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Accord de Paris : quel bilan cinq ans après pour la COP21 ?

Il y a un peu plus de cinq ans, la communauté internationale a pris l’engagement de mettre tout en œuvre pour limiter le réchauffement climatique. Avec l’Accord de Paris, le but est de conserver la hausse « nettement » en dessous de +2 °C. Mais l’objectif ultime est de rester dans la limite d’une hausse de +1,5 °C, par rapport à l’ère préindustrielle. De belles paroles mais des engagements aux effets limités.

Fin 2020, Antonio Guterres, le secrétaire général de l’ONU, a appelé le monde à « déclarer l’état d’urgence climatique » et à prendre des mesures drastiques dans la lutte contre le réchauffement climatique. Alors qu’une nouvelle conférence Climat (COP26) doit se tenir en novembre prochain à Glasgow, l’Accord de Paris sur le climat n’a-t-il vraiment eu aucun effet ou presque ?

12 novembre 2015 : l’Accord de Paris est ratifié

L’Accord de Paris, adopté le 12 novembre 2015, est entré en vigueur le 4 novembre 2016. Malgré les efforts de certains pays, la température moyenne de la planète continue de s’élever. Certes, le recours aux énergies renouvelables progresse mais les énergies fossiles sont encore beaucoup trop sollicitées. Les émissions liées restent bien au-dessus des niveaux souhaités pour ne pas nourrir chaque année un peu plus le dérèglement climatique.

De son côté, Antonio Guterres a jugé que les engagements pris étaient « insuffisants ». Il a dénoncé des promesses de réduction d’émissions de gaz à effet de serre (GES) « non respectées ». Le retrait momentané des États-Unis de l’Accord de Paris sous l’ère Trump est dans tous les esprits. Mais d’autres pays sont également pointés du doigt.

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Les énergies fossiles toujours plus sollicitées par le G20

Certains pays du G20, à eux seuls émetteurs de 80 % du CO2 rejeté, n’ont pas réduit le recours aux énergies fossiles. Bien au contraire. En 2019, un rapport – le Brown to Green Report – soulignait que neuf pays avaient accru leur production de matières premières fossiles (gaz, pétrole et charbon) depuis la COP21. Ces pays sont l’Australie, le Canada, la Chine, l’Inde, l’Indonésie, la Russie, l’Afrique du sud, la Corée du sud et les USA.

D’autres Etats n’ont toujours pas ratifié l’Accord de Paris. Parmi eux, les plus gros extracteurs de pétrole comme l’Iran, la Libye ou encore la Turquie. Antonio Guterres a insisté, fin 2020, sur la nécessité de « réduire les émissions mondiales de 45 % d’ici à 2030 par rapport à 2010 ».

Le vrai hic avec les 29 articles que contient l’Accord de Paris, c’est l’absence de véritable contrôle régulier. Surtout, aucune sanction n’est prévue en cas de non respect des promesses annoncées.

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Europe : des efforts certains mais jugés insuffisants

Depuis fin 2015, des pays ont cependant mis en œuvre des mesures concrètes pour tenir leurs engagements. Ainsi, dès le le 2 novembre 2016, l’Union européenne a augmenté sa contribution au financement international de l’action climatique. Elle a également mené des actions concrètes pour réduire ses émissions de GES. Déjà, entre 1990 et 2017, les émissions de CO2 ont été réduites de 23 % en Europe. Elle fait figure de « bon élève » sur la scène internationale.

En avril 2021, en amont de la COP26, les 27 membres de l’Union européenne ont adopté un nouvel objectif commun. Ils s’engagent à une réduction des émissions de GES d' »au moins » 55 % d’ici 2030 (par rapport à 1990). Marie Toussaint, eurodéputée Europe Écologie-Les Verts, interrogée par FranceInfo, a dénoncé un chiffre gonflé par des tours de passe-passe. Il est « en réalité [question] d’un engagement de réduire de seulement 52,8 % les émissions de gaz à effet de serre d’ici à 2030 avec un jeu comptable. » En effet, ces 55 % prennent en compte l’absorption hypothétique du dioxyde de carbone par les sols et les forêts… A noter que l’Europe a réaffirmé son objectif de neutralité carbone en 2050.

Chine, Japon, USA… de nouveaux engagements avant la COP26

L’Europe n’est pas la seule à annoncer vouloir faire des efforts à quelques mois de la COP26. Quelque 75 pays ont déjà présenté un nouveau plan pour endiguer les émissions de gaz à effet de serre. La Chine, premier pollueur au monde, a annoncé en septembre 2020 viser la neutralité carbone pour 2060. Mais le président Xi Jinping ne s’est pas arrêté là et a fait de nouvelles annonces en décembre dernier. « D’ici 2030, nous allons réduire notre intensité carbone de plus de 65 %. Augmenter la part des énergies non fossiles à 25 % de la consommation d’énergie primaire – contre 15,3 % à fin 2019. Augmenter le stock forestier de 6 milliards de mètres cubes. Et porter la capacité totale installée d’énergie renouvelable à plus de 1 200 GW, par rapport à 2005. »

Le Japon, cinquième pays émetteur de CO2 dans le monde, a presque doublé ses objectifs à horizon 2030. Au lieu d’un engagement de -26 %, le pays a annoncé s’engager pour une baisse de 46 % d’ici 2030 par rapport aux niveaux de 2013. Le pays souffre d’une forte dépendance aux énergies fossiles (gaz naturel et charbon notamment). Il conserve aussi une défiance face au nucléaire (renforcée par la catastrophe de Fukushima en 2011). La neutralité carbone est espérée pour 2050.

Aux États-Unis, enfin, les changements climatiques sont revenus un vrai sujet de préoccupation depuis l’arrivée au pouvoir de Joe Biden. Le président démocrate a annoncé fin avril dernier presque doubler les objectifs américains qui passent d’une réduction des émissions de GES de 26-28 % à une baisse de 50-52 % d’ici 2030 par rapport à 2005. La neutralité carbone de l’économie américaine est promise pour 2050.

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