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Présidentielle 2022 : comment parler du second tour à ses enfants ?

Comment parler du duel entre Emmanuel Macron et Marine Le Pen à ses enfants ? Comment leur faire comprendre les enjeux de la présidentielle 2022 avec des mots simples ? Faut-il leur parler de son propre vote ?

Le 14/04/2022 par Florence Santrot
présidentielle 2022
70 % des parents parlent de politique à leurs enfants, selon un sondage Bayard/Ifop paru en mars 2022. Photo : Shutterstock.
70 % des parents parlent de politique à leurs enfants, selon un sondage Bayard/Ifop paru en mars 2022. Photo : Shutterstock.

A quelques jours du second tour de la présidentielle 2022, les sondages donnent encore une marge très serrée entre Emmanuel Macron (La République En Marche) et Marine Le Pen (Rassemblement National). Selon un sondage réalisé par l’Ifop pour Bayard et publiée en mars 2022, 70 % des parents déclarent parler de politique avec leurs enfants. Mais il n’est pas toujours aisé de savoir comment s’y prendre, quoi expliquer, s’il faut révéler son intention de vote, etc.

C’est pourtant un moment clé dans l’éducation d’un enfant car les élections constituent une expérience déterminante dans leur intégration des comportements citoyens. Pour décrypter tout cela, WE DEMAIN a interrogé Delphine Saulière, directrice des magazines -12 ans à Bayard Jeunesse (Pomme d’Api, Astrapi, J’aime Lire…). Les différents titres jeunesse du groupe travaillent sur le sujet de la présidentielle 2022 depuis 6 mois. Objectif : proposer dans leurs pages des explications claires et adaptées à chaque tranche d’âge des enfants.

WE DEMAIN : Faut-il parler politique avec son enfant ?

Delphine Saulière
Delphine Saulière. DR

Delphine Saulière : Absolument, surtout quand le moment s’y prête comme lors d’une élection présidentielle. C’est une bonne occasion de rendre concrètes des choses abstraites. Pour ce qui est du degré de profondeur, tout dépend évidemment de l’âge de l’enfant. Mais c’est particulièrement intéressant pour des ados. Pour les plus jeunes, c’est l’occasion de répondre aux questions très basiques qu’ils peuvent se poser. Nous avons donc fait la lumière sur les secrets du métier de président de la République. Où vit-il ? Que fait-il de ses journées ? Quelles sont ses missions, son salaire  ? Pourquoi porte-t-il toujours un costume ? Y a-t-il déjà eu une femme présidente en France ?…

Selon votre sondage « Parents, enfants et politique » réalisé pour cette présidentielle 2022, 70 % des parents déclarent parler de politique à leurs enfants…

Oui, il y a un vrai souci de transmission des comportements citoyens pour un peu plus des deux-tiers des Français. Même si les discussions sont généralement très occasionnelles, il faut le souligner. L’élection présidentielle est souvent le point d’orgue de ces moments. Et la famille reste un lieu privilégié de la transmission. On constate un vrai souci de transmission des gestes républicains à cette occasion. D’ailleurs, 47 % des parents déclarent que leurs enfants les accompagnent au bureau de vote. Et 32 % avouent qu’ils sont même présents avec eux dans l’isoloir [ce n’est officiellement pas admis mais est généralement toléré, NDLR]. Ce qui est plus inquiétant, c’est que près d’un tiers (30 %) déclarent ne jamais parler de politique avec leurs enfants. Cela reflète le plus souvent un manque d’intérêt d’une partie des adultes pour ce sujet.

Tous les parents ne sont pas enclins à révéler pour qui ils votent pour cette présidentielle 2022…

Une majorité (57 %) joue la transparence mais ce n’est pas le cas de tout le monde, en effet. Soit dans un souci de ne pas influencer l’avis de leur enfant, soit par souhait de garder l’information pour soi. D’ailleurs, beaucoup d’enfants ne demandent pas à leurs parents pour qui ils votent. 56 % ignorent pour qui leurs parents vont vraiment voter, selon notre sondage.

Chez les plus jeunes notamment, c’est assez normale car leur monde est limité à ce qui les touche directement (leur famille, leur quartier, leur école, leurs amis, le sport qu’ils pratiquent). Leur parler d’une mesure politique qui aura un impact sur des personnes qu’ils ne connaissent pas sera beaucoup trop abstrait.

Concernant le partage des idées et des candidats préférés, on constate une grande différence selon le le niveau d’intérêt des parents pour la politique. Plus ils sont passionnés, plus ils auront tendance à partager leur point de vue politique avec leurs enfants. Et c’est très bien : il est important de partager ses convictions quand on en a. Enfin s’il n’y a évidemment aucune obligation à dire pour qui on vote, reste qu’il est important de dire qu’on vote. Et de rappeler quelle importance cela a dans notre quotidien. Cela fait partie du processus de construction citoyenne de l’enfant.

Faut-il regarder le débat entre Emmanuel Macron et Marine Le Pen avec ses enfants ?

J’ai envie de dire que ce n’est pas forcément nécessaire avec un enfant de moins de 10 ans. Car il n’aura pas les clés pour comprendre, ni le recul. Il faudrait tout lui expliquer point par point… En revanche, avec un ado, cela présente un intérêt. C’est l’occasion de décoder avec lui le jeu du débat. Il comprendra plus facilement les enjeux.

L’important est d’être à ses côtés et faire en sorte qu’il ne soit pas happé par l’écran. Il faut faire des commentaires à voix haute et l’aider à décrypter certains points complexes. Ou encore lui expliquer pourquoi tel ou tel argument a fait mouche. Pourquoi tel candidat est en difficulté sur tel ou tel sujet en lui donnant les clés. Évidemment, c’est encore mieux si, en amont, on a étudié avec son enfant les programmes de la présidentielle 2022.

Et si la candidate ou le candidat de son choix a été éliminé au premier tour ?

Ce n’est évidemment pas simple à expliquer à son enfant que la personne qu’on avait choisie initialement a été éliminée. Et qu’au second tour de la présidentielle 2022, on doit maintenant voter pour « le moins pire » selon ce qu’on pense des deux personnes encore en lice. Dans cette situation, si on n’a pas de convictions fortes, il est peut-être préférable de ne pas s’attarder sur la question. Mais cela peut aussi être l’occasion de faire comprendre à son enfant que, quand on vit en société, et à plus forte raison dans une démocratie, il y a des compromis nécessaires. Et il faut accepter le choix de la majorité, même si ce n’est pas le sien.

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