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Comment rendre le foot plus écologique et responsable

À l’approche de l’Euro 2021, le football a de gros progrès à faire sur le plan écologique. C’est ce que révèle le livre blanc publié en mars par l’association Football Écologie France.

Le 26/05/2021 par Anthony Denay
foot écologique
Le foot peut-il devenir écologique ? Selon l’association Football Écologie France, des progrès sont à faire. (Crédit : Shutterstock)
Le foot peut-il devenir écologique ? Selon l’association Football Écologie France, des progrès sont à faire. (Crédit : Shutterstock)

Le foot écologique est-il possible ? « Pour que le monde du sport puisse montrer l’exemple et tracer la voie à suivre en matière d’écoresponsabilité, il doit pouvoir compter sur son premier de cordée : le football. » Antoine Miche, fondateur et président l’association Football Écologie France, pose d’emblée le cadre du débat dans le livre blanc publié par son association en mars. 

À l’approche de l’Euro 2021, du 11 juin au 11 juillet, WE DEMAIN s’est entretenu avec ce partisan d’un football plus vert et plus éthique. Sport n°1 au monde, implanté sur les cinq continents et recensant plus de 250 millions de pratiquants (selon la FIFA), le foot est aussi un acteur majeur de l’économie planétaire. Avec un chiffre d’affaires évalué à quelque 400 milliards d’euros.

Vers un foot écologique ?

Mais il est aussi un pollueur patenté. Entre les déplacements incessants d’équipes et de supporters, la construction de stades à chaque nouvelle compétition internationale… Ou encore la production massive de déchets à l’intérieur des enceintes. 

À titre d’exemple, David Goldblatt, un historien du football anglais, a estimé que chaque club de Premier League (1re division anglaise) émettait chaque année près de 10 000 tonnes de CO2. L’équivalent de 10 000 allers-retours Paris-New York en avion ! Ainsi le sport professionnel contribue-t-il à la menace qui pèse sur notre environnement.

Or, « la pratique sportive est intimement liée à la qualité de l’environnement, poursuit Antoine Miche. Si les conditions climatiques continuent de se dégrader et les températures de grimper, le sport en plein air pourrait vite devenir asphyxiant. » 

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Une écologie populaire

Ce rude constat a présidé à la création de Football Écologie France en 2019. Dont la mission d’intérêt général est de faire du football un leader des enjeux de société. Au premier rang desquels l’écologie populaire. Populaire, puisque c’est la base de ce sport. Incarnée par les supporters et les clubs amateurs, qui est appelée à impulser le changement. « Nous avons davantage une approche Bottom-Up (ascendante) que Top-Down (descendante). C’est-à-dire que nous pensons que les instances et les grands clubs doivent être challengés par le football d’en bas. Celui qui n’est pas soumis aux grands intérêts financiers et illustre l’intérêt croissant porté par les citoyens à l’écologie », estime Antoine Miche. 

En pratique, comment faire ? Dans le livre blanc publié par son association, un axe fondamental : l’éco-supportérisme. Derrière ce néologisme se cache une façon d’inclure l’ensemble des acteurs du football. Des dirigeants aux bénévoles en passant par les joueurs, les abonnés aux stades… Ou encore les collectivités, dans une démarche écologique et responsable. En privilégiant les transports en commun plutôt que la voiture pour se rendre au stade, chaque supporter peut par exemple agir à son petit niveau.

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Tri et cantine green

Problème : rien n’est fait pour leur faciliter la tâche. Prends ces nouvelles enceintes, ultra-modernes et fonctionnelles, que plusieurs clubs français ont fait construire ces dernières années, notamment en prévision de l’Euro 2016. Cest le cas de l’Olympique lyonnais, du LOSC ou encore des Girondins de Bordeaux. Ces écrins ont été édifiés en périphérie des villes. Dans des zones peu ou pas habitées et souvent mal desservies par les transports.

« L’OL a malgré tout effectué un important travail avec les associations de supporters, la mairie et l’agglomération afin que l’accès au Groupama Stadium soit facilité en tram et même à vélo, grâce aux pistes cyclables », nuance Antoine Miche. À l’intérieur des stades, un meilleur tri des déchets et la mise en place d’une restauration plus durable, comprenant moins de protéines animales, sont aussi des pistes explorées par le livre blanc. 

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Engagement sociétal et écologique des clubs

Le livre blanc préconise également une redéfinition de la stratégie RSE des clubs et des instances du football. « À la différence des entreprises classiques de plus de 500 salariés, les clubs n’ont pas ou peu d’obligations réglementaires quant à l’impact de leur activité sur l’environnement. C’est un vrai problème ! tranche le président de Football Écologie France. Pourtant, les instances du football sont très impliquées d’un point de vue sociétal. Notamment dans la lutte contre l’exclusion et la dénonciation d’un certain nombre de maux comme le racisme ou l’homophobie. Elles n’ont plus qu’à appliquer cela à l’écologie ! » 

Des initiatives existent néanmoins. La LFP (Ligue de football professionnel) s’est associée à la branche française de WWF. La FFF (Fédération française de football) a nommé un référent RSE au sein de ses équipes. Elle est aussi signataire de la charte des 15 engagements écoresponsables émise par le Ministère des Sports. Le club de l’AS Saint-Étienne, quant à lui, a installé des panneaux photovoltaïques dans son stade. Et a dit adieu aux pesticides pour l’entretien de sa pelouse.

Attentisme des acteurs pour un foot écologique

Pour Antoine Miche, si le football français est loin d’être à la traîne de ses voisins européens, la marge de progression reste importante. « Le souci, c’est que les actions entreprises sont ponctuelles. L’écologie n’a pas encore été institutionnalisée, intégrée à la stratégie globale des clubs. À l’inverse de l’économie, le retour sur investissement des actions écoresponsables n’est pas mesurable. Ce qui crée un certain attentisme de la part des acteurs. » 

L’herbe est-elle plus verte au niveau des instances européenne et mondiale, l’UEFA et la FIFA ? Cela reste à voir. La décision de dispatcher les matchs de l’Euro 2021 (initialement programmé en 2020) dans 11 villes du Vieux continent, de Séville à Bakou (Azerbaïdjan), suppose une multiplication des trajets en avion, pour parcourir des milliers de kilomètres, et donc une empreinte carbone conséquente. « L’UEFA se défend en arguant que cette compétition n’a pas nécessité la construction de nouveaux stades, tempère Antoine Miche. Le débat est complexe et il faudrait s’en référer à une étude comparative. » L’écologie sera-t-elle l’autre vainqueur de cette compétition tant attendue ? Cela dépendra surtout du nombre de supporters qui sera autorisé à venir garnir les stades en avion.

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