Ralentir  > Faire rimer parentalité et sobriété, un vrai défi… mais rien d’impossible

Written by 7 h 55 min Ralentir, Societe-Economie

Faire rimer parentalité et sobriété, un vrai défi… mais rien d’impossible

Les jeunes parents rivalisent d’astuces pour adopter des comportements plus sobres à l’arrivée du premier enfant. Une démarche qui s’accompagne parfois de culpabilité et d’une impression de ne pas en faire suffisamment.

Le 18/12/2022 par WeDemain
enfant
Les questions de l'écologie et de la sobriété émergent forcément avec les interrogations de la parentalité. Crédit : Pixabay.
Les questions de l'écologie et de la sobriété émergent forcément avec les interrogations de la parentalité. Crédit : Pixabay.

Couches, produits d’hygiène, équipements pour la chambre, alimentation : la liste de produits nécessaires à l’arrivée d’un enfant peut sembler interminable. Et pas toujours écolo. Pourtant, parentalité et sobriété ne sont pas forcément inconciliables. Attendre un enfant est un moment charnière. Une période qui pousse des femmes à revoir leur mode de vie et adopter de nouveaux comportements. Pour certaines, c’est même une révélation…

« Tout a commencé quand je suis tombée enceinte de mon premier enfant. Je suis passée au bio pour l’alimentation et les cosmétiques », raconte Monika, maman de deux enfants de 2 ans et 7 mois. Pour cette habitante de Montpellier, qui a arrêté son travail dans l’immobilier pour s’occuper de sa famille, « c’était important pour la santé du fœtus, la mienne et pour la planète ». Un comportement qui s’inscrit dans une tendance plus globale, comme le constate Mathilde Golla, co-auteure du Guide pour accueillir bébé en mode écolo* et journaliste spécialisée dans l’environnement.  « C’est un moment privilégié, parce que le mode de vie d’avant est complètement chamboulé, ce qui facilite une forme d’engagement plus fort. La volonté d’agir est décuplée par l’arrivée d’un enfant.« 

En 2022, WE DEMAIN a noué un partenariat avec le Centre de Formation et de Perfectionnement des Journalistes (CFPJ). Onze jeunes journalistes en contrat de professionnalisation ont travaillé à la production d’une série d’articles autour du thème de la sobriété. Retrouvez ici l’ensemble des sujets publiés sur la question.

Récup’ et achats d’occasion

Pour beaucoup de parents, le passage à la sobriété est synonyme d’achats de seconde main ou de récupération de dons. « Le textile étant une source de pollution importante, mon premier réflexe a été de collecter des vêtements pour ma fille pendant ma grossesse, souvent donnés par des amis« , relate Elodie, niçoise en reconversion et maman d’une fille de 6 mois.

Dans une démarche d’économie circulaire, elle va faire don à son tour des vêtements reçus pour habiller sa fille durant ses premiers mois. Pour les prochains habits, elle mise sur la solidarité du groupe Facebook Mamans de Nice. Il compte près de 900 membres qui discutent de questions autour de la parentalité et se partagent des bons plans. 

Pour le mobilier et les jouets, aussi, la seconde main permet de gagner en sobriété

Monika privilégie elle aussi l’occasion et la récup’. « J’ai équipé la chambre de mon fils uniquement avec des meubles de seconde main. Pareil pour les jouets et accessoires. » Ses adresses de prédilection : l’application Vinted, mais aussi les friperies ou Emmaüs. Une poussette et un siège auto sont les seuls achats neufs qu’elle a effectués, « pour des questions de sécurité. Ainsi qu’un matelas en fibre de coco, pour la qualité« .

Des achats d’occasion qui s’avèrent aussi bénéfiques pour la santé de l’enfant. « De nombreux rapports pointent les effets néfastes des perturbateurs endocriniens présents dans les composés organiques de meubles neufs. Il y en a moins dans l’ameublement de seconde main« , éclaire Mathilde Golla.

De beaux principes de parentalité parfois mis à mal par le quotidien…

Des convictions écologiques qui se heurtent parfois à la réalité de la parentalité. « Avant la naissance, j’avais de belles théories. Je voulais par exemple utiliser des couches lavables. Mais en pratique, c’est plus compliqué, déplore Floriane, infirmière à Toulouse et maman de jumeaux de 14 mois. Avec deux bébés, nous avons besoin d’une quantité folle de couches, assez pour remplir une machine par jour. » 

En effet, selon l’Agence nationale de sécurité sanitaire, de l’alimentation, de l’environnement et du travail (Anses), entre 3 800 et 4 800 couches sont nécessaires à un bébé avant l’apprentissage de la propreté. 

Éducation et écologie : « double culpabilité »

Pour certaines mères comme Floriane, privilégier l’option écologique s’ajoute à la charge mentale déjà importante avec un enfant en bas âge et dont beaucoup de femmes témoignent : « il y a une énorme pression sur les mères. On sort déjà de notre zone de confort, on est épuisées et on nous demande des efforts supplémentaires« , résume Monika, également autrice du blog Maman écolo

Une difficulté soulignée par Hélène Jalin, psychologue clinicienne qui réalise une thèse sur l’éco anxiété. « Avec la parentalité naît le désir de vouloir bien élever son enfant et donc la culpabilité. Vouloir, en plus, avoir un comportement exemplaire en matière d’écologie engendre une double culpabilité. » Dans ses travaux, la psychologue note cependant que les personnes qui ont des enfants sont en moyenne moins éco anxieuses que les autres.

Un constat qui peut paraître contre intuitif, mais qu’elle explique par deux hypothèses : « Quand on est parent, on a moins le temps de s’informer, de consommer des informations anxiogènes sur l’environnement. Par ailleurs, on a peut-être moins tendance à vouloir imaginer ses enfants dans un monde apocalyptique. C’est une stratégie de défense« 

De vraies inquiétudes quant à la qualité des cosmétiques pour bébé

Il n’empêche que la conscience environnementale s’est largement répandue chez les jeunes parents. « Je reçois beaucoup de questions en ce qui concerne les cosmétiques », constate Clara Branquart, sage-femme en libéral. Certains parents les fabriquent eux-mêmes, ce qui n’est pas contre indiqué, à condition que « la composition des produits ne soit pas allergène et respecte la peau sensible du bébé, avec un ph neutre », précise la professionnelle.

Des conseils qu’elle a elle-même intégré dans sa pratique : « Lors des consultations autour de la parentalité, on aborde de façon de plus en plus systématique ce qui est polluant dans l’alimentation et les cosmétiques. J’explique par exemple aux femmes que c’est très bon d’utiliser le lait maternel pour nettoyer les yeux, soigner la conjonctivite, ou l’acné du nourrisson« , illustre-t-elle. Des pratiques sobres et naturelles qui ont même fait leur entrée dans le cursus de sages-femmes, avec la formation Fees (Femmes enceintes, Environnement et Santé).

Sobriété : Noël, un moment toujours compliqué

Si certains parents sont convaincus de l’importance du changement de pratiques, ce n’est pas toujours le cas du reste de la famille : « Ce n’est pas gagné pour Noël, admet Monika. On a beau dire à nos proches que nous voulons des cadeaux d’occasion, les grands-parents continuent à acheter des jouets neufs, comme des trains en plastique, persuadés que c’est mieux.« 

Sans se soucier de la composition ou de la provenance. Elle en prend son parti : « ma fille adore jouer avec tout. On s’amusera à fabriquer des petits jouets avec l’emballage ! » S’avoir s’adapter, c’est aussi ça la parentalité.

Le guide pour accueillir bébé en mode écolo, Mathilde Golla et Valère Corréard, Marabout poche, 2022.

Autrice : Élise Neyret.

A lire aussi :