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Grands fonds marins : la France en première ligne

La France possède la plus grande surface mondiale de grands fonds marins au sein de sa ZEE. Elle jouera un rôle déterminant dans l’exploration des abysses et – à terme – leur exploitation.

Le 03/06/2022 par Joséphine Maunier
Grands fonds marins
Les grands fonds marins recouvrent 62% de la surface de la planète. Photo : K_Notgeil / Pixabay.
Les grands fonds marins recouvrent 62% de la surface de la planète. Photo : K_Notgeil / Pixabay.

Les abysses n’ont pas fini de révéler leurs secrets. Et la France, qui occupe la première place mondiale en termes de surface de grands fonds marins, va jouer un rôle essentiel dans leur exploration. Le cabinet de conseil en stratégie Advention, qui a mené des travaux pour la Fondation de la Mer, révèle que 93 % de la Zone économique exclusive (ZEE) française est située sous mille mètres de profondeur. Cela représente une surface de 9,5 millions de kilomètres carrés.

Un chiffre inédit qui place l’Hexagone au coeur du débat de l’exploration des grands fonds. La stratégie française, définie dans le cadre du plan France 2030, est de privilégier l’exploration scientifique pour apprendre à connaître les profondeurs marines. Alban Neveux, directeur général du groupe Advention Business Partners, parle d’une “terra incognita, dont nous avons tout à découvrir”.

88,1 % du plancher océanique appartient à la zone des grands fonds marins, à 1000 mètres ou plus de profondeur.

Explorer les fonds marins pour mieux les protéger

Pour Sabine Roux de Bézieux, présidente de la Fondation de la Mer, il est primordial de créer “des zones sanctuaires avec un haut degré de protection dans les lieux les plus sensibles”.  Objectif final : limiter le plus possible les dégâts irréversibles. Une prémisse en faveur de la protection de la riche biodiversité supposée qu’abritent les grands fonds. De plus, des corridors biologiques sous-marins devraient être mis en place pour favoriser la protection de la biodiversité.

Dans ces ZEE, la présidente estime que seule l’exploration scientifique devrait être autorisée. Elle doit avoir pour seul but de mieux connaître la vie et le fonctionnement des abysses. « La science doit pouvoir aller partout, mais pas n’importe comment. » Selon elle, “une vraie course contre la montre” se joue au niveau mondial. En effet, tous les pays n’ont pas la même approche quant à l’exploration des grands fonds marins. Un investissement massif au service de la connaissance est nécessaire : “N’allons pas les détruire avant de les avoir découverts”.

Position actuelle des pays sur l’exploitation des fonds marins. Graphique : Fondation de la Mer – 2022.

90 % de l’excès de chaleur produit par l’effet de serre est absorbé par l’océan et 43 % par les grands fonds marins (au-delà de 700 mètres)

Nature Climate Change.

L’exploitation des grands fonds, objet de toutes les convoitises

L’exploration des grands fonds marins favorisera, certes, la protection de la biodiversité et l’émergence de nouvelles connaissances scientifiques. Mais la crainte est qu’elle permette surtout de localiser et quantifier les métaux et terres rares présents dans les profondeurs. Un espoir et une convoitise aussi bien pour les États que pour les industriels. Devenus essentiels pour répondre à nos besoins technologiques, un vraie guerre aux terres rares est en marche.

Sous l’enjeu de la protection et de la connaissance de la biodiversité abyssale, se cache un enjeu stratégique pour la France. Notamment en raison d’intérêts économiques, technologiques et diplomatiques notables à la croisée de multiples disciplines. La Fondation de la Mer, dans son rôle de modérateur au service des océans, recommande ainsi que la France s’associe aux initiatives en faveur d’une exploration conjointe et conditionnée. Son rapport sur le sujet suggère de se joindre « notamment au projet Seabed 2030 de la Nippon Foundation« .

Les grands fonds marins représentent 62 % de la surface de planète.

Outre la nécessité de mener une politique de préservation et de surveillance des espaces stratégiques sous juridiction française, la Fondation de la Mer préconise de garantir le financement des projets de recherche annoncés par le dernier CiMer (Comité interministériel de la mer) qui s’est tenu en mars 2022. Elle suggère aussi de prioriser les domaines d’investissement. Et d’axer notre politique sur des technologies de récupération et de recyclage des métaux rares. « Le modèle actuel d’exploitation des ressources est obsolète et ne peut pas être reproductible« , conclut Sabine Roux de Bézieux.

Au moins cinq zones sous-marines distinctes sont définies
par leur profondeur et par les caractéristiques de l’environnement qu’elles abritent. Illustration : Fondation de la Mer – 2022.

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