Des serveurs informatiques pour chauffer l’eau des piscines municipales

Et si demain, l’eau de votre piscine municipale était chauffée par un serveur informatique ? L’idée n’est pas si farfelue à en croire Benjamin Laplane, cofondateur, avec Thomas Garnier, de la start-up Defab. Près du bassin de la Villette, à Paris, où est exposé son prototype d’unité de récupération de la chaleur au grand public, en marge de la COP21, le trentenaire explique :
 

« Nous avons voulu monter un modèle en rupture avec celui des data center traditionnels, qui nécessitent d’énormes frais de construction et de refroidissement. »

Le modèle de Defab mélange efficacité énergétique et informatique, deux secteurs qui s’opposent traditionnellement. Le principe ? Durant une période limitée et définie à l’avance, les serveurs de la start-up hébergent et traitent les données de leurs clients, principalement des entreprises de simulation numérique collaborant avec des industriels.

Fabriqués et installés par Defab, les premiers modèles de ces serveurs sont actuellement en phase de test dans plusieurs collectivités locales, en partenariat avec plusieurs entreprises, dont la start-up ne souhaite pas révéler les noms pour l’instant. Salles de sport, piscines et hôtels font partie des bâtiments susceptibles d’être équipés de ces dispositifs, qui permettent de chauffer leur système d’alimentation en eau grâce à l’énergie dégagée par les serveurs informatiques.

Une facture de chauffage plus légère pour les collectivités

« Pour les collectivités partenaires, c’est tout bénef’, affirme Benjamin Laplane, nous leur remboursons entièrement le coût de l’énergie qui fait fonctionner les serveurs ». En clair, une facture de chauffage nulle pour les collectivités dont l’eau est intégralement chauffée par ce système. Un gain potentiel qui a « attisé la curiosité de plusieurs espaces municipaux, dont certains de la mairie de Paris », se contente de détailler Benjamin Laplane.

Comment la start-up exploite-t-elle l’énergie dégagée par les serveurs ? Grâce à un ballon d’eau chaude spécifique, dit « thermodynamique », semblable à une pompe à chaleur. Ce système permet à la fois de refroidir les serveurs, tout en récupérant l’énergie traditionnellement gaspillée.

Et les données stockées, que deviennent-elles ? L’entreprise est formelle : les collectivités qui bénéficient de ce nouveau type de chauffage n’y ont pas accès. « Nous nous engageons à ne jamais révéler les informations de nos clients », assure Benjamin Laplane, précisant que ces dernières sont « fracturées » et réparties entre différents serveurs, et donc impossibles à pirater.

Et de préciser : « Contrairement  aux usagers des clouds de Google ou Apple, nos clients peuvent également décider des territoires sur lesquels sont stockées et traitées leurs données : départements, régions ou pays, et connaître la législation à laquelle elles seront soumises », ajoute-t-il. À noter que la start-up ne compte pas délocaliser ces serveurs à l’étranger avant 2017.

« Rendre éco-responsables des systèmes énergivores »

Depuis son lancement en 2014, la start-up s’est essentiellement financée par les fonds personnels de ses créateurs et des subventions de l’Union européenne, notamment par le biais du programme européen KIC Climat. Les deux patrons et leurs quatre salariés attendent à présent les résultats d’une levée de fonds, « censés tomber début 2016 ». Leur objectif : recueillir de 500 000 à un million d’euros.

Pour grandir et embaucher une vingtaine de salariés supplémentaires, les fondateurs de Defab espèrent profiter de la visibilité offerte par plusieurs récompenses, comme le premier prix de l’Experimentation Day (organisé par Cap Digital et RDA), ou encore ceux des concours Start in Paris et du Blend Start-up Contest, qui a eu lieu à Lyon les 28 et 29 octobre. 

À l’avenir, Defab gage que son dispositif lui permettra de proposer des prix  « jusqu’à 50 % moins élevés que ceux du marché » aux entreprises clientes, et ainsi, de « rendre éco-responsable des systèmes informatiques réputés ultra-énergivores »

Un concept prometteur, lorsque l’on sait que les data center du grand Paris pourraient consommer autant d’énergie qu’une ville d’un million d’habitants en 2030. Et plus largement, que 8,6 millions de centre de données devraient être en service dans dans le monde… dès 2017. 

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