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Written by 19 h 00 min Découvrir, Societe-Economie

De 2 % en 1995 à 95 % de biodéchets recyclés aujourd’hui : l’exemple de la Corée du Sud

Alors qu’en France, la collecte des biodéchets est devenue obligatoire, en Corée du Sud, 95 % des détritus alimentaires est revalorisé. Découvrez comment le pays a changé la donne.

Le 01/04/2024 par Florence Santrot
corée du sud biodéchets
La Corée du Sud a réussi à réduire drastiquement la part des déchets alimentaires non recyclés. Un exemple pour la France ? Crédit : svetikd / iStock.
La Corée du Sud a réussi à réduire drastiquement la part des déchets alimentaires non recyclés. Un exemple pour la France ? Crédit : svetikd / iStock.

Ils représentent en France 30 % des ordures ménagères. Depuis le 1er janvier 2024, les biodéchets font l’objet d’un tri à la source obligatoire. Objectif : augmenter la proportion de collecte des déchets alimentaires des ménages. Jusqu’à présent, elle n’était que de 14 % , selon l’ADEME, l’agence de transition écologique. Bien loin des performances de la Corée du Sud.

Après 20 ans de politique en faveur de la valorisation des déchets alimentaires, le pays est passé de 2 % de collecte en 1995 à 95 % aujourd’hui. Cela en fait le champion mondial en la matière. Mais tous les pays n’ont pas adopté une telle politique. Chaque année dans le monde, ce sont pas moins de 1,4 milliard de tonnes de nourriture qui sont jetées. Pour la grande majorité, ils finissent la décharge, enfouis ou incinérés. Résultats : ces déchets organiques représentent 6 % des émissions de gaz à effet de serre sur Terre.

La recette de la Corée du Sud pour imposer le tri des biodéchets

Ce n’est que grâce à des mesures radicales du gouvernement coréen que les habitudes ont changé. Il faut dire que les Sud-Coréens produisent chacun plus de 139 kilos de déchets alimentaires chaque année (kimchi compris), contre 95 à 115 kilos dans les pays occidentaux. Pour éviter un tel gaspillage, la Corée du Sud s’est organisée depuis le début des années 2000. En 2005, est entrée en vigueur l’interdiction de mettre en décharge les aliments. Obligation a été faite de se doter de sacs biodégradables et de pratiquer le compostage domestique.

En outre, la Corée du Sud s’est dotée de conteneurs intelligents dans les grandes villes. Installés au pied des habitations, les Coréens doivent y déposer leur tri sélectif, notamment alimentaire. Chaque poubelle commune s’ouvre en utilisant une carte individuelle. Rien qu’à Séoul, la capitale, quelque 6 000 poubelles équipées de balances et d’identification par radiofréquence. Les déchets sont ensuite pesés et les citoyens sont facturés en fonction du poids. Ces restes organiques sont ensuite transformés en nourriture pour animaux ou en compost afin de servir d’engrais pour l’agriculture. Le biogaz est aussi en plein essor.

conteneurs de collecte des biodéchets
Deux conteneurs à carte avec balance intégrée pour taxer au poids les biodéchets des habitants de Corée du Sud. Crédit : Revi / Wikipedia.

Des biodéchets qui alimentent fermes urbaines et jardins communautaires en Corée du Sud

Grâce au compost ainsi créé, la Corée du Sud a vu nombre de fermes urbaines éclore ainsi que le développement de potagers partagés. Entre 2014 et 2021, ils ont été multipliés par six à Séoul. Il y a quatre ans, la capitale comptait quelque 202 hectares de fermes urbaines et jardins communautaires. Elle devrait atteindre les 240 hectares cette année. C’est un peu plus de 330 terrains de foot dédiés à la production alimentaire. Dans une ville extrêmement compacte (plus de 15 000 hab./km2, comme Paris), c’est un bel exploit.

Pour parvenir à cela, c’est la ville qui a décidé de prendre en charge entre 80 et 100 % des coûts de démarrage de ces petites exploitations agricoles. Et complète par l’installation à proximité de ces espaces des composteurs de déchets alimentaires pour faciliter l’enrichissement régulier des terres.

En France, une taxe au poids sur les ordures ménagères ?

Si les Français ne semblent pas prêts à adopter cette solution, l’idée fait néanmoins son chemin auprès des agglomérations et collectivités. Certaines villes, villages et départements ont déjà adopté ce qu’on appelle la « redevance incitative », ou taxe au poids sur les ordures ménagères. C’est le cas en Dordogne sur une partie du département. Le projet a mis en place ce système progressivement sur 3 ans :

  •  Phase 1 Mise en place technique : déploiement des équipements et enquête usagers
  • Phase 2 Année pédagogique  : utilisation du système de collecte et paiement de la TEOM (Taxe d’enlèvement des ordures ménagères) avec envoi d’une facture qui ne sera pas payée
  • Phase 3 Première année de facturation réelle en redevance incitative

Des tarifs variables selon la taille du foyer et le mode de collecte

Les tarifs varient selon que l’on opte pour les points d’apport volontaire publics (conteneurs collectifs avec accès par carte, comme en Corée du Sud) ou pour la collecte en porte à porte (plus cher). Outre un abonnement annuel (113,91 euros), s’ajoute un forfait qui donne droit à un nombre fixe d’ouvertures des poubelles intelligentes en fonction du nombre de personnes par foyer. Exemple : une personne seule débourse 83,5 euros pour 16 ouvertures de sacs noirs (tout-venant). Deux personnes, 135,70 euros pour 26 ouvertures. Le nombre de passages en déchetterie est également limité (26 passages par foyer par an, 10 euros par passage supplémentaire).

Selon le SMD3 (Syndicat Mixte des Déchets de la Dordogne), cette redevance incitative a permis de réduire de 42 à 43 % la quantité de déchets non recyclables depuis sa mise en place. Côté citoyens, cette nouvelle taxe au poids a encore du mal à être acceptée et à être vue comme un progrès plutôt qu’une contrainte onéreuse…

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