Dioxine et pesticides dans les tampons ? 5 alternatives écolo

Elles promettent de « recueillir le flux au plus près de votre anatomie ». Le tout à grands renforts de barrières protectrices anti-odeur, parfumées à l’aloe vera ou au voile « si doux » qu’il vous confère un « parfait confort ». Mais avez-vous remarqué que leurs ingrédients ne sont jamais mentionnés sur les notices d’utilisation ?
 
Si une fois par mois, les protections hygiéniques sont un accessoire indispensable pour environ la moitié de la population mondiale, elles représentent évidemment un énorme marché planétaire. Mais les acteurs de cette industrie, dont les plus importants sont les marques Procter & Gamble ou Johnson & Johnson, n’ont, à ce jour, aucune obligation de révéler les composants de ces aides hygiéniques.

C’est pour les connaître enfin qu’aux États-Unis, la sénatrice Carolyn Maloney, surnommée « Mrs Tampon « , défend depuis peu le projet de loi Robin Danielson  – du nom d’une femme supposément décédée à la suite de la toxicité de ces composants. L’élue entend ainsi faire en sorte que les industriels révèlent leurs « recettes ».

« Les lobbys autour de cette industrie sont tellement importants que les ingrédients réels continuent à être cachés, ce pourquoi la plupart des femmes ignorent de quoi sont composées leurs protections, nous explique Nelly Lapierre, chef de produits des magasins biologiques Euro-Nat, spécialisée dans la commercialisation de produits hygiéniques organiques, Elles pensent qu’il s’agit uniquement de coton. »  

Mais plus qu’une simple mèche de coton, une protection hygiénique est un ensemble complexe de fibres naturelles et synthétiques, dont le coeur absorbant mélange coton, viscose et polymères, ainsi qu’une poudre absorbante. 

POLLUANTS NOCIFS ET DIOXINE
 
Ce même coton est blanchi par oxygénation, avec des azurants chimiques et, la plupart du temps, du chlore. C’est là que résiderait, selon Nelly Lapierre, l’un des risques pour le corps. Car quand le chlore entre en contact avec la viscose, ils formeraient une substance toxique, la dioxine, un polluant nocif, même à petites doses. Il pénètrerait en effet dans les muqueuses et finirait par s’accumuler dans le corps des femmes.

Contrairement à la composition des ingrédients, les fabricants sont tenus de préciser les taux d’absorption offerts par leurs produits. Mais lorsque l’on analyse la poudre chargée de « booster » cette absorption et la retenue du sang, elle se révèle composée d’un condensé d’amidon et de produits chimiques, qui serait lui aussi nocif. 

« En attendant d’obtenir des réponses scientifiques, il ne faut pas diaboliser les protections conventionnelles, estime Yukiko Peaupardin, gynécologue obstétricienne à Strasbourg, mais il est important d’alerter les patientes sur le risque d’apparitions de mycoses et de démangeaisons, favorisés par des ingrédients qui déséquilibrent la flore vaginale. » Quant aux alternatives plus respectueuses du corps, elles commencent à susciter l’intérêt du monde scientifique, mais restent « marginales », d’après la spécialiste.

11 000 TAMPONS
 
Mais le biotope féminin n’est pas le seul territoire menacé. L’environnement l’est aussi, car la production des protections hygiéniques requiert un coûteux processus de fabrication, qui nécessite l’utilisation de nombreuses ressources naturelles et de pesticides. Ne serait-ce qu’à travers la culture du coton.

Autre donnée clef : le temps nécessaire à une serviette ou à un tampon pour se dégrader. Le second met plus d’un siècle de plus à se décomposer. C’est la raison pour laquelle les tampons ne sont jamais recyclés : une fois jetés à la poubelle, ils sont généralement enfouis ou brûlés. Une menace pour la planète, lorsque l’on sait que dans sa vie, une femme utilise en moyenne 11 000 tampons.

« Désintoxiquer les vagins »

Ces risques sanitaires et environnementaux sont de plus en plus connus de l’opinion publique. Sur le web, communautés, plateformes d’informations et campagnes en faveur d’une protection menstruelle plus écologique se multiplient. C’est le cas, entre autres, de Campaign for Safe Cosmetics (Campagne pour des cosmétiques sains), un collectif d’ONG américaines engagées pour la santé et l’environnement, qui milite pour des produits plus « sûrs » :

« Nous assistons à un manque cruel de données sur les effets sanitaires de l’utilisation récurrente des tampons classiques, relève ce collectif. La bonne nouvelle, c’est que nous pouvons passer à d’autres produits meilleurs pour l’environnement et pour nos corps. »

 
Ces ONG ne sont pas les seules à encourager les femmes à se protéger différemment. Le collectif Women’s Voices for the Earth (Voix de femmes pour la Terre) somme les marques Tampax et Always de « désintoxiquer nos vagins » (« detox the Box »). On peut aussi citer une pétition sur Change.org, qui s’attaque à trois problématiques en même temps. La plateforme de pétitions en ligne demande aux entreprises de révéler les substances contenues dans les produits, aux consommateurs de lutter pour plus de transparence et aux gouvernements de contribuer à réduire les prix élevés des protections hygiéniques.
 
Des arguments qui commencent à être entendus par les pouvoirs publics, mais que les multinationales concernées, pour l’instant, ignorent. En attendant, des alternatives plus écologiques existent. En voici cinq, sélectionnées par We Demain.

La coupe menstruelle

C’est la plus célèbre alternative au tampon conventionnel. Fabriquée en silicone de qualité médicale non allergène (voire, en latex ou en TPE), elle permet de récolter le flux menstruel, le tout sans choc toxique. Ce petit récipient en forme de cloche et aux bords arrondis est introduit dans le vagin à la main ; son retrait est facilité par une petite tige. Généralement assez souple et confortable, il permet d’être protégée entre quatre et douze heures de suite, selon les marques. Reste à laver la coupe à l’eau claire pour pouvoir la réutiliser, puis à l’eau chaude, avant de la ranger jusqu’au mois suivant. 

AVANTAGES : Avec une durée de vie de dix ans en moyenne et un prix qui varie entre dix et trente euros, elle est nettement plus économique que ses concurrents traditionnels. Sachant qu’une boîte de tampons coûte en moyenne trois euros, une boîte de serviettes quatre euros, son achat est amorti en six mois. De plus, la coupe se décline en différents modèles et tailles.
 
INCONVENIENTS : Pour les femmes peu à l’aise avec leurs corps, sa mise en place peut nécessiter un peu d’entraînement dans un premier temps. L’absence de lieu permettant de la laver discrètement peut poser problème.
 

    Les patrons de serviettes hygiéniques lavables

    Avis aux adeptes du Do It Yourself. Plusieurs sites web proposent en libre-accès des patrons de serviettes hygiéniques lavables, tandis que des start-up vendent des kits de tissus prêts à assembler soi-même. Après utilisation, il suffit de les laver comme n’importe quel vêtement, à l’eau ou en machine à laver. 

    AVANTAGES : Confortables, ces tissus épousent les formes de chacune. On peut les coudre facilement et les superposer sur plusieurs couches, en fonction du flux. On peut en choisir les couleurs, les motifs, et même les fabriquer à partir de matériaux recyclés. De plus, ces tissus sont constitués de fibres naturelles et imper-respirantes, ce qui permet de limiter les odeurs.

    INCONVENIENTS : La conception de ces serviettes implique de posséder une machine à coudre basique et de savoir s’en servir. Après utilisation, il faut les tremper dans un peu d’eau avant de les passer à la machine avec une lessive écologique.

     

    Les tampons et serviettes bio, ou en cellulose végétale

    Blanchies à l’eau oxygénée et non au chlore, ces produits très écologiques sont sur le marché depuis quelques temps déjà, mais ne sont commercialisés par que par quelques marques.

    AVANTAGES : Hypoallergéniques et biodégradables, ils fonctionnent comme leurs concurrents conventionnels. Ils peuvent être à base de coton biologique ou encore de cellulose végétale, garantie sans paraben, chlore et parfum.

    INCONVENIENTS : Leur prix : comptez six euros pour une boîte de ces tampons ou serviettes, vendus sur le web ou en magasin bio.

     

    Les éponges menstruelles

    Récoltées en mer, lavées puis purifiées sans produit chimique, ces petites éponges s’insèrent dans le vagin après humidification. Elles se changent toutes les quatre heures en moyenne et peuvent également être gardées pendant un rapport sexuel. Après utilisation, il suffit de les laver à l’aide de quelques gouttes d’huiles essentielles et d’eau, puis de les faire sécher.

    AVANTAGES : Leur prix : une éponge de mer coûte, en moyenne, entre quatre et sept euros. Il est possible d’en porter deux à la fois pour plus de confort. Humidifiée, elle présente également l’avantage de ne pas dessécher la flore vaginale.

    INCONVENIENTS : Sans l’avis préalable d’un gynécologue, cette solution est déconseillée aux femmes portant un stérilet, l’éponge étant susceptible de le déplacer. La durée de vie de cette alternative au tampon est plus courte que celle d’une coupe menstruelle : il est conseillé de la remplacer tous les six à dix mois.

     

    Le « free flow instinct »

    Attention, alternative radicale ! Aussi appelée « flux intuitif libre », cette option consiste tout simplement à arrêter de se protéger pendant les règles. À rebours des us et coutumes, la technique – qui reste aléatoire – permettrait de contenir son flux de la même façon que son urine et de le déverser uniquement quand on en ressent le besoin.

    Au préalable, le « free flow instinct » nécessite de se muscler le périnée, afin de pouvoir le contracter à l’envi. Les adeptes de cette pratique prodiguent deux conseils : se protéger lors des premières tentatives et penser à se délester quatre à cinq fois par jour.

    Lara Charmeil
    Journaliste à We Demain
    @LaraCharmeil

    Vous avez testé (ou adopté) l’une de ces alternatives au tampon et à la serviette traditionnels ?  Vous en connaissez d’autres ? Rendez-vous dans l’espace commentaires (ci-dessous) pour livrer vos conseils et retours d’expériences.
     

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