Partager la publication "Autoconsommation électrique : pourquoi de plus en plus de Français s’y mettent"
Les chiffres parlent d’eux-mêmes : à la fin de l’année 2024, la France comptait 677 411 installations d’autoconsommation individuelle en photovoltaïque, soit une hausse impressionnante de 54 % en un an. Une progression qui s’explique par l’augmentation des prix de l’électricité, mais aussi par une prise de conscience collective des avantages qu’offre cette approche de produire soi-même l’énergie dont on a besoin. Dans son dernier avis, publié le 29 janvier 2025, l’Agence de la transition écologique (ADEME) insiste sur le rôle clé de l’autoconsommation solaire, tant pour les particuliers, les entreprises et collectivités que pour le réseau électrique national.
“Si on regarde en termes de puissance installée, l’augmentation est encore plus forte, puisqu’on est à 69 % d’augmentation de la puissance installée photovoltaïque en un an sur des projets d’autoconsommation individuelle”, indique Stéfan Louillat, chef du service Électricité Renouvelable et Réseaux de l’ADEME. En favorisant l’utilisation d’une électricité produite localement et directement consommée sur place, elle limite la pression sur les infrastructures de distribution et participe activement à la transition énergétique.
Reportage : comment sont fabriqués les panneaux photovoltaïques
Un atout pour l’équilibre du réseau électrique
L’augmentation de la consommation électrique est inévitable avec la généralisation des véhicules électriques, des pompes à chaleur et des nouveaux usages numériques. Or, cette montée en puissance pose un défi majeur : éviter la surcharge du réseau, notamment lors des pics de demande en fin de journée. “Le photovoltaïque encourage ses utilisateurs à déplacer leurs consommations de 10h à 16h, au moment de la production solaire. Ils vont ajuster certains usages au sein d’une journée – une lessive par exemple – sur des périodes à moindre tension.”, souligne Stéfan Louillat.
En synchronisant les consommations avec la production solaire – par exemple en chargeant une voiture électrique, en chauffant de l’eau sanitaire ou en lançant ses appareils électroménagers en journée – les utilisateurs participent à réduire la demande sur le réseau lors des pics. Une stratégie qui limite le recours aux centrales thermiques d’appoint, souvent polluantes et coûteuses. “Toutefois, pour essentiel, ce levier n’est pas suffisant, précise le chef du service. Il est essentiel qu’il soit complété par des dispositifs d’offre tarifaire qui valorisent la flexibilité en faisant varier les prix d’électricité avec des prix différenciés au cours de la journée pour pouvoir permettre de placer de manière opportune les consommations au moment de plus forte production.”
Des économies substantielles pour les particuliers, les entreprises, les collectivités…
Au-delà de son impact environnemental et collectif, l’autoconsommation est aussi une opportunité économique. En 2024, le coût de production de l’électricité solaire pour une installation domestique standard (3 à 9 kWc) était estimé entre 13 et 19 centimes d’euros par kWh, contre 25 centimes d’euros en moyenne pour le tarif réglementé.
Ce différentiel permet d’amortir rapidement l’investissement initial et de sécuriser son approvisionnement énergétique face aux fluctuations du marché. Dans le sud de la France, où l’ensoleillement est plus important, les grandes installations bénéficient de coûts encore plus attractifs : 14 centimes pour 36 kWc, 12 centimes pour 100 kWc et 11 centimes pour 250 kWc.
Les professionnels ne sont pas en reste. Les secteurs dont l’activité est diurne (agriculture, industrie, tertiaire) ont tout intérêt à exploiter cette ressource pour réduire leur dépendance au réseau et stabiliser leurs charges énergétiques.
Plusieurs stratégies pour maximiser sa rentabilité
La question du taux d’autoconsommation est centrale pour garantir la rentabilité d’une installation. “Pour une installation individuelle de 3 à 9 kWc, soit entre 15 et 45 m², consommer seulement 25 % de sa production implique un retour sur investissement entre 17 et 19 ans. Mais en optimisant sa consommation à 45 %, ce délai tombe à 14 ans. On gagne cinq ans en déplaçant ses usages”, détaille Stéfan Louillat. Sans cet effort, mieux vaut revendre une partie de sa production, car le tarif de rémunération en surplus est devenu plus intéressant que l’injection totale dans le réseau.
La question de l’orientation des panneaux est un autre paramètre clé. Si une exposition plein sud maximise la production, elle ne permet pas toujours d’optimiser l’autoconsommation. “Une installation en Est-Ouest produit 10 % de moins qu’une exposition plein sud, mais permet d’étaler la production sur la journée et d’augmenter le taux d’autoconsommation de 6 %”, précise le porte-parole de l’ADEME.
Dans un contexte où l’objectif est de consommer au maximum l’électricité produite, cette approche peut s’avérer plus rentable qu’une production brute maximisée sans adaptation aux besoins réels.

Batteries : faut-il investir dans le stockage ?
Pour améliorer leur autonomie, certains particuliers envisagent d’ajouter des batteries stationnaires afin de stocker leur production excédentaire. Mais l’ADEME met en garde contre cette solution, notamment pour des raisons écologiques et économiques. “Le décalage des consommations en journée est une alternative plus efficace que l’achat de batteries, dont la fabrication repose sur des ressources minérales et métalliques rares, explique l’Agence. Et d’ajouter : “D’un point de vue environnemental, il convient de valoriser et d’utiliser un stockage déjà existant plutôt que de développer un nouveau dispositif.”
De quel stockage préexistant est-il question ? Des véhicules électriques et de leurs batteries. En effet, l’essor de ces modèles ouvre de nouvelles perspectives. Ces derniers possèdent déjà des capacités de stockage mais n’ont pas été configurées comme des réserves d’énergie mobiles, capables d’alimenter une maison.
C’est pourtant tout à fait imaginable et certains constructeurs automobiles, dont Renault, “mettent déjà à disposition des voitures avec des bornes de recharge intelligentes et bidirectionnelles qui peuvent justement s’adapter à des signaux tarifaires ou à des signaux de tension sur le système électrique.” Des énergéticiens proposent aussi ce type de solution. En chargeant ces véhicules aux heures de production solaire, on peut alors valoriser cette énergie en soirée et la nuit, sans recourir à des batteries supplémentaires.

L’autoconsommation collective, une alternative prometteuse
Au-delà de l’autoconsommation individuelle, l’autoconsommation collective est en plein essor. Il faut dire que son potentiel a de quoi séduire. Comment cela fonctionne-t-il ? Le principe est le suivant : l’électricité, produite en un seul et point, est partagée entre plusieurs utilisateurs proches géographiquement. Selon Enogrid, un des spécialistes en la matière, “Un jalon important a été franchi en décembre 2024 : le nombre total de sites en autoconsommation collective a dépassé la barre des 8 000. En effet, sur le réseau Enedis il y a 7 232 consommateurs pour 1 110 producteurs, soit un total de 8 342 sites participants.” Ce chiffre s’inscrit en hausse de 129 % par rapport à 2023.
Un immeuble, un quartier, une zone industrielle ou une collectivité peuvent ainsi mutualiser une installation solaire pour réduire leurs coûts et optimiser l’utilisation de l’énergie produite localement. Cette dynamique est encouragée par des évolutions réglementaires favorisant l’autoconsommation collective élargie, qui facilite le partage au sein de périmètres plus vastes. “L’intérêt pour les particuliers, c’est que l’autoconsommation permet de réduire la facture, mais aussi d’avoir de la visibilité sur la durée. Sur toute la durée de vie de l’installation, on peut se projeter sur les coûts de production de la centrale photovoltaïque. On sait, sur une durée longue, quels seront les tarifs.”, précise Stéfan Louillat.
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Une dynamique à soutenir pour accélérer la transition énergétique
Avec une adoption en forte croissance et des bénéfices à la fois économiques, écologiques et sociaux, l’autoconsommation apparaît comme un levier majeur de la transition énergétique. Cependant, pour en tirer le meilleur parti, il est essentiel d’adapter ses usages, de bien dimensionner son installation et de privilégier le partage de l’énergie lorsque cela est possible.
À mesure que les coûts d’installation continuent de baisser et que les technologies progressent, cette solution pourrait devenir un pilier incontournable du mix énergétique français, où les énergies renouvelables présentent une part légèrement inférieure à la moyenne européenne. L’ADEME appelle donc à renforcer les dispositifs d’accompagnement et de sensibilisation, afin que ce modèle devienne une référence pour les années à venir.
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