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Cargo à voile : Grain de Sail double la mise

On ne s’en doute pas toujours de prime abord, mais le transport maritime à voile s’avère finalement plus rapide que par cargo à moteur. En tout cas la société bretonne Grain de Sail, basée à Morlaix dans le Finistère, le constate à chacune de ses traversées de l’Atlantique, entre Saint-Malo et New York. Au fond du bateau Grain de Sail 1, du vin français à l’aller et du café et du chocolat au retour.

« Quand nous nous sommes lancés en 2016, nous avons eu l’idée de montrer la viabilité de notre concept – le voilier cargo – en développant notre propre marque de chocolat et de café, explique Jacques Barreau, cofondateur de Grain de Sail. Cela nous a permis de financer notre premier navire, Grain de Sail 1 (GDS1), en 2018. C’est un voilier de 24 mètres qui peut emporter 50 tonnes de cargaison dans ses cales. »

Des trajets plus rapides que les porte-conteneurs

Ce que l’on ne soupçonne pas forcément, c’est que le transport en voilier cargo est non seulement écologique : « nos émissions de CO2 sont réduites de 90 à 97 % par rapport à un voyage en cargo classique », assure Jacques Barreau. Mais aussi plus rapide. Le voilier actuel GDS1 peut filer à 7-8 noeuds et rallier la côte américaine en 24 à 28 jours.

Mais un second navire, sera mis à l’eau à l’a fin de l’année : « Avec une surface de voile complète, nous pourrons aller à 11-12 nœuds et tenir un délai de livraison de 18 à 20 jours entre Saint-Malo et un port secondaire de New York, contre 30 à 34 jours pour un cargo traditionnel. » Grain de Sail gagne aussi du temps en ne passant pas par la case conteneur et en accostant dans des plus petits ports, moins saturés.

Grain de Sail 1 quittant le port de Saint-Malo direction New York. Crédit : Grain de Sail.

Un second bateau en préparation… et des projets plein la tête

Grain de Sail 1 a déjà effectué six boucles, soit 12 transatlantiques. Et accueillera bientôt son grand-frère, Grain de Sail 2, actuellement fabriqué au Vietnam. « Ce bateau sera deux fois plus long, 52 mètres, et avec des cales bien plus vastes pouvant embarquer 258 palettes soit environ 350 tonnes de fret », détaille Jacques Barreau. Lorsque les deux navires seront en activité, début 2024, l’objectif est de réaliser 5 à 6 boucles par an. La compagnie va donc pouvoir développer réellement son activité de shipping.

Côté coûts, « expédier une cargaison en voilier cargo coûte environ 40 % plus cher qu’en container, mais ce n’est pas rédhibitoire s’il s’agit d’un produit à valeur ajoutée. Et ce mode de transport peut être mis en avant sur le packaging pour justifier le prix et inciter à l’achat », pointe Jacques Barreau. Ainsi, les vins français ensuite vendus aux États-Unis affichent une explication sur le voyage décarboné qu’ils viennent de faire. Huile d’olive bio de grande qualité, épicerie fine, chocolat… Jacques Barreau a déjà en tête les types de produits qui pourraient transiter par les cales de ses voiliers à l’avenir.

Une tablette de chocolat Grain de Sail. Crédit : DR.

Quid de la sécurité des cargaisons embarquées sur Grain de Sail ?

On a tous en tête les départs chaotiques des bateaux de la Route du Rhum qui se mettent en danger lors de la traversée du rail de circulation des cargos d’Ouessant. En-est-il de même pour un voilier cargo ? « Nous sommes aux normes de la marine marchande avec tous les équipements obligatoires, quatre marins professionnels à bord – sept sur le Grain de Sail 2 – et un routage H24. C’est bien différent d’un voyage à la voile il y a un siècle ! Pour ce qui est de la météo, nous prévoyons généralement une fenêtre de 24 à 48 heures pour se donner le meilleur créneau. Et à ce jour nous n’avons jamais eu à annuler. »

Chargement des cales du voilier avant le départ de la transat. Crédit : Grain de Sail.

Quant à la cargaison, elle non plus n’a jamais subi de dommage grâce à un système de maintien très précis en cale. « Nous transportons d’excellents champagnes et ils arrivent intacts à New York. Nous nous assurons même que la température est bien constante dans la cale pour conserver les vins dans les meilleures conditions », affirme Jacques Barreau. Bref, pas de cuvée « Titanic » en vue.

Cet article a été réalisé en partenariat avec le Musée de la Marine.

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