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Pour sauver les abeilles, ils inventent la ruche-robinet à miel

Mis au point par deux apiculteurs australiens, ce nouveau mode d’élevage enflamme le web participatif et questionne les méthodes de l’apiculture traditionnelle.

Le 03/03/2015 par WeDemain
Mis au point par deux apiculteurs australiens, ce nouveau mode d'élevage enflamme le web participatif et questionne les méthodes de l'apiculture traditionnelle.
Mis au point par deux apiculteurs australiens, ce nouveau mode d'élevage enflamme le web participatif et questionne les méthodes de l'apiculture traditionnelle.

Alors qu’un peu partout dans le monde, on innove pour prévenir la disparition des abeilles au moyen de puces électroniques, de ruches opensource ou autres capteurs intelligents, un projet de financement participatif peu banal rencontre un succès retentissant.
 
En seulement quarante-huit heures, deux apiculteurs australiens, Stuart et Cedar Anderson (un père et son fils), ont réussi à collecter deux millions de dollars sur Indiegogo pour financer leur idée novatrice : la création d’une ruche à robinet. Le concept ? Laisser les abeilles faire leur travail tranquillement, sans interférence humaine, en extrayant leur miel à travers un robinet.
 
Testée pendant dix ans, cette technique d’auto-harvesting (« récolte automatique ») contournerait l’un des inconvénients des ruches traditionnelles : l’intrusion de l’Homme dans l’habitat naturel de l’espèce. Celle-ci génère du stress chez l’insecte (et donc chez l’apiculteur), puisqu’elle nécessite habituellement d’étourdir les abeilles afin de pouvoir ouvrir les couches d’alvéoles avec un couteau chaud.

Une technique « révolutionnaire »

À l’inverse, le projet Flow Hive des deux inventeurs contourne cette difficulté. En introduisant des alvéoles artificielles dans les ruches, que les butineuses remplissent et referment naturellement, plus besoin de les ouvrir. Ces cellules sont séparées verticalement et facilitent le flot (flow) vers l’extrémité de la ruche, actionné par l’action d’un robinet. Une fois le miel déversé à l’extérieur, un tour de levier permet de replacer les alvéoles vidées, que les abeilles peuvent alors remplir en cassant l’opercule pour recommencer l’opération.
 
Résultats ? Moins de piqures, fini les abeilles écrasées et une récolte facilitée des différents miels en fonction des saisons. En bref, une technique qui, selon ses promoteurs, permet de récolter du miel tout en préservant une espèce fortement menacée.

Scepticisme chez certains apiculteurs

Mais ce projet, qui a récolté à ce jour près de 4,5 millions de dollars de dons, n’est pas au goût de tout le monde. En Allemagne, les associations Deutscher Imkerbund (Association allemande d’apiculteurs) et Deutscher Berufs- und Erwerbsimkerbund (Association d’apiculteurs professionnels), interrogées par Wivo Green, critiquent le manque d’arguments scientifiques de la démarche, estimant que des éléments tels que la teneur en eau ou la température du miel mériteraient d’être évalués.
 
En Belgique, l’apiculteur et éthologue Simonpierre Delorme va plus loin : il dénonce « un moyen de se faire de l’argent » en surfant sur un mouvement « tendance ». Cité par Levif.be., il y voit même un processus contreproductif : peu sain et « source de stress » supplémentaire pour l’insecte.
 
« Les abeilles sont programmées pour produire de la cire à une certaine époque de leur vie. (… ) Si on ne leur laisse pas assez de place pour qu’elles aient la chance de l’utiliser, cela va pousser les abeilles à l’essaimage (quand une partie des abeilles quitte la ruche avec une reine pour former une nouvelle colonie) », jure-t-il.

S’il est un point de vue que tous les apiculteurs partagent, c’est la menace de disparition qui plane sur les abeilles. Depuis plusieurs années, des millions de leurs colonies disparaissent, alors que d’elles dépend un tiers de notre alimentation.

En cause notamment, les pesticides, la monoculture, le changement climatique, la multiplication des émissions électromagnétiques et la pollution, qui conduisent non seulement à des pathologies et infections parasitaires, mais aussi à l’émergence de nouveaux prédateurs ou d’espèces invasives, ainsi qu’à la réduction de ressources de nectar et de pollen.

Lara Charmeil
Journaliste à We Demain
Twitter : @LaraCharmeil

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