Moches et bruyantes, les éoliennes? Installons-les en mer ou embellissons-les !

POINT DE VUE. Comment mieux intégrer les éoliennes dans le paysage, tout en les rendant plus efficaces ?  Pour y parvenir, des ingénieurs conçoivent des centrales à vent moins visibles, principalement en investissant dans des projets off-shore, voire far-shore, à plus de 30 km des côtes. Pierre-Emmanuel Bayan, chef de projet énergies renouvelables, revient pour We Demain sur ces innovations en cours.

Depuis le Grenelle de l’Environnement, un vent nouveau souffle sur la production énergétique française. Transition énergétique oblige, l’énergie éolienne commence à se développer à grande échelle. Mais alors que la puissance installée s’approche des 10 000 MW, on reproche à ces technologies de générer certaines nuisances, principalement visuelles. Pour répondre aux critiques, les constructeurs continuent d’innover de façon à rendre la présence d’éoliennes dans le paysage de moins en moins visible.

6 premiers champs en 2018

En 2007, lors de la signature des accords du Grenelle de l’Environnement, la France s’était fixée pour objectif de produire 25 000 MW avec de l’énergie éolienne en 2020, dont 6 000 MW grâce à l’éolien en mer. Actuellement, le Syndicat des Énergies Renouvelables estime que la production nationale de l’éolien terrestre avoisine les 10 000 MW. Quant aux éoliennes off-shore, les 6 premiers champs entreront en exploitation à partir de 2018.

Malgré une accélération du processus au premier trimestre 2015 (confirmée par le plan stratégique d’EDF CAP 2030), les résultats sont encore limités. Ainsi, dans le bilan prévisionnel 2014 de RTE, la part de l’énergie éolienne plafonnait à seulement 2,9 %. Une avancée cahin-caha. Et de plus en plus de réticences de la part de la population.

Dénonçant principalement des dépréciations immobilières et une défiguration des paysages, des mouvements de contestation commencent à se structurer afin de freiner le développement de ces technologies. Fin septembre, des associations ont protesté contre un projet important d’implantation d’éoliennes en sud Charente, comme elles l’ont confié au quotidien Sud Ouest :
 

« Ces engins provoquent des sources sonores de 106 dB. Ce n’est pas supportable. Surtout dans cette région bordée par une zone Natura 2000 protégée. Qui plus est, peu ventée. Avec des vents moyens de 5 m/seconde, les éoliennes seront inefficaces. Il faut au moins 14 m/s. »

Face au « nimbysme » (néologisme tiré de l’anglais « not in my backyard ») qui se généralise, les énergéticiens planchent sur des solutions pour rendre ces nouvelles infrastructures plus acceptables pour l’ensemble de la population. Parmi elles, les éoliennes en mer ont notamment été imaginées pour répondre au mécontentement des riverains mais, aussi, afin d’améliorer les performances énergétiques. Leurs hélices tournent en effet « en moyenne 35 % du temps en mer, contre 25 % sur terre ».

Mais ces éoliennes, elle aussi, sont contestées par certains riverains, voire par des professionnels de la pêche et du tourisme. C’est pourquoi les constructeurs développent aujourd’hui des éoliennes « far-shore », à plus de 30 km des côtes. Pour s’éloigner toujours plus du rivage, les éoliennes pourront alors reposer sur des structures semi-flottantes, développées entre autres par la société américaine Principle Power.

Éolien flottant

Pour Marc Bœuf, directeur R&D de l’Institut France énergies marines,« l’éolien flottant pourrait devenir la plus importante source d’énergie marine renouvelable, bien avant 2050″. À noter qu’afin d’obtenir les 8 000 MW d’électricité supplémentaires d’éoliennes terrestres d’ici à 2020, d’autres solutions sont également à l’étude.

L’entreprise NewWind a par exemple été récompensée par le prix EDF Pulse  pour son concept de « l’arbre à vent ». Développé grâce au principe du biomimétisme, cet équipement est capable de « s’intégrer dans le paysage urbain ». Il consiste en un arbre métallique « dont les feuilles, les aeroleafs, utilisent la force du vent pour produire assez d’énergie pour alimenter un foyer de quatre personnes, soit 3,5 kW, pour environ 300 jours utiles par an. »

Rupture technologique

Si EDF n’a pour l’heure pas annoncé son intention de contribuer à l’industrialisation de « l’arbre à vent », l’intérêt que l’énergéticien porte à cette solution et, plus généralement, à toutes les infrastructures électriques innovantes et respectueuses de l’environnement laisse à penser que ces dernières possèdent un bel avenir, et c’est tant mieux ! Preuve que NewWind séduit de plus en plus, l’ancien ministre du Redressement productif Arnaud Montebourg vient de prendre la présidence du conseil de surveillance de la start-up, vantant les mérites de la « rupture technologique » qu’elle propose. 

Autre piste, lors de la Proof Of Concept 21 (POC21), l’inventeur néozélandais, Daniel Connell, a présenté une éolienne à fabriquer soi-même (Do It Yourself), qui permettrait de réduire de « 10 % la facture d’électricité pour une maison dans une banlieue occidentale ». Une autre façon de se rendre ces drôles d’objets que sont les éoliennes sympathiques, en développant avec elles une certaine forme de proximité.

 

Pierre-Emmanuel Bayan est chef de projet énergies renouvelables.

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