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Miyam, l’épicerie familiale sobre et zéro déchet

Depuis 2019, cinq boutiques Miyam ont fleuri à Paris, et rencontrent un franc succès. L’objectif de l’enseigne est de pousser à une meilleure consommation, tout en gaspillant moins. Un modèle économique basé sur la circularité et la sobriété.

Le 16/12/2022 par WeDemain
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Miyam se présente comme un "Marché couvert de produits frais". Crédit : Lisa Henry et Juliette Boulegon.
Miyam se présente comme un "Marché couvert de produits frais". Crédit : Lisa Henry et Juliette Boulegon.

Derrière le comptoir “boulangerie” de la boutique Miyam, Élie Sebbag s’active. Entre les pains de semoule et la cafetière de café de datte, il sert ses clients le sourire aux lèvres. Le 82 rue Beaubourg, à Paris, est la première boutique qu’il a inaugurée avec son frère Samuel et sa sœur Léa en 2019. Leur ambition : développer un concept d’épicerie s’inspirant de la « cuisine de mamie » et permettant de mieux consommer. En trois ans, ils ont ouvert cinq adresses. Dans les rayons, on trouve des produits locaux, de saison et bio le plus souvent.

Si le modèle Miyam n’est pas nouveau – il existe par exemple onze boutiques Les Saisonniers à Paris basées sur le même principe –, l’entreprise familiale cherche à se démarquer. Par exemple, en ne vendant ni poisson, ni viande, ni produits transformés (tofu, kombucha…). Mais aussi à travers ses prix, plus bas que certaines chaînes de supermarché bio. Ou encore par le recyclage aussi de ses invendus, afin de tendre vers le zéro déchet.

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Dans les magasins Miyam, les cagettes sont posées à même le sol, sans fioritures. Crédit : Lisa Henry et Juliette Boulegon.

En 2022, WE DEMAIN a noué un partenariat avec le Centre de Formation et de Perfectionnement des Journalistes (CFPJ). Onze jeunes journalistes en contrat de professionnalisation ont travaillé à la production d’une série d’articles autour du thème de la sobriété. Retrouvez ici l’ensemble des sujets publiés sur la question.

Un contact privilégié avec 160 cultivateurs

L’entreprise choisit de collaborer avec des petits producteurs à 95 % français, et dont 90 % sont bio, dans un rayon d’environ 170km de Paris. « Nous travaillons avec 160 cultivateurs. Depuis trois ans, nous passons une semaine par mois à aller à leur rencontre et à en chercher des nouveaux », explique avec fierté Elie Sebbag.

La fratrie met un point d’honneur à maintenir le contact. « Nous avons été touchés qu’ils prennent le temps de venir nous voir dans notre exploitation et qu’ils s’intéressent réellement à notre travail », raconte Sandy Mckeen, le producteur de yaourt et de fromage dans le Perche qui fournit Miyam depuis février 2021. Les producteurs localisés dans les mêmes régions mutualisent leur commande et n’utilisent qu’un seul camion de livraison. « Cela facilite le transport et permet d’avoir un impact carbone moins important », ajoute Léa, cofondatrice et cadette du trio.

Chez Miyam, la qualité avant la quantité

Dans la boutique de Beaubourg, comme dans toutes les autres, courges, choux, fruits et légumes de saison débordent des cagettes en bois posées à même le sol. Sur les étiquettes, la provenance des produits est mise en avant. Le trio sélectionne ses fournisseurs et les producteurs avec des critères bien précis. « Aucun traitement chimique, pas d’agriculture en serre ou hors-sol, et des produits qui ont du goût. Nous mettons en place, avec une entreprise spécialisée, des analyses complètes des sols de nos agriculteurs afin d’en vérifier la qualité », assure Léa Sebbag.

Et si les conditions écologiques ou sociales ne permettent pas une récolte optimale, l’équipe choisit de se priver de certains produits. Quitte à attendre plusieurs mois avant qu’ils ne retrouvent leur place dans les rayons. La clientèle s’adapte aux arrivages, parfois aléatoires. « Pendant trois mois nous n’avons pas eu de pommes de terre à cause des sécheresses de cette année. Malgré ça, on n’allait quand même pas s’approvisionner à Rungis », ironise Elie Sebbag.

« Notre parti pris depuis la création est d’être moins cher qu’une boutique bio classique »

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Des prix abordables pour des fruits et légumes bios et locaux. Crédit : Lisa Henry et Juliette Boulegon.

Dans la boutique de la rue du Faubourg Saint Antoine, petite dernière de Miyam, ouverte depuis huit mois, Stella, une des vendeuses, réorganise les courges butternut. Pierre, client régulier, se dirige d’un pas décidé vers des pommes de terre non lavées recouvertes de terre. « Honnêtement, je me fiche un peu de la forme des légumes, détaille-t-il. Je sais qu’ils sont bons alors peu importe s’ils sont cabossés ou terreux. » Ne pas nettoyer les légumes avant la vente permet d’économiser de l’eau.Mais aussi de les conserver plus longtemps, une autre façon de limiter le gaspillage. De plus, ne pas trier les légumes lors de l’achat auprès des agriculteurs, contrairement aux chaînes de grande distribution, permet aux producteurs de mieux écouler leurs stocks.

Au-dessus des cagettes, des écriteaux indiquent 3,20€ le kilo de courges d’Île-de-France, 2,95€ le kg de pommes de Picardie. « Notre parti pris depuis la création est d’être moins cher qu’une boutique bio classique, précise le cofondateur. Le but est de ne pas cibler qu’une clientèle privilégiée. » Ces prix bas sont possibles grâce aux économies significatives faites en évitant les intermédiaires. En effet, Miyam n’utilise ni marketplace, ni sous-traitant.

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Des fruits et légumes de saison, le plus possible produits localement. Et à prix juste. Crédit : Lisa Henry et Juliette Boulegon.

Rien ne se perd tout se transforme

De la mise en rayon à la fermeture du magasin, Stella veille sur les stocks. Régulièrement, elle plonge la main dans les caissettes, à la recherche de légumes qui ne seraient plus consommables. Le modèle repose aussi sur le zéro déchet. « Je vérifie leur état, si l’un d’entre eux est trop mou, fané ou abîmé, je le mets de côté« , détaille-t-elle. Chaque matin à 8 heures, un camion fait la tournée des cinq magasins. Il récupère les légumes « fatigués » et autres produits à la limite de la péremption. Direction Romainville, où une brigade de sept cuisiniers, dirigés par Samuel, benjamin de la fratrie, les transforme.

Dans le laboratoire, les concombres trop mous deviennent du tzatziki. La crème bientôt périmée permet de confectionner un cheesecake. Et les dernières tomates invendues sont cuisinées en sauces et mises en conserve. Une fois transformés, les produits sont rapportés en boutiques et remis en rayon pour une deuxième vie. Cette boucle fermée permet aux boutiques Miyam de n’avoir que 1 % de perte.

Des produits cuisinés et conserves estampillés « Miyam »

Toujours dans cette démarche de cercle vertueux, les cartons ont aussi une seconde vie. « Pour les plus grands ils sont envoyés au labo à Romainville qui les utilisera pour nous livrer ensuite nos plats cuisinés, et pour le reste nous les réservons à l’association Carton Plein, qui vient les chercher et les réutilise par exemple pour des déménagements », évoque Stella, la vendeuse. 

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Les étiquettes dessinées par le studio “Le Préau” spécialement pour les boutiques Miyam. Crédit : Lisa Henry et Juliette Boulegon.

Une fois mis en rayon, certains de leurs bocaux sont ornés d’une étiquette originale et colorée sur laquelle on peut lire. « Miyam a déniché … » ou encore « Miyam a cuisiné ». Ainsi le client connaît leur provenance. Les contenants en verre ou boîtes d’œufs ont aussi droit à un nouvel avenir. « Je viens ici pour les œufs principalement car je peux réutiliser les boîtes et je trouve ça très pratique et économique« , témoigne un client. Même les fruits et légumes qui ne peuvent pas être transformés terminent dans un bac à compost. Qu’une entreprise, Les Alchimistes, transformera en terreau… vendu ensuite chez Miyam ! La boucle est bouclée…

Miyam en chiffres :

  • 95% de producteurs français 
  • 5% de producteurs Italiens et Marocains 
  • 90% de produits labellisés bio 
  • 1% de perte 

Autrices : Lisa Henry et Juliette Boulegon.

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