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Après un siècle de règne antibiotique, les phages contre-attaquent

25 000 décès par an imputables à leur inefficacité. La résistance aux antibiotiques est devenue un des problèmes majeurs de santé publique. Le salut pourrait venir d’une thérapie existant depuis un siècle et qui revient en force : la phagothérapie, dont les armes sont des virus ne détruisant que les bactéries ciblées.

Le 30/11/2016 par WeDemain
25 000 décès par an imputables à leur inefficacité. La résistance aux antibiotiques est devenue un des problèmes majeurs de santé publique. Le salut pourrait venir d’une thérapie existant depuis un siècle et qui revient en force : la phagothérapie, dont les armes sont des virus ne détruisant que les bactéries ciblées.
25 000 décès par an imputables à leur inefficacité. La résistance aux antibiotiques est devenue un des problèmes majeurs de santé publique. Le salut pourrait venir d’une thérapie existant depuis un siècle et qui revient en force : la phagothérapie, dont les armes sont des virus ne détruisant que les bactéries ciblées.

« Alors je vais être la petite souris, le cobaye de votre laboratoire… », murmure timidement Élodie [prénom modifié], vingt ans, qui souffre le martyre depuis six mois. Son oreille est infectée par un staphylocoque si virulent que les médecins sont chaque fois obligés de recourir à une anesthésie générale pour intervenir, tant les douleurs sont intenses.

L’infection du conduit auditif externe menace maintenant de s’attaquer à la paroi osseuse du crâne et rien, aucun antibiotique, ne parvient à juguler l’assaut bactérien.

Nous sommes en 1991. Le docteur Alain Dublanchet, microbiologiste à l’Institut Pasteur, rentre d’un voyage d’agrément à Moscou. Là-bas, il a franchi par curiosité le seuil d’une pharmacie et, à son grand étonnement, a trouvé facilement une vieille médication tombée dans l’oubli en Occident.

Lutte contre les bactéries

« Il n’y a aucun danger », explique Dublanchet à la jeune fille et à sa mère, anxieuses. « Dans le pire des cas, cela ne servira à rien, c’est tout. Et vous n’êtes pas mon cobaye, vous êtes comme ma fille, qui a le même âge que vous. »

Le docteur, sûr de lui, prépare alors la solution de phages qu’il s’est fait expédier de Moscou. Et il l’applique.« Trois heures après, les suppurations se sont arrêtées, mais ce n’était pas une surprise pour moi », sourit-il encore aujourd’hui.

En ce début de XXIe siècle, la lutte contre les bactéries redevient d’une brûlante actualité. La résistance aux antibiotiques s’accroît très rapidement pour s’affirmer comme un problème majeur de santé publique. Les médecins sont accusés de prescrire trop systématiquement des antibiotiques pour des infections mineures, mais en fait nous consommons massivement ces médicaments par notre alimentation.

Hormone de croissance

L’élevage industriel, qu’il s’agisse de poules entassées par milliers, de saumons encagés par centaines ou de fermes de mille vaches, ne pourrait prospérer sans le recours massif aux antibiotiques. La cohabitation permanente d’animaux empilés les uns sur les autres conduit à une explosion régulière de maladies infectieuses.

De plus, les antibiotiques agissent un peu comme une hormone de croissance, favorisant le gain de poids des bêtes. Les consommateurs humains subissent alors une exposition massive aux antibiotiques, sans le vouloir et sans le savoir. Cette surconsommation cachée se traduit aujourd’hui par une résistance accrue des bactéries.

Les chiffres sont là : en février 2016, un rapport de l’Autorité européenne de sécurité des aliments (EFSA) chiffre à 25 000 par an le nombre de décès imputables à l’inefficacité des antibiotiques. On parle désormais de « superbactéries », résistantes à toutes les souches d’antibiotiques connues. En 2014, l’Organisation mondiale de la santé (OMS) a même envisagé un monde post-antibiotique, « où des infections courantes et des blessures mineures qui ont été soignées depuis des décennies pourraient à nouveau tuer ».

En ce moment de grande tension, les micro-organismes contenus dans les excréments de poilus souffrant de dysenterie pendant la Grande Guerre se sont rappelés au bon souvenir des chercheurs… Lire la suite de l’article dans We Demain n°16.

Guillaume d’Alessandro.

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