Partager la publication "En Espagne, adoptez un olivier pour sauver un village"
« C’est désertique, hein ?« , me lance à l’arrivée Alberto Alfonso Pordomingo, qui travaille la semaine à Madrid et passe presque tous ses week-ends dans son village familial d’Oliete, 365 habitants contre 2 400 il y a un siècle. Ce pueblo aragonais aurait pu ressembler à tant d’autres de cette région parmi les plus dépeuplées du pays, mourant à petit feu de l’exode rural. Mais il tient son salut d’une richesse locale bien ré-exploitée : l’olivier.
5200 oliviers soutenus par plus de 2000 « parrains »
« On voulait, avec les nouvelles technologies, connecter le monde urbain et le monde rural, prendre soin des oliviers en faisant appel à la solidarité« , m’explique Alberto Alfonso Pordomingo, 39 ans, l’un des cofondateurs. Moyennant un don de 50 euros par an, les parrains se voient attribuer un arbre à leur nom, reçoivent deux litres d’huile d’olive vierge extra produite localement et peuvent rendre visite à leur « filleul » à branches.
« 5 200 oliviers ont été récupérés avec le soutien de plus de 2 000 parrains. La plupart viennent d’Espagne, une cinquantaine de France, d’autres d’Allemagne, d’Italie…« , poursuit ce résident madrilène qui garde un fort lien affectif avec le village de ses parents et grands-parents.
« On est le premier employeur du village, se félicite Alberto Alfonso Pordomingo. On a aussi pu donner du travail à des personnes en situation de handicap, dont l’insertion est encore plus dure en milieu rural. »
« Quand une école ferme en milieu rural, c’est définitif »
« C’est un effet domino« , confirme Pilar Romeo Palacios, la dernière venue, qui souligne les vertus de cette économie circulaire. En sauvegardant ses oliviers, le village conserve ses services, les habitants récupèrent une huile haut de gamme sans produits chimiques, du bois pour se chauffer, des rameaux pour nourrir le bétail…
Ce cercle vertueux aurait été impossible sans l’implication des parrains. « Les donateurs peuvent venir sur place quand ils le veulent et prendre part à des activités, poursuit Alberto Alfonso Pordomingo. Ce côté participatif explique notre succès. »
« Le côté écologique nous a intéressés et comme nous venons souvent dans la région, on en a profité pour découvrir le village et venir chercher en personne l’huile d’olive« , explique cette éducatrice de rue à la retraite. Afin de toucher un plus large public, l’association, déclarée d’utilité publique, a lancé l’an dernier miolivo.org, une plateforme de vente en ligne.
« C’est une autre voie de commercialisation pour nos 2 000 litres d’huile d’olive excédentaires« , précise Sira Plana Marín, 40 ans, initiatrice du projet. Motivée par la réussite rencontrée, elle espère développer de nouvelles idées cette année, dont l’organisation d’interventions en milieu scolaire autour du développement durable. Avec, seule contrepartie pour les établissements intéressés, le parrainage d’un olivier. Elle conclut : « Avant de commencer l’aventure, je voyais mon village vide, mort d’ici vingt ans. Il y a maintenant des raisons d’espérer. »