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« Survivre », une web série en immersion chez les survivalistes

Le 14/05/2019 par Albane Guichard

Que feriez-vous si, demain, le monde tel que vous le connaissez s’écroulait ? Comment réagiriez vous face à une catastrophe naturelle, une guerre, face à l’effondrement de notre société ? Vous n’y avez jamais réfléchi ? Les survivalistes, eux, si.
 
Le réalisateur Alexandre Pierrin a suivi ces hommes et ces femmes qui se préparent au pire, convaincus que la catastrophe est toute proche. Il signe la série Survivre, diffusée le 5 mai sur France TV Slash. Composée de cinq épisodes d’une quinzaine de minutes, ce web documentaire apporte un éclairage inédit sur le survivalisme en France.

On y découvre des profils variés. « J’ai voulu montrer dans la série que le survivalisme correspond à plein de réalités très différentes », explique Alexandre Pierrin. Voici les principaux protagonistes rencontrés.

À la rencontre des survivalistes français

Bernard a 33 ans, se décrit comme un homme « tout à fait normal » et préfère le terme « prévoyant » à celui de « survivaliste« . Pour Bernard, être prévoyant c’est avoir un sac d’évacuation à côté de son lit, mais aussi deux armes à feu et un gilet pare-balles chez lui.

Yoann est ingénieur informaticien. Il ne veut pas dépendre de la société pour faire (sur)vivre sa famille. Alors il a construit sa Base Autonome Durable (BAD) au fond du jardin, avec des poules, une serre et un système d’aquaponie : de quoi tenir au moins 8 mois en autonomie.

Catherine est inquiète quand elle regarde les informations, elle sent qu’un conflit est imminent. Pour se protéger, elle a demandé à son mari Pierre d’installer un bunker hermétique aux risques NRBC (nucléaires, radiologiques, biologiques et chimiques). Une guerre peut éclater au dessus de leur tête, ils seront sains et saufs, six pieds sous terre.

Alexis Brus, 19 ans, est réserviste au 27ème bataillon de chasseurs alpins et tient une chaîne Youtube sur le bushcraft, l’art de vivre dans les bois. En cas de guerre civile, Alexis en est convaincu : c’est dans la forêt qu’il sera le mieux, loin du plus grand danger : l’Homme.

Freddy, 40 ans, célibataire et sans enfant, est « survivaliste dans l’âme » mais avant tout jardinier. Après un burn out, il a pris le large et a acheté une forteresse du XIXe siècle au sommet d’une colline. Désormais, il vit au jour le jour et s’occupe de son potager. En cas d’attaque, les épais murs en pierre et les fossés de 12 mètres de sa demeure sauront le protéger.

Philippe, 59 ans, est devenu survivaliste après une période de disette. Pour ne plus jamais manquer de rien, il s’est constitué un garde-manger où il stocke riz, pâtes et légumes en conserve. Tous les jours, il vit comme s’il était en survie, pour ne pas sentir la différence le jour venu.

Un mouvement hétérogène

Né aux États-Unis pendant la Guerre froide, le survivalisme s’adapte aux lieux et aux époques. Pour les Américains, il s’agit surtout d’investir dans des abris antiatomiques et des armes à feu. En France, le mouvement se concentre davantage sur l’autonomie et le réapprentissage d’anciennes techniques, mais la défense et l’armement ne sont pas en reste.

Le cercle des survivalistes est difficile à intégrer : « C’est un milieu très secret, même entre eux ils ne se parlent pas, à part sur des forums ou des pages Facebook avec des pseudos », conte Alexandre Pierrin. Après avoir subi insultes et menaces, il a réussi à gagner la confiance de certains et à rentrer dans leur intimité.

Chaînes d’information en continu, théories de collapsologie sur les réseaux sociaux, films et séries apocalyptiques, les survivalistes baignent dans une culture de la peur. Pour eux, la solution est individuelle : il faut sauver sa peau, coûte que coûte. « Il y a ce côté homme contre la nature qui va retourner à son essence, c’est très viriliste », note le réalisateur.

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La peur, un business qui rapporte

La série aurait pu se contenter de documenter le quotidien de survivalistes, mais Alexandre Pierrin est allé plus loin, jusqu’à poser le doigt sur un phénomène qui prend de plus en plus d’ampleur : le business qui surfe sur leur peur. L’épisode 3 nous emmène au Salon du survivalisme, dont la première édition a rassemblé plus de 7 000 participants en 2018.

Stages dans les bois, couteaux en tout genre, livres de Piero San Giorgio – auteur survivaliste proche de l’extrême droite -, le « supermarché de la catastrophe » apporte des réponses à cette peur, et souvent à prix d’or. Certains survivalistes n’hésitent pas à dépenser des milliers d’euros pour être prêts le jour J.

« Aujourd’hui, une des principales manières de se rassurer pour beaucoup de gens c’est la consommation. C’est une idée néolibérale de dire qu’il faut s’en sortir par soi-même avec les bons objets pour survivre », note Alexandre Pierrin. Il en est convaincu, le survivalisme va être amené à grandir, parce qu’il est « parfaitement dans l’ère du temps ».

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« Et s’ils avaient raison ? »

Si le réalisateur prône un futur moins apocalyptique et plus collectif, il ne peut s’empêcher, lui aussi, de s’imaginer ce qu’il ferait si la société s’effondrait. Il laisse d’ailleurs le spectateur sur une question en suspens: « Et s’ils avaient raison ? »

« Ça n’aurait pas été complètement honnête de ma part si je fermais le chapitre en disant simplement qu’ils ont tort. La peur qui les anime, c’est quelque chose d’intemporel, c’est impossible à faire taire », conclut Alexandre Pierrin.

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