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Le Paris des récifs : de plus en plus de coraux qui se font porter pâles

Du 12 au 15 décembre 2023, se tient à la Maison de l’Océan à Paris l’événement « Le Paris des récifs ». Ce colloque scientifique, organisé par LabEx Corail, vient faire le point sur l’état des récifs coralliens dans l’ensemble des outre-mers françaises. À travers des conférences et tables-rondes, le but est de faire en sorte que le grand public apprenne à mieux connaître, comprendre et soit sensibilisé à la protection des coraux. Le LabEx Corail compte profiter de l’événement pour faire une restitution de ses travaux.

Ce groupement de laboratoires dits « d’Excellence » (LabEx) réunit neuf institutions et quatre universités de métropole et d’outre-mer. Depuis 14 ans, il joue une triple mission : réunir la communauté française de la recherche sur les récifs coralliens, financer la recherche sur le sujet et offrir une expertise scientifique pour la conservation et la gestion de ces récifs coralliens en danger. « Dans la Caraïbe, neuf massifs coralliens sur dix ont blanchi, prévient Serge Planes, directeur du LabEx Corail et directeur de recherche au CNRS. Si 80 à 90 % blanchissent, cela veut dire qu’un peu plus de 60 % vont mourir. »

Le blanchiment des coraux s’est accéléré depuis un épisode majeur de réchauffement climatique en 1998. Depuis, 50 % des récifs ont disparu. Crédit : Canva.

Coraux : petites surfaces, grands dommages

Alors qu’ils ne couvrent que 0,02 % de la superficie des océans, les récifs coralliens rassemblent près de 25 % de la biodiversité des mers. On comprend donc à quel point leur disparition pourrait faire des ravages. « Nous sommes justement en train d’étudier l’impact du blanchiment des récifs coralliens sur les services écosystémiques qui en dépendent mais il est encore trop tôt pour en connaître l’ampleur. Une chose est sûre, leur déclin va de pair », explique Serge Planes. Non seulement les récifs coralliens fournissent environ 10 % du poisson pêché dans le monde mais ils servent aussi d’abri et de source de nourriture pour quelque 100 000 espèces vivantes.

Victimes de multiples facteurs de stress (eaux usées, rejets de pesticides liés à l’agriculture, surpêche, présence croissante de certaines algues…), les scientifiques sont catégoriques : c’est le réchauffement qui cause les plus gros dommages aux coraux. « Avec El Niño qui arrive, cela va fortement s’accentuer. Comme dans la Caraïbe, on s’attend à ce que 90 % des coraux du Pacifique Est vont blanchir. Ce ne sera pas dans quelques années mais dans quelques semaines », s’alarme Serge Planes. Inquiet mais pas pessimiste néanmoins. « On pense que les récifs coralliens pourraient revenir mais il faut agir de suite. »

« Le phénomène El Niño va fortement accentuer le déclin des coraux dans les deux années à venir. »

Serge Planes

2 pistes pour sauver les récifs : limiter la dégradation et assurer la restauration durable

Pour caresser l’espoir de ne pas voir complètement disparaître les coraux, il faut travailler parallèlement sur deux axes : d’un côté, limiter la dégradation et, de l’autre, mettre en place la restauration durable. Dernièrement, la piste du bouturage corallien est sur le devant de la scène. Ce que Serge Planes tempère : « Il n’y a aucune solution qui est miraculeuse. La disparition des récifs coralliens est la conséquence de différents stress donc il ne peut pas y avoir une seule réponse. Le bouturage est une réponse transitoire intéressante mais ne pas dégrader les coraux est tout aussi primordial. »

Le bouturage de coraux est une piste explorée pour sauver les récifs coralliens. Crédit : JodiJacobson / iStock.

L’idée pourrait être de développer bien davantage les zones protégées où la pêche n’est pas autorisée afin de préserver des écosystèmes qui, par ailleurs, subissent déjà les effets du réchauffement climatique. D’autres pistes sont explorées. Au japon, des ombrières sont placées au-dessus de certains récifs pour les protéger du soleil. En Australie, les eaux profondes servent à rafraîchir les zones coralliennes. L’impression 3D est aussi sollicitée. Aux USA, les coraux sont transplantés dans des bassins plus frais.

« Il faut se rendre compte qu’en Floride, on est arrivé à un stade où on met les coraux dans des aquariums pour les sauver, pointe le scientifique. Il n’y a pas de solution bonne ou mauvaise. Chacune a des avantages et des inconvénients. Nous-même, en France, nous envisageons sur certains récifs la mise en place de panneaux solaires flottants qui serviraient d’ombrières par la même occasion. » Des pistes multiples mais une seule certitude : l’urgence est réelle pour sauver les coraux.

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