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Il vit perché dans sa cabane en forêt, la justice lui demande de la détruire

Le 09/04/2019 par Alice Pouyat
(Crédit : Manuel-F-O/iStock/Thinkstock)
(Crédit : Manuel-F-O/iStock/Thinkstock)

Un rêve d’enfant, un rêve perché et écolo, peut-il faire plier le droit ? Cette question est celle que pose l’histoire de Xavier Marmier, 48 ans, installé dans une cabane en pleine nature, dont la justice vient d’exiger la destruction.

Une histoire pleine de rebondissements. Tout commence en 2008 quand  Xavier Marmier achète un hectare de forêt entre Cléron et Amondans dans le Doubs, à 25 km au sud de Besançon. Celui qui se décrit comme « un enfant de la campagne »  a toujours grimpé aux arbres et a d’ailleurs fait de cette passion un métier. Xavier est élagueur et monteur de chapiteau pour le Cirque Plume. Après une séparation amoureuse, et en quête de « paix intérieure », son envie de vivre au milieu de la forêt grandit. Sur son terrain, il construit la cabane de ses rêves. En 2011, après trois ans de travaux, il peut enfin s’y installer.
 
Posée sur un plateau à sept mètres de haut, la cabane mesure 40 m2, auxquels s’ajoutent deux cabanons au sol qui servent de bibliothèque et de remise. 
 
Ici, dans la canopée, l’élagueur se dit « heureux ». La vie est certes spartiate, il faut aller chercher de l’eau à la fontaine et la chauffer pour se laver au baquet, couper et monter du bois. Mais la lumière s’invite par les grandes baies vitrées. Xavier siffle le matin avec les oiseaux. Il s’endort près des étoiles. Dans cette maison attachée à un arbre, l’élagueur a trouvé « son axe ». Les nombreux visiteurs qu’il reçoit dans sa cabane y dorment comme lui « d’un sommeil très profond ».

Une cabane dans une zone Natura 2000

Seulement voilà : Xavier n’a pas demandé de permis de construire sur ce terrain qui lui appartient. Au début du projet, la maire de Cléron, Chantal Guillaume, le prévient des risques qu’il encourt mais ne s’y oppose pas, voyant plutôt d’un bon oeil cette drôle de construction écolo.
 
En 2014, changement d’équipe municipale : le nouveau maire Alain Galfione exige de Xavier un permis de construire… qui lui est refusé. En juillet 2016, une décision de justice du Tribunal de grande instance donne toutefois raison au propriétaire de la cabane. En avril 2018, le tribunal administratif condamne même en première instance la commune de Cléron à lui verser 1 000 euros.

Mais la municipalité ne lâche pas. Elle dépose un recours et, le 26 mars dernier, la Cour d’appel infirme la décision de première instance : Xavier Marmier a six mois pour abattre sa cabane, avec une amende de 100 euros par jour supplémentaire. Il doit en sus payer 3 000 euros à la commune de Cléron pour les frais de justice…
 
Le fondement de cette décision : le site de la vallée de la Loue est classé en zone Natura 2000 « qui doit rester libre de toute construction et, qui en outre, est répertorié en aléa très fort de risque de glissements de terrain », précise l’arrêt du 26 mars 2019.

Habitat écologique

Un coup de hache pour Xavier Marmier. Celui qui vit en symbiose avec la nature, se chauffe avec un poêle à bois, utilise des toilettes sèches et un panneau solaire, ne voit pas en quoi il menace l’environnement. Pourquoi sanctionner un mode de vie bien plus sobre et écolo que celui de ses voisins urbains ?

Le référent local de Natura 2000 venu lui rendre visite ne verrait pas non plus d’inconvénient à sa présence. Quant aux risques de « glissement de terrain », Xavier Marmier rappelle que le village bétonné de Cléron a été inondé l’an passé lors d’une tempête à laquelle sa cabane, elle, a résisté. « Le terrain est retenu par les bois que j’entretiens et je n’ai pas l’intention de les réduire à blanc ! »
 
Mais pour l’avocate de la mairie du village, c’est une question de principe. « Il y a des tas de gens qui attendent de régulariser un bout d’abri de jardin ou d’abri pour des chevaux. Si la commune laisse passer cette ‘jurisprudence Marmier’, on en aura d’autres derrière », a-t-elle expliqué à France 3 Région.
 
« Soyons réalistes, combien de personnes sont vraiment prêtes à vivre comme moi en Robinson sans grand confort dans la forêt ? « , demande Xavier Marmier, qui a décidé de se pourvoir en cassation.
 
Non violent, le Franc-Comtois dit toutefois qu’il se pliera à la décision de la justice si elle est confirmée. « Je ne suis pas jusqu’au-boutiste, s’il faut détruire la cabane, cela me fera mal au ventre mais je le ferais… »
 
En attendant, Xavier Marmier a lancé une pétition qui a déjà réuni 20 000 signatures et un SOS vidéo sur sa page Facebook « Cabane en danger », visionné plus de 110 000 fois. Un appel, dit-il, à soutenir son combat et plus largement à défendre les habitats écologiques.

Qui gagnera dans ce combat ? L’épilogue reste comme la cabane de Xavier Marmier, en suspens.

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