalement, nous avons été très précautionneux, voire un peu ridicules. Bangkok possède un réseau public d’eau tout à fait bien traitée, ainsi que des distributeurs privés d’eau filtrée, auprès desquels tous les commerçants s’approvisionnent chaque jour.
Les semaines qui suivent, la frustration cède au plaisir : oui, on peut même boire l’eau dans les restaurants de rue ! Et ça nous change la vie, nous découvrons un tout autre visage de la ville.
Des bidonvilles à l’éco-tourisme
Après les terribles inondations de 2011 qui ont touché Bangkok, Michael Biedassek, le premier entrepreneur que nous rencontrons, s’est donné pour objectif de valoriser et d’améliorer les conditions de vie de communautés traditionnelles installées depuis plusieurs siècles de long de ses nombreux canaux. Son entreprise, Bangkok Vanguards, organise des balades urbaines qui permettent de créer des rencontres entre visiteurs et habitants, et d’augmenter les revenus de ces derniers.
Des communautés affectées par les aménagements urbains et les inondations
Dans leurs habitats de fortune sur pilotis, ces communautés sont les premières victimes des grandes inondations qui se produisent une fois tous les dix ans à Bangkok, qui n’est située qu’à 1,5 mètres au dessus du niveau de la mer. Leurs habitats, au départ prévus pour s’adapter au dense réseau hydraulique (pilotis), se sont ainsi progressivement transformés en bidonvilles. Elles attirent aujourd’hui de nombreux travailleurs pauvres qui s’entassent dans des logements insalubres, faits de bric et de broc. L’isolement social est quasi-complet et les communautés peinent à trouver leur place dans cette ville tentaculaire.
Rien de mal à ça, mais nous nous posons rapidement la question de savoir si nous côtoyons les jeunes pontes de l’entrepreneuriat « social » ou de l’entrepreneuriat « sociable ». Nous constatons en effet que Michael dépense beaucoup d’énergie à fédérer ses bénévoles et ses amis à sa cause en les divertissant.
Un secteur réservé à une élite « bobo-bio »
En France, j’avais déjà constaté que ce secteur pouvait être réservé à une élite « bobo-bio », mais je pensais justement trouver tout l’inverse dans un pays en développement comme la Thaïlande. Est-ce dû au jeune âge de notre entrepreneur (la trentaine) ou à certaines instances de financement internationales qui incitent les petites structures à se conformer à des critères d’image et de communication ?
Ces réflexions n’enlèvent rien à l’intérêt que je porte à l’idée de Michael. J’espère simplement que l’entrepreneuriat social n’est pas l’apanage d’une classe sociale aisée qui se noie dans un grand enthousiasme pour les discours et les conférences. Et qu’il attire par son efficacité et ses valeurs, plutôt que par son côté « fun » et fédérateur.
Louise Andrieu, avec Nils Van Effenterre.
Pour relire notre premier billet, rendez-vous ici.