Partager la publication "Ce qu’il faut savoir sur la primaire écologiste"
Dernière ligne droite avant le scrutin. Le premier tour de la primaire écologiste aura lieu du 16 au 19 septembre. D’ici là, plusieurs questions se posent. D’abord, qui sera le vainqueur, celui qui représentera les écologistes à la présidentielle 2022 parmi les cinq candidats en lice. Delphine Batho, Jean-Marc Governatori, Yannick Jadot, Éric Piolle ou Sandrine Rousseau ?
Ensuite, quel sera le taux de participation ? Lundi 6 septembre, plus de 50 000 personnes étaient inscrites. Un record par rapport aux précédentes primaires des Verts (17 000 inscrits en 2016, 32 000 en 2012). Mais pas un raz-de-marée non plus pour un mouvement qui entend désormais jouer un premier rôle à gauche. Certains candidats souffrent encore d’un manque de notoriété. Fin août, selon un sondage YouGov/L’Internaute, 43 % des Français déclaraient n’avoir “jamais entendu parler de l’un d’entre eux”.
Le premier des trois débats publics, organisé dimanche 5 septembre par France Inter, France Télévisions et Le Monde, semble avoir accéléré la mobilisation. Restent donc deux débats – mercredi à 20h45 sur LCI, puis vendredi à 19h30 sur le site de Médiapart –, pour mieux faire connaître les candidats à cette primaire écologiste. Et ainsi consolider leur légitimité à la présidentielle de 2022.
D’ici là, voici quelques points essentiels pour mieux comprendre ce scrutin.
Qui peut voter à la primaire écologiste ?
La primaire du pôle écologiste (qui réunit Europe Écologie les Verts, Génération Écologie, Génération.s, le Mouvement des progressistes et Cap écologie) est ouverte à tous, à condition d’avoir au moins 16 ans. Il faut pour cela s’inscrire au préalable sur le site Internet dédié. S’acquitter de la somme de 2 euros (s’il l’on n’est pas adhérent de l’un des cinq partis organisateurs) et signer une “Charte de valeurs des écologistes”.
Quand et où a lieu le scrutin ?
La date limite des inscriptions à la primaire écologiste a été fixée au 12 septembre. Les participants ne désigneront pas leur champion dans un bureau de vote, mais en ligne, sur le même site que pour les inscriptions. Une procédure simplifiée, et économique, devant faciliter la participation. Le premier tour aura lieu du 16 au 19 septembre. Le second du 25 au 28 septembre.
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Qui sont les candidats à la primaire écologiste ?
Cinq candidats sont déclarés. Fait marquant : lors de leur premier débat, tous ont échangé cordialement, sans s’attaquer frontalement, contrairement à ce qui peut s’observer lors d’autres élections internes. Pour convaincre les sympathisants écologistes, les prétendants ont plutôt misé sur les spécificités de leur programme, que voici, par ordre de déclaration de candidature.
• Sandrine Rousseau, la féministe radicale
L’ancienne numéro 2 d’EELV a annoncé la première sa candidature, le 26 octobre 2020. Cette économiste de l’environnement, qui a aussi été vice-présidente du conseil régional du Nord-Pas-de-Calais, est surtout connue pour ses positions écoféministes. En 2016, elle fait partie des élus qui dénoncent les agressions sexuelles commises par l’ex-député écologiste Denis Baupin. Elle se revendique d’ailleurs comme l’une des pionnières du mouvement #MeToo. Après cela, elle met sa carrière politique en pause, avant d’adhérer à nouveau au parti en 2020.
Sandrine Rousseau défend par ailleurs “un changement de modèle radical”, en proposant notamment la création d’un “revenu d’existence de 850 euros, versé à partir de 18 ans sous conditions de ressources”. Ou encore la reprise intégrale des propositions de la Convention citoyenne pour le climat. Son point fort : elle peut compter sur l’appui des réseaux féministes. Son point faible : sa radicalité, notamment féministe, qui peut susciter un certain agacement et l’écarte de l’électorat écolo social-démocrate.
• Éric Piolle, le maire “des convergences”
Ancien ingénieur informatique et dirigeant chez Hewlett-Packard, Éric Piolle a été réélu maire de Grenoble en 2020, à la faveur d’un large rassemblement des écologistes, de la gauche et de la société civile. Un rassemblement qu’il assure être en mesure de mener au niveau national.
Sur le fond, Éric Piolle se dit “l’allié des luttes d’aujourd’hui”. Les marches pour le climat, mais aussi le féminisme ou le combat social et démocratique des Gilets jaunes. Concrètement, l’édile grenoblois prévoit notamment l’adoption d’une sorte d‘impôt sur la fortune climatique pour faire payer les plus gros pollueurs, la hausse des bas salaires ou une réforme constitutionnelle et la mise en place du référendum d’initiative citoyenne (RIC). Des propositions avec lesquelles il espère fédérer « l’arc humaniste », répétant : « Je refuse de fracturer, je veux créer des convergences ». Son point faible : l’édile de Grenoble n’est pas encore très connu du grand public.
• Yannick Jadot, l’Européen pragmatique
L’ancien directeur des campagnes de Greenpeace France est souvent présenté comme le favori du scrutin. Son avantage par rapport à ses concurrents : il est déjà assez connu du grand public. Eurodéputé depuis 2009, il peut notamment se vanter d’être arrivé en 3e position aux Européennes de 2019, derrière LREM et le RN, avec 13,5 % des voix. En 2016, il avait aussi remporté la primaire écologiste, avant de se ranger derrière la candidature de Benoît Hamon.
Celui qui aime à se poser en “rassembleur”, porteur “d’une écologie majoritaire”, cherche à séduire l’électorat modéré, notamment les déçus du macronisme. Il s’est d’ailleurs dit par le passé favorable à l’économie de marché. Il a aussi soutenu la manifestation de policiers en mai 2021. Quitte à se mettre à dos les écolos plus radicaux, le qualifiant de « Vert allemand » (qui acceptent de s’allier à la droite).
Depuis, Yannick Jadot essaie d’atténuer cette image. Il propose notamment un plan de relance écologique et sociale de 50 milliards d’euros, de sortir la France de l’élevage industriel ou des traités de libre-échange, l’avènement d’un revenu citoyen dès 18 ans, l’accueil « en dignité d’Afghanes et d’Afghans », ou encore « une lutte contre les lobbies dans les ministères ».
• Jean-Marc Governatori, l’outsider centriste
Le coprésident du parti Cap écologie (avec Corinne Lepage) est un peu l’invité surprise de cette primaire. Candidat malheureux aux dernières régionales en Provence-Alpes-Côte d’Azur (5,28 % des voix), l’entrepreneur niçois doit sa participation à la primaire écologiste à une décision de justice. Les organisateurs avaient dans un premier temps décidé de l’exclure, car il s’opposait à l’idée de soutenir inconditionnellement le vainqueur du scrutin.
Depuis, celui qui promeut une écologie « au centre » fait un peu cavalier seul. L’ancien membre de l’UDF considère les autres candidats comme des représentants de l’écologie « de gauche », pas en mesure de séduire l’électorat français.
• Delphine Batho, l’ex-ministre décroissante
Ministre de l’Écologie sous François Hollande [de juin 2012 à juillet 2013], Delphine Batho a une certaine expérience politique. Elle commence à militer dès le collège dans un syndicat étudiant [FIDL], puis adhère au parti socialiste dans les années 1990. Celle qui a été vice-présidente de SOS Racisme (de 1992 à 1998) quitte le PS en 2018 pour prendre la tête du mouvement Génération Écologie. Elle est aussi députée des Deux-Sèvres.
Sur le fond, elle se distingue en faisant de la décroissance le leitomotiv de sa campagne, seul chemin possible selon elle face à l’accélération des catastrophes climatiques. La France doit abandonner « l’obsession pour la croissance du PIB [pour] désormais baser ses politiques publiques sur d’autres objectifs : la pleine santé, la lutte contre la pauvreté, la régénération de la biodiversité […]”, a-t-elle asséné lors du premier débat. Elle se réclame aussi de l’écoféminisme ou de l’écologie intégrale.
Sa force : connue pour son franc-parler, Delphine Batho est aussi très agile dans les débats politiques. Seulement la décroissance ne fait pas l’unanimité dans les rangs écolos EELV.
Les candidats ont encore deux débats pour développer leurs propositions et convaincre les militants écologistes avant le scrutin du 16 septembre prochain.