Partager la publication "Campus Agronova : dans la Loire, un laboratoire pour l’agriculture de demain"
Au cœur de la Loire, le Campus Agronova se distingue comme un pôle d’innovation en matière de formation agricole. Réparti sur deux sites – Précieux, en plaine du Forez, à environ 30 minutes au nord-ouest de Saint-Étienne, et Saint-Genest-Malifaux, sur les hauts plateaux du Pilat –, cet établissement public agricole accueille près de 700 élèves, de la 3ᵉ à la licence, ainsi que des adultes en reconversion. Son ambition ? Former des professionnels capables de conjuguer performance économique, durabilité environnementale et ancrage territorial.
“Nous enseignons autant la gestion technique d’une ferme que la compréhension des dynamiques territoriales et du changement climatique, résume Jean-Baptiste Auroy, directeur du Campus Agronova. Notre école fonctionne comme un écosystème en interaction avec son territoire.” Dans un contexte agricole en pleine mutation, où les agriculteurs doivent s’adapter aux enjeux environnementaux et économiques, Agronova veut former des professionnels polyvalents, capables de penser leur métier autrement. Cela passe par des méthodes pédagogiques ancrées dans la pratique, l’expérimentation et la compréhension globale du territoire.

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Une pédagogie ancrée dans la réalité du terrain
Loin des cours théoriques déconnectés du réel, l’approche du Campus Agronova repose sur l’expérimentation et l’immersion. Chaque site de l’école a une identité bien spécifique et propose un environnement de formation concret. Sur le site de Précieux, l’exploitation agricole joue un rôle central. Une cinquantaine de vaches laitières y sont élevées, et un projet de méthanisation est en cours de création. Ce dernier a un double objectif : valoriser les déchets organiques tout en offrant une formation pointue aux élèves sur les techniques de gestion énergétique en milieu agricole.
“Plutôt que de méthanisation, il faudrait davantage parler de récolte du biogaz, précise Guillaume Leclercq, chef de projet au campus. Nous avons opté pour une installation légère adaptée à la taille de notre exploitation. C’est un processus complexe, mais qui peut devenir une source de revenu stratégique pour les agriculteurs.”

Cette approche illustre la volonté du campus d’intégrer des solutions réalistes et accessibles aux fermes de taille moyenne, qui représentent une part importante du tissu agricole français. Les étudiants apprennent ainsi à maîtriser une chaîne de production complète, de l’élevage à la gestion des ressources énergétiques, en passant par la valorisation des déchets. À Saint-Genest-Malifaux, l’approche est différente, mais tout aussi innovante. À 1 000 mètres d’altitude, c’est une ferme biologique qui sert de support pédagogique, et y élève quelque 130 chèvres laitières. Ici, les pratiques agroécologiques avancées sont mises en application :
- Rotation des cultures pour préserver la fertilité des sols.
- Couverture permanente des sols pour limiter l’érosion et favoriser la biodiversité.
- Suppression des intrants chimiques, remplacés par des solutions alternatives naturelles.
“Notre objectif est d’aller au-delà de la simple transmission de techniques agricoles”, explique un enseignant. “Nous voulons développer une approche globale qui tienne compte des cycles naturels, des interactions entre espèces et des contraintes économiques.” Ces pratiques ne sont pas figées : les élèves et enseignants testent de nouvelles méthodes en s’appuyant sur des retours d’expérience et des innovations venues d’autres territoires. L’école joue ainsi un rôle d’incubateur d’idées pour une agriculture plus résiliente.

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Agroécologie et adaptation au changement climatique
L’un des enjeux majeurs du Campus Agronova est de préparer ses élèves aux mutations climatiques. Face aux sécheresses et aux épisodes climatiques extrêmes, l’établissement mise sur une approche territoriale globale, plutôt que sur une simple addition de solutions techniques.
“Nous ne donnons pas de recettes toutes faites, mais nous leur apprenons à raisonner en fonction du potentiel d’un territoire, explique Jean-Baptiste Auroy. Il faut s’adapter, car les métiers agricoles vont énormément évoluer dans les prochaines décennies. Notre plus grande fierté, c’est quand un ancien élève revient quelques années après et nous explique qu’il a complètement changé ses pratiques depuis sa sortie de l’école pour s’adapter à la réalité et aux évolutions. Notre métier est un métier vivant.”
L’eau, un enjeu stratégique pour le Campus Agronova
L’un des défis majeurs pour les futurs agriculteurs formés à Agronova concerne la gestion de l’eau. En période de sécheresse, l’accès à l’eau devient un facteur limitant pour l’agriculture.
L’école met en place des expériences grandeur nature, notamment sur les bassins-versants et la récupération des eaux pluviales. Les étudiants sont sensibilisés à des systèmes d’irrigation plus efficaces, à l’agroforesterie (pour retenir l’eau dans les sols) et à la recherche de variétés plus résistantes. “Nous ne pouvons pas faire comme si le climat d’aujourd’hui était celui d’il y a 30 ans, souligne un enseignant. Chaque exploitation doit s’adapter et anticiper les futurs bouleversements.”

Former des agriculteurs mais aussi des citoyens
Le Campus Agronova ne se contente pas de former des techniciens agricoles : il forme aussi des acteurs du territoire. Outre les aspects techniques, les élèves sont sensibilisés :
- Aux solidarités locales.
- À l’économie circulaire.
- Aux politiques alimentaires et aux circuits courts.
Un point crucial concerne la précarité alimentaire, qui touche 15 % de la population de la Loire et mobilise activement les associations locales. “Il ne s’agit pas seulement d’enseigner des techniques agricoles, mais de former des citoyens capables de penser et de relever les défis climatiques et alimentaires de demain” , insiste le directeur.
L’école participe activement aux Projets Alimentaires Territoriaux (PAT), qui visent à renforcer l’autonomie alimentaire des territoires ruraux et urbains. Les élèves sont encouragés à penser leur rôle au sein d’un système global, où l’agriculture ne se limite pas à la production, mais inclut la distribution, la transformation et la consommation.

Un Campus Agronova en perpétuelle évolution
L’avenir du Campus Agronova s’inscrit dans une dynamique de transition permanente. Plusieurs questions se posent pour les années à venir :
- Une conversion totale au bio ? Le site de Saint-Genest-Malifaux fonctionne déjà en agriculture biologique, mais une généralisation du modèle sur tout le campus est encore en discussion.
- L’intégration de nouvelles filières ? L’établissement pourrait ouvrir ses formations à de nouveaux domaines, notamment sur l’agriculture urbaine et la revalorisation des sols dégradés.
- Des innovations énergétiques ? L’expérimentation autour de la méthanisation pourrait s’étendre à d’autres énergies renouvelables, notamment le photovoltaïque et l’agrivoltaïsme.

“Nous n’avons pas pour vocation d’imposer un modèle unique”, conclut Jean-Baptiste Auroy. “Notre but est d’éveiller la curiosité et de former des professionnels capables de s’adapter à un monde en mutation.”
Par son approche pragmatique et ancrée dans le territoire, Campus Agronova ne se contente pas d’accompagner la transition agricole : il l’incarne. Une école où chaque projet étudiant devient une graine d’avenir, prête à faire éclore de nouvelles manières de cultiver, produire et nourrir.
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