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« En Ouganda, l’avenir appartient aux entreprises durables »

ILS CHANGENT D’EPOQUE. Par Maguelone, Yoon-Joo, Alexandre et Simon, étudiants à l’EDHEC Lille, actuellement en année de césure à Kampala (Ouganda).

Le 06/05/2015 par WeDemain
ILS CHANGENT D’EPOQUE. Par Maguelone, Yoon-Joo, Alexandre et Simon, étudiants à l'EDHEC Lille, actuellement en année de césure à Kampala (Ouganda).
ILS CHANGENT D’EPOQUE. Par Maguelone, Yoon-Joo, Alexandre et Simon, étudiants à l'EDHEC Lille, actuellement en année de césure à Kampala (Ouganda).

ÉPISODE 5. Au lieu d’opter pour un stage classique en parallèle de leur école de commerce, nos quatre contributeurs sont partis en Ouganda pour aider au développement de modèles économiques à fort impact social. Dans leur cinquième billet, ils s’interrogent sur l’importance de l’entrepreneuriat en Ouganda.

Kampala, 6 mai 2015,   

Les Ougandais sont des entrepreneurs dans l’âme. Nous ne sommes pas les seuls à l’avoir observé sur place : selon le Global Entrepreneurship Monitor (GEM), un collectif d’universités qui analyse l’entrepreneuriat au niveau mondial, la volonté de créer sa propre entreprise s’élève à 60 % en Ouganda. Il s’agit d’un des taux les plus élevés au monde.

Il faut dire qu’avec une croissance de 6 % par an, des investissements directs étrangers (IDE) représentant 6 % du PIB et de nombreuses richesses naturelles, l’environnement ougandais est fécond en opportunités entrepreneuriales. Par ailleurs, la création d’entreprises y est valorisée socialement.

56 % DES OUGANDAIS ONT MOINS DE 18 ANS

Avec une croissance démographique de 4 % par an et une population très jeune – 56 % des Ougandais ont moins de 18 ans-, l’entrepreneuriat représente par ailleurs une solution pour lutter contre une pénurie d’emplois annoncée. Le plus jeune pays du monde doit en effet se préparer à l’arrivée de 10 millions de personnes sur son marché du travail d’ici 2020. Autant de personnes qui pourraient tomber dans le désoeuvrement si elles ne trouvaient pas d’emploi, selon un rapport de la Banque mondiale (Youth and Unemployment in Africa, 2009).

AFRICAPITALISME

C’est pourquoi les organisations dédiées à l’entrepreneuriat se développent progressivement dans le pays. Hive colab, The Hub et FinAfrica en font partie. Et à l’échelle du continent africain, de nombreuses fondations et associations leur emboîtent le pas, comme par exemple The Tony Elumelu Foundation, qui défend l’égalité des chances, tout en valorisant le talent des jeunes Africains.

Une tendance entrepreneuriale qui s’inscrit dans la mouvance de « l’Africapitalisme « . Selon cette théorie, c’est l’essor de l’entrepreneuriat – et du secteur privé en général – qui permettra le développement du continent africain par le biais d’investissements à long terme, créant davantage de prospérité économique et sociale.

98 % de micro-entreprises en Ouganda

Si l’entrepreneuriat connaît un certain essor, les entreprises ougandaises au rayonnement national et international se comptent sur les doigts d’une main. Parmi elles, Ruparelia Group, Simba Telecom ou encore Mukwano Group. Les moyennes et grandes entreprises représentent, quant à elles, seulement 2 % du total des entreprises en Ouganda, face à 98% de micro-entreprises.

Le problème ? Ces dernières appartiennent, pour la plupart, à l’économie informelle, ce qui veut dire qu’elles sont non régulées par l’État. Forts de ce constat, nous nous sommes demandés pourquoi la volonté entrepreneuriale ougandaise se traduisait par la création de micro-entreprises et non d’entreprises à la taille suffisante pour créer de l’emploi et de la richesse de manière durable.

Notre analyse est la suivante : les start-up ougandaises ont, semble-t-il, d’importantes difficultés à croître de manière durable. Dans ce pays à fort potentiel entrepreneurial, 90 % des start-up coulent au bout d’un an. Plusieurs raisons peuvent expliquer ce phénomène : un accès difficile à des financements externes, des services publics de mauvaise qualité ou encore un manque de formation des entrepreneurs.

Mais la cause principale demeure, selon nous, relative à l’administration : les coûts liés à la légalité et la fiscalité sont exhorbitants et les démarches administratives très lourdes. À titre d’exemple, le montant des taxes que doivent payer les petites entreprises s’élève à 43 % de leur chiffre d’affaires dans le secteur des services, 49 % dans le secteur manufacturier et 67 % pour les magasins et restaurants. De quoi effrayer plus d’un aspirant entrepreneur ! 

Résultats, d’après le Journal international des sciences humaines et sociales (International Journal of Humanities and Social Science), 80 % des Ougandais travaillent dans des micro-entreprises informelles, donc plus vulnérables. Au bout de la chaîne, ce sont les employés qui trinquent, l’absence de protection juridique ou sociale se traduisant par des recours à des mécanismes institutionnels informels, marqués par l’exploitation. Leurs emplois sont généralement instables, les revenus faibles et irréguliers.

Évasion fiscale

En outre, cette situation génère de l’évasion fiscale. Un phénomène qui pénalise non seulement les entreprises qui respectent les lois et doivent s’acquitter d’impôts, mais aussi l’État censé assurer la régulation et la redistribution, conditions d’un développement économique durable et équitable. Il conviendrait donc de trouver des solutions pour lever les freins au passage d’une économie uniquement composée de micro-entreprises à une économie reposant sur un équilibre entre grosses, moyennes et petites entreprises.  

Et pour (re)lire les précédents volets de notre aventure en Ouganda, c’est par ici -> Épisode 1   / Épisode 2   / Épisode 3  / Épisode 4

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