Partager  > Au Mexique, la poste s’associe à des livreurs amateurs pour étendre ses services

Written by 15 h 19 min Partager

Au Mexique, la poste s’associe à des livreurs amateurs pour étendre ses services

Et si l’économie collaborative venait au secours des facteurs ? C’est le pari que s’est lancé le service postal mexicain en s’associant à une jeune start-up de livraison pour étendre son offre. Une formule à étudier, à l’heure où les postes du monde entier se retrouvent menacées par la chute vertigineuse du volume de courrier, comme l’explique « We Demain » dans son numéro 12.

Le 02/12/2015 par WeDemain
Et si l'économie collaborative venait au secours des facteurs ? C'est le pari que s'est lancé le service postal mexicain en s'associant à une jeune start-up de livraison pour étendre son offre. Une formule à étudier, à l'heure où les postes du monde entier se retrouvent menacées par la chute vertigineuse du volume de courrier, comme l'explique "We Demain" dans son numéro 12.
Et si l'économie collaborative venait au secours des facteurs ? C'est le pari que s'est lancé le service postal mexicain en s'associant à une jeune start-up de livraison pour étendre son offre. Une formule à étudier, à l'heure où les postes du monde entier se retrouvent menacées par la chute vertigineuse du volume de courrier, comme l'explique "We Demain" dans son numéro 12.

Tout commence en juin 2013. Cycliste aguerri, Miguel « Mick » Islas, jeune Mexicain de 29 ans, regrette que le vélo ne soit pas plus pratiqué dans les hyper-centres des villes de son pays, en proie à des embouteillages systémiques.

Une idée lui vient pour y remédier. Il crée alors Kangou, une entreprise de collecte et de livraison à domicile de paquets et de lettres. Le tout à bicyclette, à pied, en métro, à cheval…. Qu’importe, pour peu que le moyen de transport soit écolo. L’idée est de proposer un complément de revenu aux jeunes au chômage – les 15-29 ans représentent près de 45 % des personnes sans emploi au Mexique – tout en assainissant l’air des villes. 

À travers une appli, la start-up permet à ses utilisateurs de faire appel à un livreur, à n’importe quel jour et à n’importe heure, grâce à un système de géolocalisation. Ce dernier peut effectuer des courses, faire la queue pour acheter des tickets de concert ou encore récupérer un chargeur oublié chez soi. Le tout, pour des sommes modiques, réglées par paiement sécurisé, et sans que cela ne pollue l’air.

Une formule qui permet de recréer du lien social

Pour devenir un Kangou, autrement dit un livreur amateur, aucune qualification requise. Il suffit de posséder des papiers en règle. Marine Tous Lion, française expatriée au Mexique et chargée de la communication et du développement durable de la start-up, détaille la variété des profils des livreurs :
 

« Cela va du jeune sans emploi, au retraité à la pension trop petite, en passant par le transsexuel qui souffre de discrimination à l’embauche. Il y a même des facteurs qui veulent arrondir leurs fins de mois… »

 
La formule, selon son concepteur, permet de recréer du lien social en incitant les livreurs à mieux connaître leurs villes, à construire des liens de confiance avec leurs voisins. Et à faire prendre conscience à chacun de son impact écologique.

« Notre start-up y gagne, mais la poste y gagne aussi »

Forte de son succès, Kangou s’est récemment associée à la poste mexicaine. Cette dernière a fait appel à la start-up pour proposer une extension dans le service de ses colis. 

Depuis la signature de ce partenariat en novembre, un livreur Kangou peut venir chercher un pli ou un colis chez vous ou dans votre entreprise, pour ensuite l’amener dans le bureau de poste le plus proche. De là, il sera envoyé vers l’une des 35 plus grandes villes du Mexique. Et si le destinataire est absent lors de la livraison de son colis par la poste, un livreur Kangou peut effectuer un second passage. Quant aux petits e-comerçants, cela leur permet d’envoyer des colis sans avoir à se déplacer à la poste.

Côté tarifs, il faut compter 195 pesos, soit environ 11 euros, pour la prise en charge d’un colis de moins de 3 kilos, qui est ensuite pris en charge par la poste. Et pour une livraison « classique », intra muros comptez 30 pesos (1,70 euros) pour une charge de moins de 4 kilos. Autrement dit, moins cher qu’une entreprise de livraison classique à vélo.

Pour Marine Tous Lion, ce partenariat est une aubaine pour les services postaux : « Ce genre de coopération économique permet de développer le réseau de livreur et de renouveler l’intérêt pour le service postal, dont les finances sont en chute libre depuis la révolution numérique. » Et d’expliquer que de tels partenariats pourraient se nouer avec d’autres pays, où « des communautés Kangou commencent à se constituer ». En Colombie, au Canada et en Australie notamment.

Ne pouvant pas payer ses salariés 24 heures sur 24 et sept jours sur sept, les services postaux ne pourraient en effet pas se permettre d’assurer un tel service de livraison eux-mêmes. Aujourd’hui, la poste mexicaine peut ainsi s’appuyer sur un réseau de près de 1 700 livreurs volontaires… soit presque autant que le nombre de facteurs dans la région de Mexico.
 
Ce type de partenariat ne risque-t-il pas de détruire des emplois chez les facteurs ? « Pas du tout ! », selon Marine Tous Lion :
 

« C’est le contraire de l’uberisation ! Les Kangous offrent un service qui ne pourrait pas être assuré par la poste, tout en valorisant leur offre. Certes, on y gagne, mais eux aussi. Notre modèle est réellement collaboratif et ne remplace en aucun cas le salariat classique. Les facteurs restent un élément essentiel du service de proximité, nous sommes juste un plus. »

L’avenir des facteurs reste trouble

Il n’empêche, l’avenir des facteurs reste trouble. Au Mexique comme en France, la poste est durement touchée par l’irruption du numérique, qui fait baisser de façon drastique le volume de courrier (lire notre dossier dans We Demain numéro 12).

Pour survivre, l’institution française a, elle, développé ses activités bancaires, un réseau mobile, et créé un pôle spécifique pour incuber des start-up. En parallèle, elle demande  à ses employés de se diversifier : recyclage, collecte, constats, etc. Des nouvelles missions pas toujours bien acceptées…
 

« Ils ne savent plus quoi inventer pour nous rassurer et pour se rassurer. Et pourquoi pas nous demander de livrer des fleurs ou des pizzas ? De faire la nounou ou de tondre les pelouse ? » , s’insurge un facteur de Mantes-la-Jolie dans We Demain.

 
Faire collaborer une communauté de livreurs amateurs avec des facteurs traditionnels pourrait-il participer à renforcer le service postal français ? Le fondateur de Kangou en est persuadé et ne cache pas son intention de collaborer, un jour, avec les postes tricolores.
 

 

A lire aussi :