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Bioacoustique : une start-up à l’écoute des sols

La firme britannique Baker Consultants a développé un procédé bioacoustique qui permet d’évaluer l’état de santé général d’un terrain. Une technologie prometteuse pour la régénération des sols.

Le 14/07/2022 par Florence Santrot
baker consultants

Écouter les sols pour évaluer leur santé. Spécialisée en bioacoustique, la firme britannique Baker Consultants a été sélectionnée parmi les start-ups mises à l’honneur lors du World Living Soils Forum organisé par Moët hennesy début juin 2022 à Arles. Elle monitore le bruit généré par les sols, ou plutôt les éléments vivants qui s’y développent, pour estimer s’ils sont – ou non – sains.

« Nous sommes des écologistes et nous utilisons la bioacoustique pour mesurer la biodiversité, explique à WE DEMAIN Andrew Baker, le fondateur. Généralement, on effectue un sondage manuel des sols. À partir d’un échantillon, on observe ce qui est présent pour évaluer la santé du terrain. Mais cette méthode est biaisée par la façon dont la personne va effectuer le comptage. Avec l’écoute des sols, les données sont totalement objectives. »

Faune et flore : un vrai tintamarre en sous-sol

Dans un sol en bonne santé, la biodiversité est très présente. Vers de terre, nématodes, fourmis, petits insectes divers et variés… tout cela produit du bruit en mangeant, se déplaçant, etc. « Aujourd’hui, un enregistreur bioacoustique est très peu cher, moins de 100 euros. Il suffit de l’enfoncer dans la terre et de le laisser quelque temps. Il enregistre tout : le pépiement des oiseaux, à des fréquences élevées, jusqu’aux mouvements d’un insecte ou les gouttes de pluie qui touchent le sol, à des fréquences très basses », détaille Andrew Baker.

Et d’ajouter : « Ces données sont ensuite collectées (elles sont enregistrées sur une carte SD au niveau du boîtier d’enregistrement) et envoyées à nos services pour que nous analysions en détail ce qu’il en ressort. »

Évaluer la santé d’un sol et de tout un écosystème grâce à la bioacoustique

Selon le type de sol, Baker Consultants a établi un index du niveau sonore selon les fréquences qui définissent un sol en bonne santé. Un agriculteur ou viticulteur peut ensuite comparer ses données pour évaluer si son terrain possède une biodiversité correcte, très bonne ou insuffisante. Selon les fréquences, il est même possible de savoir quels éléments vivants sont en sous-effectif dans un écosystème par exemple.

« Si nous voulons isoler une espèce spécifique, nous avons la possibilité de le faire avec le logiciel que nous avons mis au point, assure le fondateur de Baker Consultants. En s’appuyant sur les données de bioacoustique, il est capable de mesurer le niveau d’activité d’une espèce en particulier sur une période courte ou en cumulant tous les enregistrements d’une année. Cela permet de voir l’évolution au fil du temps et des saisons. »

« Un sol en bonne santé est un sol bruyant »

« Si nos capteurs n’enregistrent que peu de sons en journée, ce n’est pas bon signe. Au lever et au coucher du soleil notamment, la biodiversité d’un sol s’active particulièrement, de même que la faune en surface (passage d’un lapin, pépiements des oiseaux, etc.). Pour résumer, un sol en bonne santé est un sol bruyant », assure Andrew Baker.

Derrière, ce que propose Baker Consultants, c’est de l’analyse de toutes ces données captées pour en tirer les bons enseignements et savoir si un sol a besoin de davantage de biomasse, si les éventuels pesticides utilisés appauvrissent trop la terre en matière de biodiversité, etc. « L’analyse de la data est ce qui est le plus complexe. Et tout dépend de ce que vous cherchez. Par exemple, si ce qui vous intéresse est la présence ou non de criquets. Ces insectes font beaucoup de bruits donc on peut rapidement les identifier et évaluer leur niveau de présence avant qu’ils ne fassent trop de dégâts. »

En 2 à 3 ans, un sol peut déjà fortement s’améliorer

Le coût du service dépend ensuite de la masse de données à analyser. Cela peut-être très peu coûteux pour avoir une image ponctuelle de la santé de ses sols ou plus onéreux pour une surveillance sur le long terme. Cela peut aussi être utile avant d’acheter un terrain. Savoir si le sol est en bonne santé avant d’acquérir une surface agricole va devenir de plus en plus nécessaire pour en évaluer son intérêt mais aussi sa valeur. Pour un agriculteur qui a fait l’effort de préserver un sol vivant, c’est aussi une manière de valoriser tout le travail réalisé au fil des ans.

« Si un agriculteur veut passer au bio, il peut utiliser notre système bioacoustique une ou deux fois par an pour voir l’évolution de la régénération des sols. Et cela va assez vite. En deux à trois ans, on constate déjà de vraies améliorations en termes de biodiversité, précise Andrew Baker. Mon conseil serait donc : collectez au maximum la data de vos sols car cela est très peu coûteux. Ensuite, vous aurez toujours la possibilité de la faire analyser en profondeur si le besoin s’en fait sentir. » Le dispositif, un petit boîtier d’une dizaine de centimètres de côté, peut s’acheter en ligne pour moins d’une centaine d’euros sur des plateformes comme Amazon ou via Baker Consultants.

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