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Written by 15 h 30 min Respirer

« The Story of Stuff », la petite vidéo qui a fédéré 1 million d’acteurs du changement

INTERVIEW. Comment un simple clip décrivant la société de consommation peut-il être le départ d’un tel mouvement ? We Demain a éclairci ce mystère en rencontrant Allison Cook, la porte-parole de la communauté Story of Stuff (« l’histoire des choses » en français). Son ambition ?  » Créer une alternative à la gouvernance actuelle. »

Le 25/05/2015 par WeDemain
INTERVIEW. Comment un simple clip décrivant la société de consommation peut-il être le départ d'un tel mouvement ? We Demain a éclairci ce mystère en rencontrant Allison Cook, la porte-parole de la communauté Story of Stuff ("l'histoire des choses" en français). Son ambition ? " Créer une alternative à la gouvernance actuelle."
INTERVIEW. Comment un simple clip décrivant la société de consommation peut-il être le départ d'un tel mouvement ? We Demain a éclairci ce mystère en rencontrant Allison Cook, la porte-parole de la communauté Story of Stuff ("l'histoire des choses" en français). Son ambition ? " Créer une alternative à la gouvernance actuelle."

Au début, il ne s’agissait que d’une petite vidéo de vingt minutes mise en ligne en 2007. The Story of Stuff explique de façon ludique la façon dont nous produisons, utilisons et jetons les objets manufacturés. Cinq ans et plus de quatre millions de vues plus tard, un mouvement en est né.
 
À l’occasion du OuiShareFest, qui s’est tenu du 20 au 22 mai à Paris, We Demain s’est entretenu avec Allison Cook. Chargée des relations avec la communauté de la désormais ONG The Story of Stuff, elle a rejoint Annie Leonard, la militante américaine à l’origine du projet en 2007. Fraîchement débarquée de Californie pour nous parler de cette organisation qui rassemble à présent une dizaine de salariés et plus d’un million d’adhérents dans le monde, elle revient sur ce travail « collaboratif «  qu’elle a choisi d’exercer pour être « en accord avec ses valeurs ».
 
We Demain : Comment a débuté l’aventure The Story of Stuff ?
 
Allison Cook : Au début, cela se résumait à un clip de 20 minutes produit par les designers américains des Freen Range Studios, une agence californienne qui crée des vidéos pour les « changemakers », les acteurs du changement de tous bords. Annie Leonard avait alors eu l’idée de faire un film racontant le cycle de vie de nos objets et leur impact sur la planète. Et de proposer des alternatives. Pour ce faire, elle a voyagé pendant des années à travers le monde à la recherche d’autres modes de consommation, ayant des retombées écologiques et politiques positives.

Le succès de cette vidéo dépasse alors toutes les attentes, avec, très rapidement, des centaines de milliers de vues…

Oui. C’est là qu’elle s’est rendue compte que nous pouvions l’utiliser comme tremplin pour rassembler des personnes prêtes à s’engager dans une « quête collaborative de solutions« .

Comment expliquer un tel succès ?

Parce qu’il y a une demande pour l’information simple ! Lorsqu’il s’agit d’analyser notre façon de consommer, nous disposons d’une quantité inimaginable de données, d’études, d’articles et d’ouvrages, qui empêchent bien souvent les gens de creuser les sujets davantage. C’est le phénomène bien connu de la surcharge informationnelle, aussi appelée « infobésité ». Et cela noie les gens qui souhaitent réellement s’investir. En vulgarisant des thèmes complexes, The Story of Stuff a réussi à créer une dynamique culturelle. À partir de là, nous avons pu mesurer la quantité de gens désireux de créer un changement. Bien souvent, il leur manque seulement les clefs. Mais le besoin d’en parler est fort.

Comment peut-on « mesurer » le désir de changement ?
 
On ne le peut pas scientifiquement, c’est vrai. En revanche, nous avons halluciné face à la quantité de courriels reçus. Des milliers de personnes du monde entier nous ont écrit pour nous témoigner de leur enthousiasme. Des milliers !  Certains d’entre eux se sont lancés des défis radicaux, comme de ne plus rien acheter pendant un an. D’autres ont changé leur façon de faire des courses. Dans de nombreuses universités américaines, cela a même provoqué un réel engouement pour les études en sciences environnementales. Au point que de nouveaux cursus ont été créés ! Et maintenant, nous sommes plus d’un million à participer à l’aventure The Story of Stuff.

Pour parvenir à ce chiffre, vous avez continué à produire des vidéos déclinant les différents thèmes abordés dans la première.
 
Grâce au succès de notre vidéo initiale, nous avons constaté que le format fonctionnait. Effectivement, nous avons à présent neuf vidéos à notre actif, toutes mettant en scène les mêmes personnages et adoptant la même animation flash. The Story of Cap&Trade, mise en ligne en 2009, raconte par exemple la façon dont fonctionne le commerce du carbone. Elle traite des mécanismes de la pollution et de ces principaux responsables. Tout en recensant à la fois des solutions concrètes pour faire face au dérèglement climatique et des dizaines d’organisations au sein desquelles les internautes peuvent s’engager, s’ils le souhaitent.

Vous jouez à plein la carte collaborative, en plaçant les scripts de ces vidéos en open source. Dans quel but ?

L’objectif est que ces scriptes puissent être compris de tous. L’histoire des bouteilles plastiques, des cosmétiques, des appareils électroniques, des citoyens unis, de la banqueroute et du changement sont traduites dans plus de 30 langues et partagées partout dans le monde.

Votre mouvement s’appuie donc uniquement sur des vidéos et les réactions des gens à ces mêmes vidéos ?
 
Non, pas uniquement. Au cours de notre travail, nous avons remarqué que plein de gens ne s’engagent pas car ils ne savent pas comment le faire. Nous avons donc également créé des Mooc (Massive Open Online Course, formations en ligne gratuites) pour que plus de gens se décident à agir. Chaque Mooc se déroule sur quatre semaines et est accessible gratuitement, partout dans le monde, à tout le monde. Il se déroule en quatre étapes.

Lesquelles ?

La première semaine, nous aidons chaque participant à se fixer un but. Nous leur demandons quelles sont les choses qu’ils voudraient changer s’ils le pouvaient. La seconde semaine, nous les formons à la communication. La façon dont vous parlez d’un sujet compte énormément : elle doit être simple, accessible, sans jargon ou acronymes. Dans un troisième temps, nous aidons les participants à se connecter à d’autres acteurs du changement et à se créer un véritable réseau social personnalisé, avec des conséquences dans la vraie vie. Par le biais d’exercices ciblés, nous les poussons à aller parler de leur projet à leurs voisins et amis. Enfin, la quatrième semaine, nous les aidons à constituer un plan. L’idée n’est pas de se fixer des projets inatteignables, mais bien de se demander comment concrètement, nous pouvons réussir à mettre nos idées en action, par étapes.

À qui ces formations sont-elles adressées ?
 
À tout le monde. Les participants sont d’origines diverses. Nous comptons parmi eux aussi bien des nonnes que des professeurs, des avocats que des femmes au foyer. C’est pratique, car il suffit de disposer d’une connexion web – vous pouvez aussi bien y participer au fin fond d’une forêt que dans une grande métropole. Les formations ont lieu toutes les six semaines et rassemblent jusqu’à cent personnes, qui concrétisent réellement des projets par la suite. En Californie, une participante a par exemple réussi à développer une alternative aux sacs plastiques en créant un véritable réseau de sacs réutilisables.

Quels sont vos autres projets ?

Ils sont multiples : en presque six ans, un livre que nous avons publié s’est élevé au rang de best-seller. Nous avons aussi créé des programmes d’enseignement pour les lycées américains, lancé une série de podcasts, The Good Stuff (« les bons trucs »), qui parle des efforts faits par les acteurs du changement, au quotidien. Mais surtout, nous sommes engagées dans plusieurs campagnes et pétitions, dont les problématiques sont aussi bien résumées dans nos vidéos que dans nos moocs. Depuis 2014, nous cherchons ainsi à réduire la pollution générée par le plastique ou les microbilles, en travaillant sur une législation qui permettrait de réduire leur utilisation dans la production de cosmétiques, ou de dentifrice, par exemple. Ce, grâce à des relais dans les mondes économique et politique.
 
Notre dernier projet s’appelle Community Launchpad. Nous avons reçu plus de 150 propositions de projets visant à réduire l’impact de notre consommation sur l’homme et la planète. Ces demandes sont arrivées de partout : d’Amérique du nord et du sud, bien sûr, mais aussi d’Australie, d’Afrique, d’Europe, de Nouvelle Zélande et d’Asie.

À quoi peuvent-elles aboutir ?

L’idée est de les aider à concrétiser leurs projets. Nous travaillons actuellement avec des « changemakers » du Brésil, qui souhaitent créer une extension au navigateur de Google Map pour réduire notre empreinte carbone sur le net. Même si tout est loin d’être rose, nous le voyons tous les jours : l’esprit humain est impressionnant. C’est en rassemblant les idées positives qui en émergent que nous parviendrons à offrir une véritable alternative aux façons de gouverner actuelles.
 
Propos recueillis par Lara Charmeil
Journaliste à We Demain
@LaraCharmeil

 
 

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