Partager  > À Roubaix, la belle histoire d’une entreprise textile née du Covid

Written by 12 h 36 min Partager

À Roubaix, la belle histoire d’une entreprise textile née du Covid

MADE IN FRANCE. Produire des masques par million en pleine crise sanitaire, et peu à peu relocaliser la production textile dans la région de Roubaix : voilà l’histoire du Projet Résilience, retracé dans un documentaire enthousiasmant, « RE|FAIRE des masques, une filière, une industrie », à découvrir sur France 3.

Le 07/04/2021 par Sofia Colla
REFAIRE
Le Projet Résilience a embauché 120 personnes depuis le début de la crise sanitaire. (Crédit : L’Infinie Comédie)
Le Projet Résilience a embauché 120 personnes depuis le début de la crise sanitaire. (Crédit : L’Infinie Comédie)

Mars 2020. Le coronavirus touche la France de plein fouet, en pénurie de masques. Christophe Lepine, industriel, décide alors de relocaliser la fabrication à Roubaix, ancienne capitale du textile.

Mais il n’est pas simple de lancer une telle affaire. Il faut trouver un espace, du tissu, des machines et des employés. Tout cela dans un temps record et en pleine crise sanitaire. Le documentaire RE|FAIRE des masques, une filière, une industrie, diffusé jeudi 8 avril à 22h50 sur France 3, retrace l’histoire de ce « Projet Résilience ». 

À lire aussi : Relocaliser le textile en France diviserait par deux son empreinte carbone

Créer de l’emploi

Christophe Lepine contacte d’abord la famille Lunlan, propriétaire d’un atelier textile, avec qui il a déjà travaillé par le passé. Il engage également une vingtaine de jeunes, prêts à se former pour participer à l’aventure.

Le documentaire nous mène ainsi à la rencontre d’Olympe Pollet, jeune Roubaisienne qui a arrêté l’école et qui vit chez ses parents avec ses 8 frères et soeurs. Son rêve : concevoir des vêtements, mais elle n’a pas d’argent pour se payer une école spécialisée, ni pour acheter le matériel nécessaire. Le Projet Résilience lui offre une chance, même sans compétence. Olympe espère que l’entreprise la « mène quelque part », peut-être en diversifiant son savoir-faire dans l’avenir. 

Fin avril, rebondissement : la demande de masques explose après que le gouvernement annonce qu’ils seront obligatoires dans l’espace public. Les ateliers sont agrandis. L’objectif de Christophe Lepine est alors d’en fabriquer 45 millions. 

« J’ai cet espoir, cette envie, de dire ‘on a été là pendant la crise, on sait faire, et la France sait encore le faire’. Même si c’est extrêmement dur et même s’il n’y a quasiment plus rien. C’est cette espèce d’envie du phénix de renaître de nos cendres. » 

Christophe Lepine.
REFAIRE
(Crédit : L’Infinie Comédie)

À lire aussi : Bienvenue dans la dernière usine d’aiguilles à coudre française

Le projet est notamment soutenu par Thibaut Guilluy, nommé le 17 mars Haut-Commissaire à l’inclusion dans l’engagement des entreprises. Il promet d’aider à relocaliser le savoir-faire. « Le textile, dans la mémoire collective, c’est probablement l’industrie qui a subit le plus de plein fouet la mondialisation. Si on dit ‘à Roubaix, dans le textile, il y a quelque chose de possible’, finalement, cela dit que dans plein d’autres domaines c’est possible. »

Le 4 mai 2020, nouvelle étape : le Projet Résilience ouvre son propre atelier et recrute de nouveaux salariés, sans aucune compétence. Maria, Marie-Aline et Marcelle, d’anciennes ouvrières textiles, forment ces nouveaux venus. 

« L’objectif de ce projet, c’est de créer des emplois. Et d’accompagner des gens justement pour les remettre sur le chemin de l’emploi et leur permettre de pérenniser l’histoire », explique Stéphanie Calvino, la DRH.

Des masques aux t-shirts

Tout roule… Jusqu’à la fin du mois de juin : les masques jetables asiatiques reviennent sur le marché, à très bas coût. La demande de masques lavables « made in France » s’effondre. L’atelier est alors contraint de diminuer sa production en passant de 12 000 masques par jour à seulement 3 500. 

Christophe Lepine a alors une idée : créer des t-shirts. Reste à former de nouveaux les ouvriers pour passer d’une logique de quantité à une logique de qualité. 

« Aujourd’hui, la plupart des t-shirts son confectionnés en Inde ou au Bungladesh pour moins d’un euro. Ils parcourent en moyenne 65 000 kilomètres. Un kilo de coton consomme 20 000 litres d’eau. Pour moi, le t-shirt, c’est ce qui symbolise vraiment l’extrême et la stupidité de la mondialisation. »

Christope Lepine. 

Au mois d’août, l’entreprise reçoit la visite du Premier ministre. Mais, selon l’industriel, ce n’est pas le gouvernement qui impulsera le retour de la fabrication française : « Je pense que c’est à nous de montrer le chemin. C’est à des gens comme nous de montrer que c’est possible et d’aller les chercher [le gouvernement, ndlr] pour nous aider. Mais ce n’est pas eux qui mettront l’étincelle. »

REFAIRE
Olympe Pollet, jeune apprentie qui a signé un CDI au sein de l’atelier roubaisien du Projet Résilience (Crédit : L’Infinie Comédie)

Enthousiasmant, ce documentaire raconte finalement comment une crise peut être un levier pour construire des projets éthiques et viables. Le Projet Résilience incarne ce rêve du début de la crise sanitaire, celui de bâtir un « monde d’après », plus juste et plus durable. 

Une ambition ici devenue réalité. En 8 mois, le Projet Résilience et ses ateliers partenaires ont produit plus de 20 millions de masques. L’atelier de Roubaix en a fabriqué à lui seul plus d’un million. Aujourd’hui, 120 personnes ont été employées pour confectionner des t-shirts, des bonnets, des tabliers et des sacs en toile pour des marques françaises. C’est le cas de la jeune apprentie, Olympe Pollet, qui a signé un CDI. 

Pour découvrir cette épopée contemporaine, RE|FAIRE des masques, une filière, une industrie, réalisée par Benjamin Carle et Ella Cerfontaine, rendez-vous sur France 3, jeudi 8 avril à 22h50. 

SOUTENEZ WE DEMAIN, SOUTENEZ UNE RÉDACTION INDÉPENDANTE
Inscrivez-vous à notre newsletter hebdomadaire
et abonnez-vous à notre magazine.

A lire aussi :