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Frelon asiatique : fabriquez votre piège… et sauvez les abeilles !

C’est en 2004, dans un chargement de poteries chinoises, qu’aurait été importée en France la première reine de frelon asiatique (Vespa velutina). Depuis, l’insecte a prospéré à vitesse grand V sur notre territoire, dont le climat est comparable à celui de sa terre d’origine, située entre le Nord de l’Inde et la Chine. En seulement 10 ans, il a colonisé 70 % de la France.

Le problème ? Ce frelon fait festin des abeilles, déjà menacées d’extinction. Pour se nourrir, Vespa Velutina se place en vol stationnaire devant la ruche et attaque les abeilles en les décapitant avec ses mandibules, avant de les emporter dans son nid pour nourrir ses larves. Une dizaine de ces insectes suffit à anéantir une ruche. Ce frelon s’en prend également aux autres insectes pollinisateurs, ce qui constitue une véritable catastrophe pour les écosystèmes. D’autant qu’avec son dard capable de traverser une épaisseur de 6 mm, cette espèce est agressive envers l’homme : ses piqûres sont très douloureuses et, suffisamment nombreuses, elles peuvent être mortelles.

Comment reconnaître ce frelon ? Long d’environ 3 cm, Vespa velutina est un peu plus petit que le frelon commun (Vespa crabo). Il s’en distingue aussi par sa coloration brun-noir, ses pattes jaunes et ses ailes fumées.

Un nid : 150 nouvelles reines fondatrices

Première recommandation : si vous découvrez un nid, ne vous en approchez pas à moins de cinq mètres et signalez-le à votre mairie ou aux pompiers. Le nid sphérique fait généralement la taille d’un ballon de football, mais il peut atteindre jusqu’à 1 mètre de diamètre. Il se différencie de celui du frelon commun par son entrée latérale, et non verticale à la base. On peut en trouver partout : dans des cavités souterraines, sous les toits, dans des greniers, dans des buissons à hauteur d’homme, sur des façades de maisons, ou encore dans des arbres jusqu’à plus de 20 m de hauteur.

La « femelle fondatrice » du frelon asiatique naît à l’automne. Aux premiers gels, elle quitte le nid pour trouver une cachette où hiberner. Le reste de la colonie est alors abandonné… et succombe. Aux premiers redoux, vers la mi-février, la reine s’éveille et s’envole en quête de sucres énergisants afin de reprendre des forces pour bâtir un nouveau nid et y pondre. Durant 45 jours (entre le 15 février et le 1er mai), elle est la seule à s’y occuper de ses larves. C’est à ce moment qu’il faut la piéger. Car si rien n’est fait, au moins 150 nouvelles reines s’envoleront de chaque nid à l’automne. Et le cycle recommencera.

Mobilisation citoyenne

Pour l’enrayer, une mobilisation citoyenne est en cours, bien que les médias nationaux aient encore peu abordé le sujet. Des réunions, ateliers et appels aux volontaires ont eu lieu ces dernières semaines dans de nombreuses communes. L’objectif : installer des pièges dans des endroits ensoleillés, et si possible, à proximité des points d’eau. Le tout – et c’est la difficulté principale – en rendant ces pièges sélectifs afin de ne pas nuire aux autres insectes.

À vous de jouer ! Voici un modèle de piège particulièrement astucieux, fourni par l’Association action anti frelon asiatique (AAAFA). Il possède une « piste d’atterrissage », qui est plus adaptée au vol rectiligne des frelons qu’un simple goulot de bouteille. Mais surtout, il laisse la vie sauve à tous ses autres visiteurs. Suffisamment large pour les frelons asiatiques, son ouverture de 9 mm bloque les frelons européens afin de ne pas leur nuire. De même, sa « piste de décollage » permet aux petits insectes de s’en extraire facilement et une éponge en mousse les empêche de se noyer. Large de 5,5 mm, la sortie est quant à elle trop petite pour les frelons, mais suffisante pour permettre aux abeilles de s’envoler.

Pour le réaliser, rien de plus simple : il vous suffit de rassembler 2 bouteilles d’eau (identiques de préférence), 2 abaisse-langue (demandez-en à votre médecin, mais si vous n’en trouvez pas, des bâtonnets de glace peuvent faire l’affaire), 1 paire de ciseaux, de la colle, de la ficelle, une éponge, un peu de bière brune et du miel.

– Découpez les tiers supérieurs des deux bouteilles et collez les ensemble par la base pour former une sorte de toupie.

– Percez-y une ouverture de 9 mm de haut et de la largeur de votre premier abaisse-langue, que vous introduirez à l’intérieur.

– Fermez le bouchon du haut, afin d’éviter que la pluie ne pénètre dans votre piège, mais laissez celui du bas ouvert pour créer une nasse qui empêchera le frelon asiatique de remonter.

– Découpez une ouverture de 5,5 mm de haut dans la partie basse d’une de vos chutes de bouteille. Introduisez votre second abaisse-langue comme précédemment.

– Installez l’éponge, découpée à la forme voulue, et arrosez la d’un mélange de miel et de bière brune, qui repoussera les abeilles mais attirera les frelons asiatiques. Si des abeilles venaient malgré tout à s’égarer dans votre piège, vous pouvez rajouter du vin blanc pour accroitre la dissuasion.

– Refermez votre piège, sans colle, afin de pouvoir facilement le nettoyer. Vous n’avez plus qu’à l’accrocher en plein soleil avec votre ficelle. N’oubliez pas de renouveler l’appât tous les 15 jours.

– Lorsqu’une première reine frelon sera prise au piège, laissez-la à l’intérieur afin que ses phéromones attirent d’autres reines. Si elle ne meure pas, vous pouvez passer votre piège 10 secondes au micro-onde, ou le congeler une heure afin de l’endormir, puis la découper avec des ciseaux.

Notons que le piégeage reste critiqué par certains biologistes, qui estiment qu’il faudrait développer un appât phéromonal, encore plus sélectif. Solution pour laquelle la recherche est embryonnaire, notamment du fait d’un manque de moyens dédiés.

Si vous découvrez un nid, n’hésitez pas à le signaler à travers ce formulaire du Muséum National d’Histoire Naturelle pour le cartographier, ainsi qu’à votre mairie pour l’éliminer.

Jean-Jacques Valette
Journaliste We Demain

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