Partager la publication "Yvon Chouinard : grimpeur, milliardaire, écologiste… la vie du fondateur de Patagonia"
C’est un très beau livre paru aux éditions Glénat. Yvon Chouinard, à l’avant-garde est l’autobiographie du célèbre fondateur de Patagonia. L’occasion de découvrir le parcours unique de l’homme qui a donné sa société à la planète en septembre dernier. Né en 1938 à Lewinston dans l’État du Maine aux États-Unis, Yvon est issu d’une famille d’origine franco-canadienne. Rien ne le prédestinait à marquer de son empreinte le monde de l’escalade et de l’alpinisme, que ce soit par les parcours qu’il a tracés ou les marques d’équipement outdoor emblématiques qu’il a créées.
Son autobiographie, parue en 2019, rassemble un ensemble de textes publiés au fil des années, notamment dans la presse outdoor américaine, et de lettres envoyées à ses proches. On y découvre ses récits épiques d’ascension, ses voyages au bout de la Terre mais aussi ses confessions d’un homme d’affaires… malgré lui. Au fil des mots, cette autobiographie est l’occasion de découvrir, entre les lignes, sa philosophie et son parcours exceptionnel en tant que grimpeur au moment de l’âge d’or des Yosemite et la découverte de destinations lointaines. Escalade du Big Wall, road trip en Patagonie – autant pour grimper que surfer –, la création de Patagonia mais aussi de Black Diamond… autant d’épisodes passionnant de sa vie que l’on découvre au fil des pages du livre À l’avant-garde.
À la fin des années 1950, au début des années 1960, Yvon Chouinard survit en mangeant de la nourriture pour chat tandis qu’il passe ses printemps au Yosemite, ses étés dans les Rocheuses et au Canada, puis migre au Nouveau-Mexique vers des roches plus chaudes quand l’hiver survient. Véritable Jack Kerouac de la grimpe, il ne vit que pour ouvrir de nouvelles voies. En 1965, Yvon Chouinard s’associe à T.M. Herbert pour se frayer un chemin dans le Muir Wall, qu’ils ont réalisé en sept jours, « sans piton et sans eau ». Une vie sans vraiment d’attache qui va connaître un nouveau rebondissement lors de son aventure en Amérique du Sud.
Fin 1968, avec son ami Doug Tompinks, il part en camion pour l’Argentine. Direction le cerro Chaltén, aussi appelé Fitz Roy. Cet immense monolithe a été conquis pour la première fois en 1952 par deux Français, Lionel Terray et Guido Magnone. Avec cinq autres grimpeurs américains, Yvon Chouinard décide de grimper par le côté gauche de la face Sud. Le mauvais temps les bloquera six jours sur la paroi mais ils finiront par ouvrir une des routes les plus célèbres de Patagonie, la « California » ou « Funhogs » sur le Fitz Roy. Cette expédition faut aussi l’occasion de prendre conscience des dégâts que les pitons causaient au granite. Il décida alors d’inventer des systèmes d’ancrage amovibles pour l’escalade, comme les coinceurs en aluminium. Cette expédition lui inspirera aussi le nom de son entreprise la plus emblématique : Patagonia.
Yvon Chouinard n’avait aucune intention de devenir entrepreneur. Mais, à la fin des années 50, il se met à fabriquer artisanalement du matériel de grimpe car il estime que celui commercialisé n’est pas de qualité suffisante. Il installe alors un petit atelier dans l’arrière-cour de la maison de ses parents à Burbank, dans la banlieue de Los Angeles. Il y fabrique des pitons et mousquetons en acier réutilisables. D’abord pour son usage, il se mettra à en vendre depuis le coffre de sa voiture. Une activité qui lui permet de financer peu ou prou ses mois passés au pied des falaises dans le parc de Yosemite notamment.
Mais l’activité n’est pas des plus rentables. Pour s’assurer un pécule, il ajoute une corde à son arc : l’importation d’équipements outdoor d’Europe. Du matériel solide pour qui veut passer du temps en pleine nature : anoraks, sacs de couchage, bonnets, gants, moufles, etc. Au fil des ans, il finira par gérer lui-même la fabrication. « Les vêtements, comme le matériel, devaient être résistants, durables et parfaitement adaptés à l’usage souhaité. Nous proposions des lignes épurées, des couleurs vives et des couches techniques légères pour des vêtements outdoor. Nous avons baptisé notre nouvelle entreprise Patagonia », écrit-il. C’est ainsi que la célèbre marque est née en 1973.
Très impliqué dans la protection de la nature, Yvon Chouinard s’engage, dès 1986, à reverser une partie de ses bénéfices en faveur de l’environnement. Cela deviendra le « 1% pour la planète » qu’il a initié en 2002. Et, deux ans plus tard, Patagonia lance sa première campagne écologique en faveur de la désurbanisation de la vallée de Yosemite dans la Sierra Nevada, en Californie. C’est ainsi que sa propre philosophie, faite aussi de paradoxes, infusera dans son entreprise, au point d’influer sur sa stratégie d’expansion.
Provocateur dans l’âme, mais conscient en tant que manufacturier d’être un « pollueur », Chouinard n’a pas trouvé de solution miracle pour continuer à vendre de nouveaux produits tout en protégeant l’environnement. Néanmoins, afin de s’assurer, une fois qu’il ne serait plus là – il est âgé de 84 ans – sa philosophie lui survivrait, il a annoncé le 14 septembre 2022 qu’il « donnait sa société à la Planète ». Avec le soutien de sa famille, il a décidé de céder ses parts à deux associations à but non lucratif de défense de l’environnement.
Une vie atypique, et même une leçon de vie, qu’on découvre au fil des pages de cette autobiographie superbement illustrée de photos d’époque. Et la preuve qu’il est impossible de dissocier l’homme de sa marque, tant les deux sont inextricablement liés.
Yvon Chouinard, à l’avant-garde, Yvon Chouinard, paru aux éditions Glénat, 432 pages, 35 euros.
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