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Accord commercial UE-Mexique : pourquoi le ratifier serait une erreur

120 organisations, dont plus d’une vingtaine de françaises, appellent à ne pas ratifier l’accord entre l’Union européenne et le Mexique. Bien trop libéral, il irait à l’encontre du bien commun.

Le 11/07/2022 par Florence Santrot
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Container cargo ship at industrial port in import export commercial trade business logistic and transportation of international by container cargo ship boat in the open sea, Aerial view industry crane
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Un nouvel accord commercial entre l’Union européenne (UE) et le Mexique, pourquoi pas ? Sur le papier, « ce nouvel accord élimine les droits de douane élevés imposés par le Mexique sur les produits alimentaires et les boissons provenant de l’UE et permet aux entreprises de l’UE de vendre davantage de services au Mexique ». Sauf que, si on entre dans le détail du texte négocié en pleine pandémie, en avril 2020, bien des points nombres surgissent.

C’est pour cela que pas moins de 120 organisation mexicaines et européennes, dont plus d’une vingtaine d’origines françaises*, s’opposent à la ratification prochaine de ce nouvel accord, qui doit remplacer celui en place depuis 2000. Le collectif explique qu’il « va approfondir la libéralisation du commerce, ouvrir de nouveaux marchés et donner de nouveaux droits aux entreprises multinationales ». Des mesures qui vont « à rebours de ce qui serait nécessaire pour faire face aux crises sanitaires, sociales, économiques et écologiques que nous connaissons. »

Protéger les entreprises privées mais bafouer les droits humains, notamment ceux des femmes

A l’instar de ce qu’il se passe de manière assez similaire dans le traité de la Charte de l’énergie, les opposants à cet accord commercial pointent du doigt qu’il va avant tout protéger les investisseurs étrangers, avant même les intérêts des citoyennes et citoyens. « Par exemple, en 2010-2013, l’entreprise transnationale espagnole Abengoa-COFIDES a poursuivi le Mexique après avoir refusé de se conformer aux réglementations environnementales, et a obtenu 48 millions de dollars de « compensation et de manque à gagner. »

En revanche, l’accord ne prévoit pas de mécanismes de régulation efficaces des droits humains. Ainsi, il existe de multiples cas d’abus perpétrés par des entreprises européennes au Mexique (électricité vendue très chère, violation du droit d’accès à l’eau, absence de régulation de méga projets ayant de graves impacts socio-environnementaux, etc.). En outre, « le traité ne prévoit aucun mécanisme pour mettre fin aux discriminations à l’encontre des femmes et des personnes LGBTIQ », souligne le texte commun des 120 organisations qui dénoncent l’accord. Le nouveau texte a même supprimé les articles 36 et 37 du traité de 2000 qui prévoient une meilleure protection des femmes.

Un traité qui va miner l’agriculture paysanne et éroder la souveraineté alimentaire

« Avec ce projet d’accord, le Mexique s’engage à adhérer à la dernière convention de l’Union internationale pour la protection des obtentions végétales (UPOV) de 1991 qui conduit à accélérer la privatisation des semences et à renforcer le pouvoir des fabricants européens de semences et de pesticides », s’inquiète le collectif. OGM, mono-cultures, importations d’agro-toxiques comme le glyphosate… le Mexique va profondément souffrir de cet accord.

En effet, l’UE exporte près de 5000 tonnes par an de pesticides non autorisés en Europe. « Le monde agricole et paysan va payer un lourd tribut à la mise en œuvre d’un tel accord, alors que, dans le même temps, les dispositions visant à protéger les droits humains, le droit des travailleurs, la planète et le climat sont extrêmement limitées ».

Riz, viande, sucre, produits laitiers…

Cet accord concernerait 99 % des produits échangés entre l’UE et le Mexique. Des produits qui seraient alors exonérés de barrière tarifaire (droits de douane, etc.). On estime que, côté mexicain, cela pourrait faire exploser les exportations de riz (+998 %), de viande (+848 %) et de sucre (+450 %).

Pour l’UE, ce sont les produits laitiers (+462 %) le bœuf (+660 %) et le sucre (1245 %) qui pourraient en être les premiers bénéficiaires. L’accord comprend aussi un quota de 20 000 tonnes supplémentaires de bœuf qui pourraient être importées en Europe depuis le Mexique.

*Les signataires français qui s’opposent à la ratification de cet accord commercial UE-Mexique :

  1. Aitec
  2. Alofa Tuvalu
  3. Amis de la Terre
  4. Attac France
  5. BLOOM Association
  6. CADTM France
  7. CCFD-Terre Solidaire
  8. Collectif Alerte France Brésil / MD18
  9. Collectif Stop CETA-Mercosur
  10. Comité Pauvreté et Politique
  11. Confédération Paysanne
  12. CRID
  13. Emmaus International
  14. Europe solidaire sans frontières (ESSF)
  15. Fondation Copernic
  16. Fondation Danielle Mitterrand
  17. France Amérique Latine (FAL)
  18. France Nature Environnement
  19. FSU
  20. Générations Futures
  21. Les Amis du Monde Diplomatique
  22. Ligue des droits de l’Homme – LDH
  23. Notre Maison Brûle
  24. Union syndicale Solidaires

A lire aussi : Six raisons pour NE PAS ratifier l’accord global UE-Mexique (PDF)

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