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Au Mexique, du street-art contre la délinquance

Orange, vert, rose, jaune… Autant de couleurs qui illuminent désormais le quartier défavorisé de Palmitas, dans la ville de Pachuca, au Mexique. Un projet mené par un collectif d’artistes locaux, qui a permis de faire baisser la délinquance.

Le 12/08/2015 par WeDemain
Orange, vert, rose, jaune... Autant de couleurs qui illuminent désormais le quartier défavorisé de Palmitas, dans la ville de Pachuca, au Mexique. Un projet mené par un collectif d'artistes locaux, qui a permis de faire baisser la délinquance.
Orange, vert, rose, jaune... Autant de couleurs qui illuminent désormais le quartier défavorisé de Palmitas, dans la ville de Pachuca, au Mexique. Un projet mené par un collectif d'artistes locaux, qui a permis de faire baisser la délinquance.

Il n’y a pas si longtemps, le quartier de Palmitas, dans la ville de Pachuca, à une petite centaine de kilomètres de Mexico, avait mauvaise réputation. On ne se risquait pas dans ses ruelles abruptes, à flanc de colline, où la délinquance était élevée et où des bandes s’affrontaient à mort entre ses murs décrépis. Mais aujourd’hui, ce quartier déshérité est au centre de l’attention, depuis qu’un collectif d’artistes mexicains, le Germen Crew, a réalisé une immense fresque murale sur l’ensemble des maisons avec l’aide de ses habitants.

Repeintes aux couleurs de l’arc-en-ciel, les modestes habitations dessinent ensemble une immense vague gaie et colorée de 20 000 m2 qui redonne de la fierté à toute sa population et lui ouvre de nouveaux horizons. Au total, ce sont 202 maisons, 452 familles et 1808 personnes qui ont été impliquées dans le projet.  Côté emploi, le chantier d’une durée de cinq mois a mobilisé une vingtaine d’habitants pour réaliser « la plus grande [fresque] de tout le Mexique« , selon la mairie.

Repartir de zéro

Initié en 2012 et financé par le gouvernement mexicain à hauteur de 5 millions de pesos (280.000 euros), ce projet visait à faire baisser la délinquance et régénérer le tissu social. « Il a fallu convaincre les habitants d’accepter que l’on repeigne leur maison », explique à l’AFP Ana Estefania Garcia, chargée de l’urbanisme à la mairie de Pachuca. « Le quartier a d’abord été repeint en blanc, comme pour dire que nous repartions de zéro, ce qui fut un choc pour eux », raconte-t-elle.

Parallèlement, les rues du quartier ont été nettoyées, les carcasses de voitures retirées, l’éclairage amélioré et huit caméras de surveillance installées. La fresque murale a ensuite été élaborée et peinte avec les habitants sur les maisons, relançant ainsi une tradition mexicaine, le muralisme -une pratique artistique, qui a incarné la révolution mexicaine des années 1900- , dans la lignée du célèbre peintre mexicain Diego Riviera.

Baisse de la délinquance

Outre les transformations esthétiques, c’est l’âme toute entière du quartier qui s’est métamorphosée et développée, à tel point que la violence chez les jeunes est en très nette baisse.« La délinquance a diminué de 35% depuis le lancement du projet en 2012 », précise la chargée de l’urbanisme, « les jeunes de bandes rivales ont travaillé ensemble. Ils ont appris à se connaître ». Le seul habitant réfractaire à cette fresque artistique tempère: « C’est surtout les caméras qui ont fait baisser les violences. Un délinquant reste un délinquant, peu importe la couleur des murs »

L’habitant, qui a finalement accepté que l’on repeigne sa maison, reconnaît que l’ambiance dans le quartier a changé : « Les couleurs ont apporté de la gaieté et l’attitude des gens s’est améliorée ». Roberto Robles Jaimez, 36 ans, graffeur se rappelle : « Un enfant m’a dit que depuis qu’on avait peint sa maison, il avait davantage envie d’aller à l’école, parce qu’il était plus heureux ». Il ajoute : « Certains habitants nous ont offert des vêtements et de la nourriture. Les gens sont moins fermés ».  Dans une rue adjacente, entre des murs aux couleurs éclatantes, des enfants tapent dans un ballon. « Avant, les parents ne les autorisaient pas à jouer dans la rue après l’école, par crainte d’affrontements entre bandes rivales, mais aujourd’hui les choses changent », souligne Ana Estefania Garcia.

Raconter l’histoire du quartier

Depuis l’achèvement de la fresque, aucune dégradation n’a été constatée et aucun graffiti sauvage n’est apparu.  Les artistes de street-art du collectif Germen Crew réalisent maintenant sur les murs quelques dessins plus élaborés, racontant l’histoire du quartier et de ses habitants. « L’art doit être apporté à ceux qui n’y ont pas accès », explique Irving Trejo, jeune peintre de 24 ans, tandis qu’il achève le portrait en grand format d’une vieille habitante du quartier, mains ouvertes, qui ornera le mur de la maison où elle vit. Une façon de « rendre hommage à la sagesse des anciens ».

Preuve du succès de l’opération, des habitants de la colline voisine sont venus voir les artistes au travail pour leur demander s’ils pouvaient faire la même chose dans leur quartier. Un projet d’extension serait à l’étude. Quant aux responsables de la municipalité, ils veulent désormais discuter avec les habitants pour donner une suite touristique au projet et pérenniser ainsi le succès de « l’arc-en-ciel de Pachuca ».

Ailleurs dans le monde, des initiative similaires ont déjà été testées, comme à Rio, avec l’œuvre de  JR dans les favelas de Rio qui avait pour but de rendre hommage aux femmes. Ou bien encore celle, en cours, du projet crowdfundé Back to Rio toujours au Brésil, dont l’objectif est de repeindre les favelas de couleurs vives.

La rédaction (avec AFP)

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